Nous retrouvons, dans ce documentaire, le physicien américain Brian GREEN. Et, cette fois, il ne s’agit plus du Temps, mais d’une autre réalité, tout aussi extraordinaire, celle de l’espace.
Nous tous, vivons entourés d’objets, eux-mêmes constitués d’atomes de matière.
Mais, dans l’hypothèse où il nous prendrait la fantaisie soudaine de retirer, d’éliminer l’ensemble de ces objets qui nous entourent plus l’ensemble des objets plus lointains qui emplissent notre Univers (planètes, étoiles, galaxies, atomes…), que resterait-il ?
Brian Green nous le fait remarquer : nous serions fort tentés de répondre : « rien ! ». Et voilà où nous nous trompons. Car il resterait de l’espace vide. Et « L’ESPACE VIDE N’EST PAS RIEN ».
Non content d’être en mesure de « se courber », de « se tordre » et d’ « onduler », l’espace - nous révèle Brian Green- est « le tissu même du cosmos » !
Ce qu’il faut savoir, c’est qu’ « il s’y passe en fait énormément de choses ».
Pour commencer, « L’ESPACE EST CE QU’IL Y A DE PLUS ABONDANT DANS L’UNIVERS ». Entre autre, parce qu’il se loge au plus intime de la matière elle-même : sachez en effet que « même les atomes sont presque entièrement faits d’espace vide » ! L’espace vide peut donc être regardé et envisagé comme « un constituant de la matière » exactement au même titre que les particules.
Restent les questions : « pourquoi l’espace est-il tridimensionnel » et « grand » au lieu d’être « minuscule » ? Et surtout, quelle est la nature intrinsèque de l’espace vide, que les physiciens, aujourd’hui encore, continuent à présenter comme « l’un des plus grands mystères » de leur discipline ?
Si l’on veut avoir des chances de le comprendre, il est nécessaire, nous livre Green, de partir d’une donnée essentielle : « la façon dont les objets se déplacent ».
Car les objets en mouvement – comme, par exemple, cette patineuse dont le film nous donne à regarder le gracieux enchaînement de tourbillons et de pirouettes – le sont toujours forcément PAR RAPPORT à quelque chose. Ce « quelque chose », c’est l’espace, lequel pourrait, en somme, être appréhendé comme une sorte de « scène » où se déroulerait le « spectacle » de l’Univers.
Ainsi, pour Isaac NEWTON (XVIIIe siècle), l’espace constitue-t-il « le cadre de tout ce qui se passe dans le cosmos » ; une scène « passive, absolue, éternelle et immuable ». Newton fut le premier penseur à faire de l’espace quelque chose de « réel », « même si on ne peut pas le voir, le sentir, ni le toucher ». Sa vision allait régner en maîtresse durant « plus de deux cent ans »…jusqu’à ce qu’un modeste employé de l’Office Suisse des Brevets, Albert EINSTEIN la fasse vaciller, au tout début du XXe siècle. L’intérêt d’Einstein se porta sur la nature de la lumière, et notamment sur sa vitesse. Pourquoi ? Parce que la « la vitesse de la lumière ne varie pas ». D’une fixité surprenante, elle est invariablement de « un milliard soixante dix neuf millions de kilomètres à l’heure ». A partir de là, Einstein accouche d’une idée de génie : « l’espace et le temps s’ajustent constamment l’un par rapport à l’autre » ; ils sont liés de façon étroite, tout comme ils sont « relatifs ». Temps, espace mais également mouvement forment « une unique entité », à laquelle le physicien donna le nom d’ « ESPACE-TEMPS ».
La GRAVITE, par ailleurs, intriguait également le génie, qui, vite, perçut qu’elle entretenait un rapport (caché) avec l’espace. Ce mystérieux rapport (totalement étranger à la vision de Newton), Einstein, après « dix ans de réflexion », le mit en lumière d’une façon étonnante, qui sidéra le monde : non, la gravité ne se borne pas à « attirer les choses les unes vers les autres » ; elle est la manifestation d’une « déformation de l’espace-temps occasionnée par les objets qui s’y trouvent » !
Et si elle déforme l’espace-temps de la sorte, c’est bien un signe, une preuve que ce dernier « peut s’étirer comme un tissu »
La nature de l’espace apparait, à ce compte-là, comme radicalement autre : affublé d’une « courbure », « flexible », « dynamique », il acquit du coup, de façon totalement inattendue, le statut d’ « acteur majeur sur la scène cosmique ».
Evidemment, c’était là une « rupture » abrupte avec la conception newtonienne.
Cette vision nouvelle se trouva, par la suite, confortée par la prédiction, puis par la mise en évidence des TROUS NOIRS.
Avec sa nature et ses caractéristiques d’objet stellaire massif, le trou noir est un endroit de l’Univers où la gravitation est si monstrueuse, si intense qu’elle parvient à entraîner dans son mouvement l’espace même, en le tordant « comme une étoffe » !
Mais, plus tôt encore, en 1959, Leonard SCHIFF se mit en tête de confirmer la véracité des équations einsteiniennes en utilisant… « un gyroscope » ! Il conçut l’ébauche d’un projet qui se proposait de lancer un appareil de ce type en orbite autour de la Terre. Avec d’autres savants, il perfectionna ensuite ledit projet en imaginant d’expédier dans l’espace « quatre gyroscopes flottant librement attachés à un satellite pointé vers une étoile lointaine ». Le projet définitif, baptisé GRAVITY PROBE B en 1962, demanda, en tout, « presque un demi siècle de travail ». Il faut dire qu’il représentait « un défi technique effrayant ». Le lancement intervient finalement en avril 2004 et, « pendant un an », Gravity Probe B tourna autour de la planète bleue. Il atteignit son objectif, dans la mesure où les équations d’Einstein se trouvèrent enfin pleinement validées par l’expérience. Plus de doute possible dès lors : l’espace, bel et bien « tordu » par la gravité, se révélait bien être une « entité physique » à part entière !
Mais notre connaissance de la nature réelle de l’espace devait progresser encore, cette fois avec les découvertes non moins surprenantes de la MECANIQUE QUANTIQUE qui, elle, régit le monde des particules subatomiques.
Si l’on regarde vers cet infiniment petit, on s’aperçoit en effet que l’espace, loin d’être statique et immuable, est « rempli de champs fluctuants » et, de ce fait, « fourmille d’activité ». A l’échelle subatomique, il est « un lieu chaotique et bouillonnant » où, sans cesse, les particules élémentaires surgissent, s’annihilent et se recréent.
Un physicien nommé CASIMIR a eu, à ce propos, l’idée d’une expérience qui, une fois menée, permit aux scientifiques de s’apercevoir que l’espace pouvait, même, « forcer les objets à se déplacer ».
Mais il existe maintenant, à GENEVE, le GRAND COLLISIONNEUR DE HADRONS du CERN. En accélérant les particules jusqu’à une vitesse proche de celle de la lumière, ce fabuleux appareil a déjà débouché sur la découverte de nouvelles particules, « étranges et exotiques ». Cependant, son but suprême est la traque du BOSON DE HIGGS.
Expliquons-nous : au début des années 1960, un physicien anglais, Peter HIGGS, se posa le problème de l’origine de la masse des particules fondamentales. Le fait que ces dernières aient toutes une masse différente l’intriguait beaucoup. En proie à ce questionnement taraudant, Peter Higgs en arriva, en 1964, à échafauder, « à l’aide des mathématiques », une hypothèse qui voulait que « les particules [soient] immergées dans une sorte d’océan et se déplacent à travers lui ».
Après avoir longuement peaufiné sa théorie (et l’avoir même présentée à Albert Eintein, à Princeton), le physicien anglais réussit à convaincre l’ensemble de ses collègues, à travers le monde entier : il existait bel et bien un océan de particules qui baignait tout, le « CHAMP DE HIGGS ». Ce champ de Higgs « est partout, et a un effet sur le vide le plus vide de l’espace ». Désormais « l’on ne peut plus ignorer les propriétés intrinsèques du vide », et il ne reste plus qu’à faire sortir de ce dernier…une particule de Higgs ! « Si on ne la trouvait pas – commente un spécialiste – ce serait bizarre »… (*)
Ainsi, cela se confirme encore – et plus que jamais : « le plus vide des espaces vides a une action sur la matière ». Au fond, le vide n’existe pas. Ne serait-ce pas une confirmation de l’adage « la nature a horreur du vide » ?
Mais, pour compléter encore notre vision du (soi-disant) vide, il faut revenir au BIG BANG.
Le Big bang, c’est l’instant zéro, cet instant-clé au cours duquel « l’Univers fait exploser l’espace en une violente EXPANSION ».
L’expansion, voilà une donnée fondamentale de notre monde.
Normalement – nous disent les savants – cette expansion « aurait dû se ralentir ». Pourquoi ? A cause de la force de gravité, qui lui est une force résolument antagoniste.
Or, la gravité, elle aussi, est monstrueusement puissante…inversera-t-elle la tendance jusqu’à provoquer un « BIG CRUNCH » qui contractera l’ensemble de l’Univers ? On serait tout à fait en droit de se le demander.
C’est dans le but de le savoir – et donc, d’en avoir le cœur net – que le physicien américain Saul PERLMUTER a décidé d’entreprendre des mesures dans les supernovae.
Les supernovae sont des étoiles à l’agonie, que leur explosion a rendues très lumineuses. Pour les sonder, Saul Perlmuter a mis à contribution « les plus grands télescopes du monde ». Et le verdict a fini par tomber, causant une surprise énorme : l’espace – qui « ne veut pas être comprimé » - ne manifeste « aucun ralentissement » dans son expansion !
Cela va même encore plus loin : au lieu de décélérer, l’expansion de l’Univers, de l’espace s’accélère !
Cela indique qu’ « il existe quelque chose qui emplit l’espace et neutralise l’action de la gravité ». Comme il faut trouver un nom à ce fort mystérieux « quelque chose », on le baptise L’ENERGIE NOIRE.
L’énergie noire, c’est environ 70 % du contenu de notre Univers. Son poids coïncide avec celui de l’espace vide. Et « on ne sait absolument pas comment expliquer » sa présence !
Autre sujet d’étonnement : Einstein, « il y a quatre-vingt ans », l’avait prédite ! Toutefois, arrêté par la croyance qu’il conservait en un « univers statique », il s’était empressé de modifier ses équations en leur adjoignant un « antigravité » sous l’espèce d’une CONSTANTE COSMOLOGIQUE.
Plus tard, Edwin HUBBLE ayant découvert l’expansion de l’Univers, la constante d’Einstein apparut, aux yeux des savants, inutile. Et voici que les découvertes de Saul Permuter la remettent en selle !
Pourtant, on ignore encore si la force de l’énergie noire est constante. Dans l’état actuel de nos connaissances, nous en sommes donc réduits à proposer deux scénarios d’évolution possible de notre Univers : dans le premier scénario, celui-ci, avec le temps, ne pourra devenir que « froid, noir et désolé » ; dans le second, on verra l’énergie noire devenir si forte que tout (y compris les atomes) se trouvera dilaté, et « disloqué » par elle ; l’espace, bien évidemment, volera en éclats.
Quoi qu’il en soit de notre futur lointain et de ces hypothèses, les physiciens tendent de plus en plus à penser que « l’énergie noire pourrait être l’énergie même de l’espace vide » (ou encore ENERGIE DU VIDE).
L’étude de la structure du cosmos pourrait d’autre part nous réserver des surprises encore plus inimaginables.
Tenez-vous bien, accrochez-vous : « tout, dans notre Univers, même l’espace lui-même, pourrait être en fait une sorte d’HOLOGRAMME » !
Eh oui, il y aurait deux plans de réalité : l’un, tridimensionnel (celui que nous connaissons, le nôtre), l’autre bidimensionnel, et le premier procéderait du second.
Nous devons cette étrange idée à des données fournies par les trous noirs (notamment par les équations qui les décrivent). On a en effet constaté, à la faveur de ces données, que, dans le cas où un objet disparait dans l’un de ces monstres gravitationnels, il trouve néanmoins le moyen de « survivre » en son entier, à l’état D’INFORMATION BIDIMENSIONNELLE STOCKEE SUR LA SURFACE EXTERIEURE DU TROU NOIR et peut donc, en théorie, parfaitement être « reconstitué ». Formulé autrement, cela veut dire que « tout, dans l’Univers, pourrait n’être qu’une projection d’informations stockées sur une fine membrane située aux confins de l’espace » !
Notre monde tridimensionnel pourrait dans ces conditions, fort bien n’être qu’une ILLUSION, cependant que la vraie réalité, de nature bidimensionnelle, se trouverait, elle, à la surface de cette sorte de « ballon gonflable et gonflé » qu’est notre Univers et ne ferait que se projeter (hologramme) à l’intérieur de celui-ci
Mamma mia…mais dans quoi on est ?
Non seulement dans notre Univers mais sans doute aussi dans quelque chose de bien plus vaste !
P. Laranco
(*) La découverte de l'existence du boson de Higgs avec une certitude de 99,9999 % a été annoncée par l'Organisation Européenne pour la Recherche Nucléaire (CERN) le 04 juillet 2012 .