Je sais que je vais choquer beaucoup de mes assidus lecteurs qui - comme de juste - doivent se partager à égalité entre tenants de la gauche et électeurs de droite ... Mais tant pis !
Après avoir pendant des années entendu et lu des tombereaux d’injures à l’égard de Nicolas Sarkozy, voici un livre qui déconcerte. Comment oser mettre en scène un homme courtois, respectueux – surtout du petit personnel – cultivé – lecteur assidu de Barbey d’Aurévilly ( … vous situez ? Les Diaboliques, le Rideau Cramoisi ?) - habité par sa fonction, orateur inspiré, chrétien fervent et légèrement traditionnaliste, capable d’attentions charmantes comme d’homériques colères ? Camille Pascal l’a fait, et d’une belle écriture, ce qui est somme toute sa marque de fabrique. Il devrait écrire des romans !
Certes, Camille Pascal, historien de formation et spécialiste des médias, nous livre son témoignage très subjectif des derniers mois de la campagne présidentielle, alors que dès le début (en janvier 2011) de sa mission à l’Elysée – le Palais, le Château – les sondages prédisent la victoire de la gauche. Par KO en faveur de DSK, évidemment. Jusqu’au 14 mai 2011 en tous cas. Le résultat final sera plus serré que ne laissaient présager la plupart des instituts de sondages. Ce sera une défaite électorale, non une déroute, encore moins une humiliation.
Camille Pascal est une des « plumes » du Président. Après la « plume » en chef, Henri Guaino. Comme toute personne à laquelle il a été demandé un jour d'écrire un discours pour un Chef, il frémit à l'idée de ne pas tomber juste, qu'on lui demande de refaire sa copie, ou pire, qu'on la rabote, qu'on la réécrive. Il a heureusement des domaines de prédilection, qu’on lui laisse volontiers traiter car il a bien et rapidement saisi le rythme, le phrasé, le souffle du PR. En particulier lorsqu’il s’agit de parler de la défense des chrétiens d’Orient, des racines chrétiennes de la France, de la douleur des harkis, ou encore d’organiser un déjeuner secret avec les moniales du Puy en Velay ou un dîner en col romain à la veille de Noël. Ces anecdotes, ces souvenirs sont sincères, sonnent juste, juste un peu trop emphatiques parfois. Le syndrome de Stockholm, peut-être ?
Bref, on visite l’Elysée comme dans une émission de télévision à la Patrick de Carolis – dont Camille Pascal fut le collaborateur - on assiste aux réunions quotidiennes des conseillers dans le salon Vert, sous les ors de la République, on prend en direct l’engueulade terrible dont Nicolas Sarkozy assomme le PDG du groupe PSA lorsqu’il apprend qu’un plan social de 4000 postes va être annoncé le lendemain alors que lui n’en a pas été informé, on suit dans les coulisses de la campagne le jeune fils de l’auteur – 12 ans – admis au côté du Président de la République pour lui tenir les boutons de manchettes lorsque ce dernier passe une chemise propre.
C’est la contre-épreuve du livre de Laurent Binet « Rien ne se passe comme prévu » où l’auteur là aussi semble ensorcelé par le personnage qu’il accompagne. Mais cela confirme aussi le portrait psychologique que donnait Bruno Le Maire du président alors ministre de l’Intérieur dans « Des hommes d’Etat » …
Et un livre ouvertement favorable à Nicolas Sarkozy, même parfois teinté de naïveté, ou de candeur devant la permanence des mœurs de Cour, quelle bouffée de fraîcheur !
Scènes de la vie quotidienne à l’Elysée, témoignage de Camille Pascal, édité chez Plon, 270 P. 19€