Interview de Bruno de Latour, 60 ans, directeur de la publication de Domotique News, la plus ancienne revue mensuelle sur les technologies numériques au service de l’habitat et du tertiaire.
Bruno de Latour, directeur de la publication de Domotique News. © D.R.
Quel a été votre parcours ? J’ai fait un DEA de marketing à Dauphine avant de me lancer dans la presse. J’ai commencé au Quotidien de Paris dans les années 70 où j’écrivais des critiques littéraires. Ensuite, j’ai participé avec Bernard Pivotet Pierre Boncenne à la création de la revue Lire. J’ai travaillé dans d’autres revues comme Les Nouvelles Littéraires, La Quinzaine Littéraire. J’ai fini par m’ennuyer. Je suis alors entré au magazine Le Point, qui était en train de démarrer, où j’ai travaillé pendant 4 ou 5 ans à la rubriqueFutur animée par Daniel Garric et à la rubrique Société. Vers 1982 ou 1983, je suis entré à la rubrique Économie au quotidien Le Matin de Paris, créé par l’équipe de Claude Perdriel (patron de l’hebdomadaire Le Nouvel Observateur). J’ai participé au lancement de Matin Magazine. Cela a été un grand basculement pour moi. On m’a attribué la rubrique Video Life, à savoir 24 pages par semaine ! J’ai vécu le développement de la vidéo, des jeux vidéo et de l’informatique grand public dans la société française.
Vous êtes passé de la machine à écrire à l’ordinateur… Oui. Je suis passé de ma machine Olympia qui faisait »cling » à la fin de chaque ligne au Lisa, le premier ordinateur d’Apple, puis à l’Apple III. Grâce à cette machine, mon activité de journaliste a explosé. A côté de mon salaire auMatin, j’avais 20 bulletins de paie par mois ! J’étais sans cesse en reportage, notamment au CES (Consumer Electronic Show) de Las Vegas. J’ai rencontré Steve Wozniak et Steve Jobs, cofondateurs d’Apple. Ainsi que Nolan Bushnell, un des inventeurs du jeu vidéo. Un jour le patron de Science et Vie m’a appelé pour me faire participer au lancement du magazine Science & Vie Micro. Ce fut un grand succès mais aussi une grande déception pour moi car, lors du lancement (240 000 exemplaires qui se sont arrachés), j’étais coincé par une grève à Washington où IBM m’avait invité au lancement du premier ordinateur grand public embarqué dans une navette spatiale !
Avec Clive Sinclair, inventeur des ordinateurs Sinclair qui ont complètement disparu. © D.R.
Comment en êtes-vous venu à la Domotique ? Après avoir suivi la grande vague de la vidéo et celle de l’informatique grand public, j’ai eu l’intuition, en 1983, qu’on allait assister à la convergence des technologies, à la rencontre entre le son, l’image, les données informatiques, le confort, la sécurité, les loisirs, dans la maison, ladomus ( »maison » en latin). J’ai alors introduit en France le terme Domotique et fondé, en 1984, l’APMF (Association pour les maisons du futur) avec trois autres personnes. Sept ans plus tard, nous étions 4 000 membres ! Quatre ministres ont participé à nos assemblées générales. J’ai commencé à organiser des conférences sur la domotique dans le monde entier. En 1988, j’ai bâti le premier espace d’exposition sur la maison du Futur au CNIT de Paris-La Défense. Pas moins de sept ministres sont venus à l’inauguration, dont le premier ministre de l’époque, Edith Cresson ! La même année, j’avais lancé Domotique News qui en est à son numéro 271 ! Pendant 10 à 15 ans, cette activité a bien fonctionné. Tant et si bien que j’ai lancé un magazine grand public, distribué en kiosques, avec des affiches sur les Champs-Élysées… Je me suis ruiné en trois ans !
Avec Michel Serres, de l’Académie française. Son dernier livre, Petite Poucette, est une brillante analyse du monde des geeks et de leur smartphone. © D.R.
Où en êtes-vous aujourd’hui ? Je continue d’éditer Domotique News ainsi que des suppléments thématiques. J’ai ouvert trois sites Web (Maison-communicante.com, Maison-numerique.com,http://www.batiment-intelligent.com/) et j’en prépare trois autres. A côté de cela, je prépare la 8e édition du Guide des espaces de vie intelligentsqui rassemble les produits numériques pour l’habitat et le tertiaire. Enfin, je prépare également un livre sur l’histoire des technologies, Du minitel au haut-débit. Car j’étais à Vélizy en 1973 lors du lancement du minitel ! Par ailleurs, je cherche à innover dans nos métiers. Or, en dialoguant avec les acteurs du financement de l’innovation, notamment lorsque je dépose un dossier à Oseo, je constate que l’innovation en presse et communication n’est pas reconnue. Pourtant, il y a des besoins dans notre secteur. Je voudrais, par exemple, faire de la formation à distance, organiser des visites de chantier avec des Webcams, construire des espaces numériques pour booster le secteur du bâtiment…
© Propos recueillis par Erick Haehnsen