Avant Première

Par Ninelililabo


Le Robin des Riches Résumé : Marc Tourneuil est un ancien de Goldman Sachs. Il a rejoint la Banque Phœnix, 1ère Banque Européenne dont le siège est à Paris. Il conseille le Président. Mais à la suite d’un accident, il est propulsé à la tête de Phœnix où il prend la direction malgré l’hostilité des conseillers en place et l’avidité d’un actionnaire majoritaire américain qui s’appuie sur des Hedge funds. Le pouvoir, l’argent, les opérations des concurrents agressifs, sont autant de défis ou de tentations auxquels le Président Tourneuil va être confronté à son tour. Critique : Costa Gavras n’en est pas à son coup d’essai. Au-delà de « Z » en 1969, de « L' Aveu » (1971) ou de « Missing » (Palme d'Or à Cannes en 1982), dont le ton politique était donné, il a toujours marqué un intérêt pour s’inquiéter et raconter certaines évolutions de la société : « La Main droite du diable » (1987) sur l’Amérique armée, « Mad City » avec Dustin Hoffman (1996) où il dénonce la chasse au scoop et – déjà – la médiatisation à outrance ou enfin l’intriguant « Le Couperet » (2005) qui racontait comment un cadre sup’ viré – l’inquiétant José Garcia – pouvait se transformer en redoutable tueur pour que « justice sociale » soit faite. Alors un film de plus sur la crise et la mal de la finance, notamment après «L’Empire des Rastelli » , « La Vie sans principe» de Johnnie To ou « Une Vie Meilleure » de Cédric Khan  ? Avec « Le Capital », Costa adapte le roman éponyme de Stéphane Osmont, pamphlet brutal sur le milieu financier, le capitalisme et ses dérives, pourtant publié avant le choc et la crise de 2007/2008. Le style est sans doute moins acerbe et la manière plus didactique que dans le livre, mais il est certain qu’après le Gangster, voici venu le temps du « Bankster », devenue un inquiétant personnage de cinéma. Un bad guy, personnage principal, qui nous raconte son histoire, ses hésitations, ses révoltes étouffées et ses pulsions de meurtres. Marc Tourneuil – interprété par un Gad Elmaleh à contre-emploi – en est la nouvelle incarnation, avec un flegme et une distance proche de celle de l’incroyable Jeremy Irons dans l’excellent « Margin Call » de J.C. Chandor. Ici, le pedigree est affiché : une créature de chez Goldman Sachs. Polytechnique mène à tout et partout. Paris – New-York – Londres – Tokyo, un peu comme dans la complainte du businessman, la Planète est le terrain de jeu d’un Gad implacable et sans illusion. Il regarde de haut l’Univers. Il parle en anglais à son fils qui, lui, ne le regarde plus, il contraint sa femme à porter des robes Saint Laurent à 22.000 € parce qu’il faut se faire respecter et parle face caméra, en nous fixant bien au fond des yeux pour nous dire toute la simplicité de ce jeu de massacre. Robin des Bois moderne, « il prends aux pauvres pour donner aux riches ». Et sait faire face à des adversaires coriaces. Mention spéciale pour l’impeccable Gabriel Byrne qui incarne la brutalité de l’actionnaire anglo-saxon manipulant pour mieux tuer son semblable. On suit pendant deux heures les attaques boursières, les licenciements masqués, les menaces à peine voilée, et comme le dit Maud Baron, collaboratrice désabusée de Tourneuil – l’excellente Céline Sallette – les démocraties bafouées. Ici, la conclusion de Costa Gavras est sans appel, paraphrasant Karl Mark «  Le Capital est semblable aux vampires. Il ne s’anime qu’en suçant le travail vivant »… Charlie