Ayrault peut enterrer le rapport Gallois : il est mauvais

Publié le 07 novembre 2012 par Copeau @Contrepoints

La vérité est que ce rapport est extrêmement décevant, convenu, passéiste : une véritable sclérose en matière de politique économique dans le pays.

Par Vladimir Vodarevski.

Le 5 novembre, Louis Gallois remet son rapport à Jean-Marc Ayrault.

Le tant attendu rapport de Louis Gallois sur la compétitivité a fini par être publié. Les médias ont fait leur une sur la seule proposition dérangeante : la diminution de la dépense publique. Et encore, ce point apparaît au milieu d'une proposition de diminuer les charges sociales, qui se traduirait également par un simple report des prélèvements vers d'autres personnes. La vérité est que ce rapport est extrêmement décevant, convenu, passéiste. Le mot qui vient à l'esprit, peut-être est-il un peu fort, est la sclérose. Une véritable sclérose en matière de politique économique dans le pays.

Il y aurait beaucoup à écrire. Le rapport est basé essentiellement sur l'interventionnisme, accuse la concurrence internationale, la politique monétaire, bref, les poncifs habituels. Rien de nouveau. Mais c'est dès le titre que ce rapport est si décevant, et l'orientation définie par ce titre ne peut que le mener vers les mauvaises conclusions habituelles. Ce rapport s'intitule : « Pacte pour la compétitivité de l'industrie française».

Tout est dit dans le titre. Ce n'est pas un pacte pour la compétitivité de l'économie française. Non, seule l'industrie est digne d'intérêt. La France a les yeux rivés sur l'Allemagne voisine, et ne voit que la réussite de son industrie. Et oublie totalement la plus grande puissance mondiale, qui écrase le monde de son hégémonie : les USA. Quelle est la part de l'industrie dans le PIB US ? Selon le Bureau of Economic Analysis, du département du commerce des USA, cette part s'élevait à 12,2%, hors construction, en 2011. Comme en France, donc, puisque, selon le rapport de Louis Gallois, la part de ce secteur s'élevait à un peu moins de 12,5% dans notre pays en 2011.

Les USA sont en crise à cause de leur politique monétaire, de la politique du crédit facile. Mais ils restent le moteur de l'innovation en économie.

Il est convenu de dire que c'est l'industrie qui mène l'économie. Pourtant, c'est plutôt l'inverse qui est observé. Ainsi, l'industrie a besoin des services pour proposer de nouveaux produits, et donc perdurer. Ce sont des services de recherche, des logiciels, des études. Aujourd'hui les jouets Lego intègrent de l'électronique. Il y a donc un logiciel à l'intérieur. Il a fallu utiliser un logiciel pour les concevoir. Les moteurs automobiles intègrent de plus en plus d'électronique. C'est une entreprise de l'immatériel, Google, qui a conçu la voiture sans conducteur autorisée à circuler en Californie. Les voitures sont conçues grâce à des logiciels, qui réduisent le coût de conception. Les avions, merveilles industrielles, dépendent complètement des logiciels pour leur pilotage de nos jours. Un Rafale est trop instable pour voler sans ses programmes informatiques. Sans ces logiciels, qui sont inclus dans les statistiques de services, d'immatériel, l'industrie ne serait pas aussi dynamique.

Prenons également un exemple de la nouvelle économie, la société de vente sur internet Amazon. Amazon, ce sont des investissements dans des entrepôts, de la logistique. Elle achète des services de transport. Elle gère des serveurs informatiques, qui génèrent des besoins en construction, en maintenance. Amazon est un moteur pour l'économie. De même, les mobiles d'Apple, comme le système d'exploitation Androïd de Google, entraînent la création de nouvelles sociétés, de nouvelles activités. Youtube de Google permet à des particuliers, à des entreprises, de diffuser des films, des sketchs, et de gagner de l'argent ainsi. Ce qui entraîne des besoin en énergie, des besoins en serveur, des besoins en technologie, en constructions. De la croissance. C'est la nouvelle économie qui tire la croissance, pas l'industrie.

L'économie peut se développer de différentes manières. Si l’État veut vraiment intervenir, autant développer les atouts du pays. Par exemple, le tourisme et l'art de vivre pour la France. Notre pays a une richesse incroyable en ce domaine, et reconnue dans le monde entier. Les esprits chagrin se moqueront. Mais une des grosses multinationales américaines ne s'appelle-t-elle pas The Walt Disney Company, qui gère des parcs d'attractions, des hôtel ? Qu'est-ce-qui qui fait la richesse de Las Vegas ?

La France a une entreprise comme Louis Vuitton, qui n'a rien d'une entreprise artisanale. Elle a sa richesse gastronomique, ses spécialités qui peuvent se vendre dans le monde entier. Il y a du potentiel. Et, surtout, le potentiel de soutenir l'économie. Et, même, de soutenir les nouvelles technologies !

Ainsi, une recherche sur les agences web montre qu'il y en a un certain nombre plus ou moins spécialisées dans le secteur du tourisme. Ce qui est fort logique, car les ventes se font sur internet. Cela signifie des sites vitrines, des systèmes de réservation, de paiement.

Last but not least, que fait Citroën pour développer une image de constructeur haut de gamme en Chine, pour sa gamme DS ? Il prend un concept car, Numéro 9, et le photographie dans les lieux typiques Paris, capitale du luxe et de l'art de vivre pour les chinois. Le tourisme au secours de l'automobile. Les USA ont une image puissante, qui sert leur économie. La France dispose de tels atouts.

Le rapport de Louis Gallois ignore totalement tout cela. Ce rapport est tourné vers le passé. Il refuse l'avenir. Il refuse l'innovation, l'évolution. Il ressasse les opinions d'énarques, d'X-Mines, qui ne connaissent rien à l'économie.

Le problème de la France, c'est qu'on considère que c'est la politique industrielle qui a permis le rattrapage économique du pays dans les années 50-60. Alors que c'est le déferlement de produits nouveaux, de magasins nouveau, de nouveaux modes de vie, qui en sont à l'origine. La France s'est ouverte à la nouveauté. Elle a connu une accélération du changement. Elle a adapté sa législation, ses règlements, à la nouvelle économie de l'époque. Elle avait une attitude plus pragmatique.

Aujourd'hui, elle fait l'inverse. Elle se replie sur elle-même, sur ses dogmes, sur son idéologie. Elle veut faire entrer la nouvelle économie dans son cadre de pensée, au lieu de surfer sur la vague du changement, du progrès.

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