Qu’est ce qui fait un grand James Bond? Son histoire, tout simplement. Les épisodes les moins réussis enchaînent les défilés de gadgets inutiles, les conquêtes les plus stériles, et les méchants les plus épais; sans parler d’un acteur souvent pathétique dans ce rôle qui demande une certaine épaisseur physique. Mais Skyfall ne tombe dans aucun de ces travers.
Daniel Craig, d’abord. J’avais déjà évoqué à ses début dans ce rôle, dans Casino Royale, comment il incarnait à merveille le héros de Ian Flemming. Toujours cette puissance contenue, toujours ce regard d’un bleu intense. Mais Craig a encore gagné en épaisseur: c’est une brute, profession tueur (licensed to kill). Il est prêt à tout, pour l’Angleterre, et pour M, sa mère spirituelle. Et puis, il a vieilli. Oui, il a pris des rides, ne passe plus les tests d’aptitude, s’essouffle. La patte de Sam Mendes, et de son superbe American Beauty, surement.
Exit les amourettes à la con, les gadgets inutiles: ce Bond se contente d’une arme de poing et d’un émetteur radio. Et ça marche, jusqu’au retour de l’antique Aston-Martin des débuts.
L’histoire, elle aussi, mérite le détour. On est loin des méchants habituels, magnats de la presse ou marchands d’armes. Ce méchant là, joué par Javier Bardem, est un ancien du MI-6, passé du coté obscur de la force. Un anti-Bond, en quelque sorte, son alter ego, prêt à tout pour prendre sa revanche sur ses anciens patrons.
Ce Bond là se bat aussi contre les politiques, qui ne conçoivent plus l’intérêt de l’ »intelligence« , des services secrets. A quoi bon se battre contre les forces de l’ombre si toutes leurs actions de communication se passent à découvert, sur le web et YouTube, en particulier?
Oui, Skyfall est un excellent crû. Et fermez les yeux sur les incohérences, on ne boude pas son plaisir.