Pourquoi l’Inde est devenue une tragédie vivante d’auto-illusion
Publié le 04 novembre 2012 par Tkos
Pour qui suit l’actualité du IT en Inde, les composantes sur lesquelles reposent l’industrie, telles l’éducation et l’infrastructure sont fondamentales même si elles ne sont pas spécifiques à ce secteur.
On aime bien en matière d’éducation livrer le chiffre impressionnant du nombre de diplômés produit chaque année par le système indien.
La réalité vue de l’intérieur et surtout dans la pratique pour les recrutement est beaucoup plus nuancée.
Le très sérieux journal indien The EconomicTimes appuie là où cela fait mal dans sa rubrique « Poke me » (Interpelle-moi) sur le sujet « Pourquoi l’Inde est devenue une tragédie vivante d’auto-illusion ». Ce brulôt que beaucoup auraient jugé anti-patriotique et inspiré de l’étranger il y a quelques années, trouve aujourd’hui un écho approbateur des lecteurs indiens et la sélection des commentaires illustre bien le constat amer.
Un brin provocateur, l’auteur, Raghu Dayal, dresse un panorama très pessimiste de l’échec du système éducatif. Mais les faits sont là, une étude internationale de l’OCDE portant sur un demi-million d’élèves de 15 ans place l’Inde en deuxième position … en partant de la fin.
Que dire alors que le QS 2012 (Quacquarelli Symonds) classe sept universités chinoises dans le top 200 et aucune indienne ?
L’humiliation serait-elle à son comble avec une étude qui révèlerait que 92% des diplômés ont des lacunes en programmation et en algorithmie, et que 78% en ont en anglais.
Lachant chaque année 12,5 millions d’étudiants sur le marché du travail sans aucune compétence, le système récolte un jugement sévère du Nobel Amartya Sen : « l’éducation en Inde est en péril ».
A quoi bon se lamente l’auteur de répéter à l’envie le droit à l’éducation, ce qui ne manque pas de lui rappeler ce que dit notre ex-reine Marie-Antoinette « Ils n’ont pas d’écoles ? donnez leur des droits ! ».
Certes il est vrai que le défi démographique est de taille, la population indienne croît chaque année d’une Australie: les 1,4 millions d’écoles ont besoin de 4 millions de nouveaux professeurs alors que 8 millions devraient être remis à niveau.
Aux carences de l’éducation s’ajoute des challenges en matière de santé et de nutrition qui font que l’Inde reste classée 96ème parmi 119 pays sur l’index global de la faim dans le monde.
L’ironie on le sait c’est que le pays trouve le moyen d’importer 1100 tonnes l’an passé pour une valeur de 55 milliards d’euros.
L’exercice intéressant qui consiste à faire réagir les lecteurs est un indicateur très clair de l’évolution des mentalités.
Il y a peu une telle analyse aurait provoqué un véritable lever de boucliers, un concert d’indignations, de vibrants rappels à mettre en avant « l’Inde qui brille » (the shinning India). L’auto-illusion semble laisser place à plus de réalisme et de critiques. Gageons que ces prises de conscience vont aider le pays au potentiel indéniable à reprendre le sens de la marche.