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C’était le mois du fair-play

Publié le 15 octobre 2012 par Ksd @KarfaDIALLO

Ils ont l’art d’appuyer là où ça fait mal ces centaines de jeunes sénégalais qui ont caillassé et incendié le stade, les joueurs, les arbitres, officiels et ministres dans les dernières minutes du match Sénégal-Cote d’Ivoire de ce week end.

C’était le mois du fair-play

Gageons que les déclarations outrées des autorités sénégalaises devant le déferlement condamnable de violence lors du match Sénégal-Cote d’Ivoire seront très vite rangées au rayon des oubliettes. Comme sera rapidement expulsée cette honte, qui m’habite en tant que panafricaniste, de saccager la pensée et les actions de sénégalais illustres comme Léopold Sédar Senghor et Cheikh Anta Diop qui ont œuvré sans relache pour l’intégration et la paix entre les nations africaines.

Déçus par le manque de pugnacité de Lions dépassés par l’engagement et le talent d’Eléphants décisifs dans la composition et la finition, les centaines de supporters sénégalais qui ont craché leur bile révèlent un malaise profond qui touchent tous les pans d’une société dont la violence est devenue le mode d’exorcisme préféré.

L’ironie de l’histoire voudrait que la fédération sénégalaise, sur injonction de la Fifa, ait décidé de faire de ce mois d’Octobre le mois du fair-play comme l’indiquait son Président Augustin Senghor « J’insiste pour dire que la mobilisation n’exclut pas le fair-play.  Surtout que le Sénégal est connu pour son fair-play. Un accueil à nos frères ivoiriens n’enlèvera rien à notre détermination à les battre. Si c’est bien compris nous allierons l’efficacité et la grande animation dans les tribunes dans l’esprit de fraternité avec nos frères  ivoiriens ».

Et l’échange de cadeaux entre les deux comités de supporters, et tous les salamalecs dont les sénégalais sont passés maîtres, n’auront pas réussi à endiguer le suintement de cette désolante et détestable habitude que notre irresponsabilité est entrain de diffuser dans notre jeunesse. Et l’on se tromperait si l’on analysait la question que sous l’angle du foot.

Je précise n’être pas un sportif. Je regarde très rarement les matches de football. Je me suis mis à la lutte pour veiller à l’admiration suspecte de ma femme pour les corps magnifiques des lutteurs. La seule souffrance, exceptionnelle, que j’inflige à mon corps est de monter les huit étages qui me mènent à mon foyer.

En réalité, les deux sports-roi au Sénégal, la lutte et le foot, cristallisent de façon irréversible les frustrations et ambitions d’une jeunesse déboussolée par des débouchés bouchés, une morale politique molle et hypocrite, une presse qui ne presse plus que le sensationnel, des prédicateurs dont la carrière repose sur une violence verbale et physique, bref une société qui tarde à dessiner une nouvelle Espérance, un nouveau Sénégal.

La lutte sénégalaise est là pour nous le rappeler. Après d’hypocrites engagements pour le fair-play, les nouveaux dieux et demi-dieux des arênes cèdent à la folie en s’opposant, s’exposant et s’offrant au plus offrant, au plus virulent. Prêts à tout pour donner un sens à une vie morne, une espérance déçue.

Les facteurs qui accouchent de cette violence sont connus. Ni l’enjeu de la rencontre, ni les erreurs d’arbitrage, ni les pratiques mystiques ne peuvent expliquer ces comportements qui sont entrain de passer d’exceptionnels à structurants. A tel point que le calme après les combats ou certains matches est devenu étonnant. Tant des précautions et conseils de prudence sont maintenant distillés dans les familles où la promenade est interdite les soirs de matchs ou de combats.

Bien sur, l’éducation des supporters est plus que jamais nécessaire. Mais les mesures sécuritaires et techniques et la sanction des fautifs tendent à montrer leurs limites.

J’attends, j’espère une sanction à la hauteur de l’arrogance sénégalaise. Une punition qui nous oblige à l’aggiornamento nécessaire pour remettre le jeu à sa place. Et, les nouvelles autorités politiques, seraient bien avisées à prendre conscience que cette violence tant qu’elle n’est pas canalisée vers un but d’accomplissement national sera comme une épée de damoclés !



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