Voici un livre d'art à regarder mais aussi à lire. Écrit pas un spécialiste de l'estampe, Mikhaïl Ouspenski, ces cents images d'Edo dessinées par Hiroshige nous plongent dans le quotidien révolu d'un Japon en pleine mutation, quand son contact avec l'occident commence à empeigner la culture.
Un Japon d'images et de mots
À travers une courte histoire de l'estampe retracée dans les grandes lignes, on comprend le contexte et la filiation dans lesquels s'inscrit le travail d'Hiroshige.
On considère souvent l'estampe japonaise comme un élément incontournable de l'art de ce pays, en oubliant que ses sources proviennent de l'Europe. C'est en observant les tableaux des peintres Hollandais, notamment leur approche de la lumière avec le clair obscur, et leur technique de perspective, que les artistes japonais ont trouvé une inspiration nouvelle.
Ces estampes ont ensuite, à leur tour, influencé les artistes occidentaux. Le Japonisme était né. Un va-et-vient entre deux mondes étaient lancé, un mouvement perpétuel qui continue toujours à nourrir l'inspiration tant en occident qu'au Japon.
Enfin, en donnant les particularités des maîtres précédents Hiroshige, on comprend mieux ce qui caractérise sont approche et ce qui la différencie notamment d'Hokusai. La vision plus humaine, plus intime d'Hiroshige invite moins à la contemplation spirituelle mais plus à l'émotion. Ses paysages sont habités non par un divin grandiose mais par la magie des petites choses de la vie.
Voyage dans des temps révolus
L'ouvrage présente ensuite chaque estampe avec un texte explicatif. Elles sont classée par saison. Outre une description du lieu, l'auteur nous donne des informations précieuses et agréables sur la vie quotidienne. Avec un détail, il nous transporte dans cet Edo du passé avec poésie et précision.
Mises à part quelques maladresses de traduction (le terme hiéroglyphe est employé pour parler des kanjis, les idéogrammes chinois), j'ai trouvé le texte vraiment abordable même pour des personnes ne connaissant pas bien le Japon. La grande histoire est relatée en filigrane avec des petites anecdotes et des légendes. Bien-sur, ce livre ne se dévore pas comme pas un roman, il se feuillette, se picore. Et à chaque nouvelle estampe, on découvre un autre quartier, de nouveaux métiers, des traditions. Un peu de ce Japon révolu qui fascine toujours.
Hiroshige, Cent vues d'Edo est donc un livre d'art pas trop onéreux où les reproductions sont magnifiques, et où le texte n'est pas décoratif ni pompeux. Un beau cadeau pour les curieux du sujet ou pour les amateurs de belles images.
Ce livre a été chroniqué dans le cadre du défi lecture "Image du Japon", il s'agit du cinquième ouvrage sur ma liste. N'hésitez pas à participer vous aussi, le défi est prolongé jusqu'au printemps 2013 !
Copyright : Marianne Ciaudo