Ce livre est d'une grande douceur, il ne cesse de nous caresser et de nous bercer tranquillement, au fil des lectures, au rythme cadencé du transsibérien, ou en nous faisant glisser à fleur d'eau sur la Seine, la Moldau, le lac Baïkal,ou d'autres fleuves ou bords de mer baignant des temps de vacances et de rêveries.
Cette eau tranquille ou tourmentée semble guider le cheminement intérieur de la narratrice qui doucement se prépare à changer d'âge de vie, d'attente.
En quelques pages, l'héroïne nous raconte son voyage en Sibérie, comme une quête vers ce qu'elle a perdu. Son amour, l'enfant qu'elle n'a pas fait, sa quête d'idéal politique aujourd'hui disparue aussi.
Elle rencontre des personnages et des paysages furtifs qui viennent nourrir ses rêves et l'amènent peu à peu à retourner à la case départ en comprenant que le temps ne se rattrape pas.
La mélancolie omniprésente de ces pages souvent somptueuses est mise régulièrement en miroir avec les souvenirs défaillant d'une vieille femme, Clémence, devenue amie intime au cours de visites de lectures entre voisines.
Ce dernier récit est une histoire bouleversante : celle d'une femme âgée en train de perdre la mémoire, qui trouve la force de faire de sa mort un rendez-vous d'amour avec un être qu'elle a perdu à 18 ans. Un suicide comme un dernier élan vital.
Cet acte, la narratrice comprend qu'elles l'ont préparé ensemble, au cours de leurs séances de lectures.
Magnifique.
*Une très belle critique de Georges Semprun sur BibliObs,
*"écriture pure, limpide et pleine de charme. *Encore une fois, Michèle Lesbre a su me combler au-delà de tous les mots !" nous dit Clarabel,
*Cathe, elle, n'a pas vraiment aimé : "Je dois dire que je n'ai pas complètement adhéré à ce charme, mais je pense que c'est vraiment une question de moment et ce livre trouvera certainement son public grâce au bouche à oreille et peut-être aux blogs..."
*Philippe, de Loisirs les bons plans non plus :" Je n'avais pas le bon ticket de la nostalgie; j'ai sauté en marche."
*Gambadou n'a pas raccroché le wagon non plus : "Je n'ai pas ressenti une émotion qui m'aurait sans doute permis de me souvenir longtemps de ce livre."
*Pour amanda , " Il y a une grâce et une luminosité sereine dans ce roman que l’on referme en frissonnant."sur critiques libres,
*Sylire a surtout aimé la complicité entre la narratrice et la vieille dame au canapé rouge , "C'est une belle histoire d'amitié entre deux femmes de générations différentes, la plus âgée aidant l'autre sans le savoir à accepter de vieillir sereinement"
*C'est drôle, mais j'ai un peu pensé à Moustafette en lisant ce livre et voilà qu'elle écrit dans sa belle critique : "Ce livre fut, pour la contemplative et la nostalgique que je suis, un vrai bonheur. "
*Pour Sophie, :"ce fut un bien petit livre pour un long trajet en train"
*Papillon écrit très justement à mon sens : "Une histoire qui semble dire que tout est toujours possible et que même la mort est source de vie"
*Lily nous offre un beau et long billet pour nous écrire combien elle a aimé ce livre : "Voyage initiatique, essentiel, qui court sous la plume magnifique de Michèle Lesbre."
*Chimère en parle aussi et a aimé,
*Bellesahi a également été très sensible à cette lecture : "J'ai aimé ce livre à tel point que je l'ai relu dans la foulée de peur d'en avoir fait une lecture trop rapide : je ne voulais pas le gâcher !"
Pour Alexandra Morardet, « Le canapé rouge » est un roman d’une beauté flamboyante qui consume.", sur le site Arte.TV.
pour ma part, j'ai beaucoup aimé ce livre et j'ai été très attentive à la présence de l'eau dans ses pages :
Le fleuve, les fleuves :
"Elle se perdait si souvent dans toutes ces vies agitées, ne savait plus laquelle avait traversé une rivière à la nage pour être à l'heure à un rendez-vous, anecdote dont elle raffolait." ..."Le plus difficile, alors, est d'avoir à se lever sans nulle part où aller, mais j'ignorais qu'à mon retour cette épreuve me serait épargnée et que je me rendrais plusieurs jours de suite à un rendez-vous sur un quai de Seine" ..."Je me souviens qu'au retour, assise sur un qui de Seine, les images de ce voyage se mêlaient aux reflets du pâle soleil d'automne, et j'avais l'impression de les voir flotter à la surface de l'eau. Je croyais apercevoir la silhouette d'Igor que le courant emportait, comme nous emportait le train." ... "Et puis nous sommes arrivées près de la seine au moment où le jour se levait et j'ai eu un bonheur immense qui me rendait Paul, c'était comme s'il était là à s'émerveiller avec moi, je pouvais même entendre sa voix, j'en avais les larmes aux yeux." ... "Clémence me montrait l'endroit du Quai Bourbon où avait été prise la photographie avec Paul, en 1943... sur ce quai, je savais qu'une plaque commémorative citait une phrase écrite par Camille Claudel dans une lettre à Rodin, il y a toujours quelque chose d'absent qui me tourmente."
... "Le fleuve trapu et lent me mettait dans une légère torpeur, je m'étais allongée sur le lit et j'avais somnolé jusqu'à la nuit..."
..."j'étais restée à l'écart, je suivais la sombre course du fleuve qui se fondait dans la nuit et dans la douce effervescence de mon ivresse."
... "Comme chaque fois, nous commencerions par la traversée de la Moldau."
... "Et la traversée à la nage de la Moldau, Clémence, que vous aimez tellement, ce rendez-vous avec son amoureux auquel elle veut absolument être à l'heure ? non, c'est moi , avait elle dit, avec le même aplomb qu'une fois précédente, c'est moi qui nageait vers lui, pour le rejoindre...pas un accident cette chute dans la Seine, c'était un rendez-vous, un rendez-vous que, d'une certaine façon, elle me donnait à moi aussi."
..." j'étais seule sur le pont, le ciel le ciel et les toits se fondaient dans un gris doux et nacré. Après deux jours de pluie, la Seine charriait une eau boueuse qui venait mordre les berges. Je n'osais pas descendre jusqu'à elles, j'avais seulement marché le long du parapet en fixant le torrent boueux qui s'engouffrait sous le pont."
... "Clémence s'était plusieurs fois approprié la traversée à la nage de la Moldau par Milena, ce fol élan vers un homme aimé la ravissait. J'imaginais qu'elle avait eu cet élan, j'en était même certaine."
... "Le lendemain, assise sur les premières marches de l'escalier qui menaient à la berge, je contemplais la surface moirée de l'eau. Une lumière dorée de fin d'été se prenait dans le feuillage des arbres encore verts, et scintillait dans les reflets qui changeaient sans cesse au gré du courant."
... "Pendant de longues heures, je n'avais pas quitté mon poste d'observation, je voyais dans cette eau qui courait sous mes yeux les images désordonnées des derniers mois, depuis ma rencontre avec Clémence, et puis, celles de ce voyage dont je n'étais pas tout à fait revenue."
... "j'étais descendue sur la berge, m'étais assise tout près de l'eau, et j'avais lu, comme si elle avait pu m'entendre, comme si elle s'était trouvée à mes côté,"
Le lac Baïkal
..."Puis je pensais à Gyl, aux cerfs-volants qu'il devait brandir comme les banderoles autrefois et que j'imaginais ressembler à de grands oiseaux mélancoliques au-dessus du lac." ..."Le lac est un grand œil tranquille... Dès mon arrivée dans le village, je l'avais cherché, il était au pied des dernières maisons, solennel et limpide, d'une limpidité extraordinaire. L'usine de cellulose qui le menaçait avait cessé de fonctionner. Des petites barques en bois griffaient la surface de l'eau, d'autres étaient alignées le long des berges, des oiseaux venaient s'y poser. Les forêts de pin le cernaient, quelques vaguelettes ondulaient à peine, mais je savais qu'il y avait parfois des tempêtes, des vagues de plusieurs mètres de hauteur que les premiers gels figeaient pendant des mois. Mystérieux lac, vénéré comme un dieu." ... "Plus tard, à la tombée de la nuit, j'étais retournée au bord du lac. un ciel violet se reflétait dans l'eau." ... "J'avais noté que j'aurai préféré découvrir le lac en hiver, lorsqu'il se fige et que les camions le traverse". ... "Je contemplais les vagues qu'il soulevait sur le lac, j'entendais les enfants crier parce que les cerfs-volants leur échappaient et s'écrasaient à la surface de l'eau. Ils couraient pour les rattraper , je les voyais s'élancer et nager jusqu'aux épaves multicolores, tenter de les ramener sur la rive."
Et maintenant pour le plaisir, une petite vidéo que j'intitule brouillon de Garonne pour montage improvisé sur In the lake, d'Emilie Simon.
et en bonus, une superbe interview de l'auteur, qui nous parle de l'écriture, sur auteurs TV
Michèle Lesbre
par auteursTV