par Michel Bonnet
La quête de l’ours d’Yves Salingue.
Je ne connais pas personnellement cet homme, Yves Salingue, dont on dit qu’il partage son temps en deux parties, son temps d’avionneur chez Airbus où il est ingénieur – je ne sais pas s’il travaille encore – et un temps de quête dans les Pyrénées. Cette recherche en montagne est assez particulière et je pourrais commencer par vous dire qu’il cherche à voir des ours… mais rien n’est moins sûr car je crois qu’il est surtout à la recherche de la vie, de l’absolu, de lui-même.Ces grandes balades dans la montagne et la solitude sont les occasions de se rencontrer, de se connaître et l’ours n’est qu’un prétexte ou la cerise sur la gâteau…
D’ailleurs ce magnifique ouvrage publié par les éditions du Rouergue et France Bleu est la preuve de ce que j’avance puisque le titre indique bien la recherche de l’ours tandis que l’ours est peu présent à travers les pages…
Il y a d’abord la nature, une nature belle, sauvage, délicate et cruelle. Elle exige de nombreux efforts pour enfin la voir s’ouvrir au promeneur. Par exemple ce Vallon dont Yves Salingue tombe amoureux n’est accessible par un délicat chemin…
Vous ne le trouverez que si vous sillonnez la vallée d’Aspe dans tous les sens car si Yves le nomme le Vallon, tout simplement, c’est pour qu’il garde un certain anonymat… « Le Vallon se défend très bien lui-même tant il est difficile d’accès. Qu’il suffise de savoir qu’il se trouve quelque part dans la vallée d’Aspe, qu’il m’est apparu pour la première fois lors de ce stage d’été qui m’avait déjà valu la rencontre du vieux berger et que, du jour où je l’ai vu, je n’ai plus désiré d’autre lieu sur terre ; j’ai su au premier regard que là se trouvait tout ce que je cherchais, tout ce qui m’importait. J’ai su que c’était là qu’aurait lieu la rencontre. »
Je ne veux pas casser la poésie des mots et des photos d’Yves Salingue. Le livre peut se suffire à lui-même, il n’y a qu’à l’ouvrir pour sentir la sérénité monter en nous et atteindre notre esprit pourtant si agité tout au long de l’été… Les souvenirs peuvent alors suivre le même chemin en nous.
Il y a quelques années, dans les Balkans, on me proposa de partir à la chasse à l’ours. Les amis sur place ne respectaient pas trop les lois et il n’y avait pas de gardes pour les contrôler. Je ne voulais pas chasser l’ours, clairement, et je refusais cette proposition qui fut remplacée, immédiatement, par tout un programme passionnant. Mais, aujourd’hui encore, je repense à cette proposition car j’adore la montagne, les grandes randonnées dans ces espaces infinis, je me dis que j’aurais dû accepter, prendre le chemin d’altitude avec ces spécialistes et, qui sait, voir enfin dans la nature cet animal mythique. Alors, j’aurais tout fait pour que l’on ne chasse pas l’animal, que l’on se contente de le regarder. Mais, on ne réécrit jamais son histoire et je ne peux maintenant que profiter de cet ouvrage splendide d’Yves Salingue qui me confirme que l’on ne devrait jamais tirer sur un ours, cet animal qui dans l’antiquité était sacré ou presque et qui descend directement des ours des cavernes qui ont, peut-être, partagé avec nos ancêtres les mêmes abris quand il pleuvait ou faisait froid…
Un très beau travail pour voir la montagne, la nature et les ours d’une toute autre façon… A mettre aussi dans une démarche pédagogique à la biodiversité et au développement durable…
Michel Bonnet
Extrait
Le dernier ours... Un jour prochain, un jour comme si c'était demain, comme si c'était hier, Hartza tirera tout à fait sa révérence et le rideau tombera sur une histoire vieille de milliers d'années.
De Slovénie, de Croatie, d'autres ours viendront bientôt, qui ne remplaceront pas, ni dans nos coeurs, ni dans nos rêves, le véritable ours des Pyrénées. Mais même ceux-là, qu'adviendra-t-il d'eux, dans un monde où toute sauvagerie est réservée à l'homme?"
La Quête de l'Ours, 19 avril 2005
L'ours est une part essentielle des Pyrénées
Ce "fada qui passe son temps à chercher des ours quand il ne construit pas des avions ", c'est Yves Salingue, ingénieur chez Airbus la semaine et guetteur d'ours dans les Pyrénées le reste du temps. Depuis tout jeune, il est fasciné par cet animal mythique et secret, quand son grand-père, berger basque, lui racontait des histoires de transhumance et lui parlait de " l'Autre ", celui que l'on ne nomme pas.
Dans les années 1970, a commencé ce qui allait devenir la grande aventure de sa vie. Pendant plus de trente années, il va arpenter la vallée d'Aspe, espérant sans cesse de nouvelles rencontres avec l'ours. Cette traque pacifique est ardue : il en faut de la patience, de l'obstination et aussi de solides qualités de montagnard. L'ours se mérite, mais chacune de ces éphémères rencontres est un émerveillement.
Tête-à-tête fugitifs, moments de bonheur intense, patience récompensée. Merveilles de la nature aussi, car à attendre l'ours, l'auteur rencontre et photographie bien des sites, des plantes et des animaux qui partagent son territoire. Une flore et une faune rares, observées et décrites avec la précision du naturaliste et le talent du conteur.
De magnifiques images ont été réalisées par l'auteur, de jour comme de nuit, et d'autres par ses compagnons. Car Yves n'a pas cheminé seul. Des amis, aussi mordus que lui, l'ont accompagné tout au long de cette quête pour partager des moments d'amitié exceptionnels. "L'ours n'exige pas grand-chose...", écrit Yves Salingue. "Seulement qu'on lui cède ce bout de montagne dont l'homme n'a nul besoin". Dans la nature, chacun a sa place. C'est pourquoi, loin de toute polémique, sans partis pris aucun, ce livre nous offre une démonstration limpide...
l'ours est une part essentielle des Pyrénées.
Le livre "La quête de l’ours" d' Yves Salingue, aux éditions du Rouergue et France Bleu est en vente à la boutique du Pays de l'Ours.
Pour ceux qui partagent cette quête, l'attente est longue, le temps de lire ce livre. "Cette traque pacifique est ardue : il en faut de la patience, de l'obstination et aussi de solides qualités de montagnard. L'ours se mérite, mais chacune de ces éphémères rencontres est un émerveillement."
Après, vous devenez " l'homme qui a vu l'ours ", c'est ce que je vous souhaite...