Des chrysanthèmes au cimetière, sur les tombes, à la Toussaint, c'est en France.
Ailleurs, le chrysanthème, symbole d'éternité, de joie, fleurit au jardin.
S’il se vend environ 25 millions de chrysanthèmes chaque année en France, 95 % de ces plantes, finissent leur vie au cimetière, sur les tombes, et peu de gens imaginent les récupérer une fois la floraison terminée pour les planter chez-eux.
Mais qu’en est-il dans le monde ? Que symbolise cette plante à la floraison prolifique ?
Au premier anniversaire de l’Armistice de la Première Guerre mondiale, le 11 novembre 1919, le gouvernement, sous la présidence de la République de Raymond Poincaré , ordonne le fleurissement de toutes les tombes de France.
Si la production de végétaux d’ornement dans notre pays était déjà bien réelle, les horticulteurs et pépiniéristes ne produisaient guère d’autres fleurs que les chrysanthèmes à cette saison très tardive.
Ainsi, la seule fleur qui pouvait répondre aux exigences gouvernementales, facile à produire et abondante, fut le chrysanthème, jusque là cultivé comme plante vivace dans les jardins.
En quelques années, les chrysanthèmes se sont imposés comme LA fleur des cimetières et les jardiniers, autant que les paysagistes ont progressivement abandonné la plantation du chrysanthème comme fleur d’ornement de jardin, comme plante vivace à massif.
De Pékin à Séoul et jusqu’en Russie, le chrysanthème symbolise l’éternité, la gaieté, le plaisir, peut-être précisément parce que , dans toutes ces contrées , la nature un peu triste et grise en fin d’automne s’illumine de cette floraison colorée.
La particularité du chrysanthème est effectivement d’être une plante dite de jours courts : le déclenchement de la production des boutons à fleurs ne se fait pas lorsque la durée du jour s’allonge, comme la majorité des fleurs, mais au contraire lorsque la durée d’éclairement journalier se réduit. Ce phénomène relativement rare a donc fortement marqué les esprits et la fleur, jaune à l’état sauvage, est depuis 2500 ans sélectionnée et cultivée en Asie pour cette particularité. Jusqu’à 3000 variétés différentes y ont été produites.
Au Japon, où il fut introduit au VIIIe siècle après J.C., le chrysanthème est immédiatement devenu la fleur emblème de la Famille Royale puisqu’on lui attribuait la capacité de rendre la vie plus belle, plus longue. Si cette croyance a globalement disparu, il n’empêche que la plante continue à être très cultivée avec une certaine vénération. La « fleur de la perfection » des Chinois s’offre et se met aussi en bouquet.
Le premier essai d’introduction en Europe fut fait en Hollande en 1689 par un marchand, mais les plantes n’ont vécu que peu de temps. Le botaniste suédois Linnaeus (Linné) tenta aussi l’introduction en 1753 et donna son nom à cette plante, en combinant les mots grecs chrystos (Or) et anthemon (fleur). Mais c’est en 1789, qu’un marchand marseillais, Pierre Blancard, fit la troisième et fructueuse tentative et introduisit au Jardin des Plantes des boutures de 3 types de chrysanthèmes dont une suivra jusqu’en Angleterre la même année. Rapidement des productions commencèrent dans les années suivantes.
De nombreuses variétés et obtentions furent ramenées de Chine et du Japon en Angleterre, dans la première moitié du XIXe siècle, qui permirent d’élargir toute la production en Europe.
Les chrysanthèmes furent donc introduits en Europe occidentale avec le même regard que les Asiatiques et cette fleur de la gaieté a fait les délices des créateurs de fleurs au XIXe siècle, d’abord par bouturage puis, progressivement après 1830 par semis ce qui fit exploser rapidement le nombre de variétés produites.
C’est, par excellence, la fleur qui fut offerte aux invités de marque et aux grands de ce monde.
En automne, beaucoup d’expositions de chrysanthèmes furent et sont encore réalisées au Japon, en Chine, et dans les jardins anglais et allemands notamment.
Aux Pays-Bas, comme dans certaines contrées contrées des États-Unis, les chrysanthèmes symboles de bonheur entrent dans la composition des bouquets de mariage et dans le fleurissement des tables et des hôtels.
Le chrysanthème et l’exception française de "fleur symbole des cimetières"
La France fait donc véritablement exception et tous les producteurs vous disent bien que les Français n'en veulent que pour mettre au cimetière. C'est devenue la coutume depuis un siècle et la plupart des gens s'y tiennent, refusant l’idée même de tenter l’expérience au jardin, malgré qu’il s’agisse de la plante fleurie la plus vendue en France.
La « Fleur d’Or » des siècles passés est devenue, par la « faute » de Poincaré, une fleur à l’image funeste.
La valeur médicinale du chrysanthème (les Chinois utilisent les racines bouillies pour soigner les maux de tête) ou son intérêt alimentaire (les asiatiques mangent les pétales en salade), n’ont guère de succès chez nous.
Pourtant, les mentalités changent, fort heureusement. Ainsi, le conservatoire National du Chrysanthème, créé en 1990 à Saint-Jean-de-Braye (Loiret), doit, parmi ses objectifs, revaloriser le chrysanthème sous toutes ses formes et pour toutes les occasions.
À Angers, le Service des Espaces Verts utilise les chrysanthèmes en abondance pour fleurir la plupart des jardins publics de l’agglomération et du jardin des plantes. Un spectacle de couleur et de gaieté bienvenu à l’entrée de l’hiver.
Alors, soyez de ceux qui oseront récupérer les potées achetées pour le cimetière, car comme le dit un proverbe chinois, “Si vous voulez être heureux pour une vie, cultivez des Chrysanthèmes"
Source : Nature et animaux.