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Quand la France s’attaque à Google

Publié le 03 novembre 2012 par Edelit @TransacEDHEC

 Entre le fisc et la presse de l’Hexagone, Google risque de devoir payer beaucoup.

Le fisc contre Google

Selon le Canard Enchaîné, le fisc français aurait réclamé un milliard d’euros à Google pour fraude sur plusieurs années, alors que le moteur de recherche dément cette information. La filiale française de Google est censée uniquement assister Google Ireland en marketing; elle ne doit exercer aucune activité commerciale. De ce fait, son chiffre d’affaires se limite à ses coûts majorés d’une marge de 8%. Cela correspond en 2011 aux 138 millions d’euros que l’entreprise a déclarés dans l’Hexagone. Néanmoins, le raid fiscal du 30 juin 2011 dans les locaux de Google France a montré que la filiale outrepassait sa mission. En effet, elle aurait conclu des contrats de publicité qu’elle aurait par ailleurs signalé au fisc irlandais et non français. La filiale réaliserait en réalité un chiffre d’affaires de près de 1,5 milliards d’euros en France, soit dix fois plus que déclaré. Par conséquent, elle aurait payé uniquement 5,5 millions d’euros d’impôts au lieu d’environ 150 millions d’euros en 2011.

Un tel montage fiscal n’est pas rare pour le géant informatique qui est habitué à transférer ses fonds d’une filiale à une autre pour optimiser sa fiscalité. Par exemple, la maison mère irlandaise basée aux Bermudes a créé une filiale irlandaise à qui elle va vendre ses droits de propriété intellectuelle. D’une part, les bénéfices réalisés par la maison mère sont exemptés d’impôts car son centre de management n’est pas situé en Irlande. D’autre part, la filiale peut déduire son dû de ses impôts. Google est doublement gagnant, d’où le nom « double irlandais ». Plus rentable encore, la technique du « sandwich hollandais » consiste à faire passer le paiement de ces droits par une filiale hollandaise où les impôts sur les bénéfices sont nuls. Ce montage fiscal a permis à Google d’être taxé sur uniquement 3% de son chiffre d’affaires hors Etats-Unis selon Bloomberg en 2011.

Reste à Google maintenant de trouver une solution à son problème fiscal en France. L’entreprise souligne qu’elle a contribué au dynamisme de l’économie française en créant 400 emplois et en investissant 17 millions d’euros en recherche et développement en 2011. Cela justifierait une indemnisation fiscale. Néanmoins, le géant informatique garde aussi en tête qu’il ne réalise qu’un chiffre d’affaires dérisoire avec Google France. Fermer cette filiale n’aurait pas de grandes répercussions financières mais lui éviterait de nombreux problèmes.

La presse contre Google

Google ne doit pas uniquement en découdre avec le fisc français mais doit également faire face aux revendications de la presse hexagonale. Les éditeurs reprochent au moteur de recherche d’utiliser gratuitement les liens vers leur site d’actualité, alors qu’ils lui permettent d’attirer davantage de visiteurs et donc de réaliser davantage de bénéfices à travers la publicité. Ils voudraient que l’entreprise leur verse une contrepartie financière pour l’utilisation de leurs liens.

A ce sujet, François Hollande a reçu le PDG de Google Eric Schmidt lundi 29 octobre. Le président français pousse l’entreprise à négocier directement avec les éditeurs, en lui rappelant qu’elle a déjà un litige avec le fisc. Néanmoins, s’il ne parvenait pas à un accord d’ici la fin de l’année, il compterait instaurer une taxe que Google devrait payer aux éditeurs à chaque fois qu’il indique un de leur site. Le moteur de recherche ne voit pas d’un bon œil ces propositions. Il craint une généralisation du phénomène : si tout site demande à être dédommagé une fois qu’il est cité, l’existence-même de la société serait remise en question. Pour éviter de payer la taxe, Google envisage de ne plus référencer les journaux français ou de fermer Google Actualités.

Faut-il prendre le risque que Google boycotte la presse française ? Les éditeurs brésiliens le conseilleraient étant donné qu’ils ont perdu seulement 5% d’auditeurs en n’ayant plus de liens plus sur le moteur de recherche. A l’inverse, ce fut un échec pour les Belges qui durent reprendre les négociations avec l’entreprise. Ceci est probablement lié au fait que le trafic des sites d’actualité vient essentiellement des moteurs de recherche et plus particulièrement de Google (28%). N’oublions pas qu’il nous reste une solution intermédiaire : Google pourrait cesser de référencer les éditeurs qui veulent une indemnisation mais continuer à citer ceux, souvent financés par la publicité, qui refusent ce système.

Marjolaine Basuiau


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