Avouons-le. C'est un peu à reculons que nous nous rendîmes aux Folies Bergère afin de découvrir ce spectacle musical compilant dix ans de tubes yéyés, craignant d'assister à un pot pourri gentillet et pas très inspiré à la Roger Louret (Les années twist, zazous...). Oh surprise, nonobstant l'absence regrettable de musique live, nous sommes ressortis le sourire aux lèvres et plutôt conquis par la prestation d'une troupe talentueuse et dynamique au service d'un livret frais et amusant.
Afin d'évoquer cette époque, le vent de liberté qui se mit alors à souffler chez les adolescents et la naissance d'un marketing ciblant ces nouveaux consommateurs, Pascal Forneri a eu l'intelligente idée de croiser l'histoire vraie de la célèbre émission de radio, de sa déclinaison papier , et celle, totalement fictive, d'un groupe de jeunes en plein questionnement amoureux et existentiel, les deux nous étant contées avec légèreté, humour, distance, et malice par l'"idole", clone approximatif et réjouissant de Claude François, également personnage clé du spectacle. Sur scène, pas d'imitation de Johnny, Sylvie, ou France, les chansons servent le propos des protagonistes, alternant avec des dialogues concis et enlevés signés Agnès Boury et Stéphane Laporte.
Une douzaine d'artistes nous fait donc revivre avec entrain les sixties, sous la direction de Stéphane Jarny, metteur en espace (difficile de parler d'une véritable mise en scène) et chorégraphe qui règle un show fluide et parfaitement rythmé. Soulignons la qualité du jeu de chacun, à commencer par Vincent Heden, franchement impayable en idole caractério-mégalo-égocentrée aux tenues improbables. Les voix sont excellentes, justes et puissantes. Les numéros dansés manquent pour leur part un peu d'ampleur et relèvent de l'anecdotique (dommage) bien que parfaitement réalisés.
Un bémol. Le groupe Lagardère, qui installe dans son nouveau théâtre sa première production (sous l'enseigne "L.U.L.E."), a joué la prudence. Peut-être un peu trop, compte tenu des tarifs affichés. Car si rien ne fait cheap dans ce qui nous est donné à voir, il manque toutefois deux ou trois éléments essentiels au spectacle pour qu'il se hisse au rang des grands divertissements. Nous l'évoquions en introduction, un orchestre live, bien sûr, une scénographie un peu plus riche ensuite (remercions Stéphane Jarny d'avoir su occuper le vide du plateau...), et une demi-douzaine de danseuses supplémentaires pour grossir un ensemble en l'état minimaliste. Ainsi, "Salut les Copains" pourait passer du stade de "spectacle musical" à celui de "comédie musicale" comme on l'entend à Broadway. Il en a le potentiel.
Il faudrait cependant faire preuve d'une mauvaise foi certaine pour ne pas reconnaître l'efficacité de cette sympathique entreprise.
Alors pourquoi pas.
Jusqu'au 31 décembre.