Combien de fois ai-je traversé cette place, ce parking où je n’ai que rarement garé ma voiture (je viens plus volontiers à Juvisy par le RER) ? J’y ai photographié des arbres. Je l’ai parcourue avant d’aller au magasin Simply, à la crêperie, la pizzeria, à la Mission locale, au parc de l’Hôtel de Ville, au théâtre Jean Dasté, à la librairie (hier Les feuillantines, aujourd’hui Les vraies richesses), à l’espace Camille Lambert, à la salle Jean Lurçat… Ce soir-là, j’y suis venu pour voir Page Blanche, un spectacle de la Compagnie Lucamoros, un spectacle qui, à la nuit tombante, transforme la place, modifie notre rapport à cet espace. Des voitures passent derrière l’écran fait de 9 panneaux blancs. Mais ce sont les images qui vont s’imposer. Images, musiques et textes (dits ou écrits). Une sorte de visite de l’histoire de l’art contemporain, pas celui qui exhibe ses dollars, mais celui qui revendique son humanité, l’art brut peut-être, l’art qui peut aller dans la rue et que les passants reconnaîtront comme leur étant destiné. L’art réalisé en direct, puis laissant place à une autre page blanche, et encore à une autre, le temps de faire parler le bois, la pierre, la toile, la peinture, la lumière et les ombres. Six plasticiens chanteurs font ainsi déferler sur un lieu en centre-ville des formes et des mots, d’amour, de révolte, de désir qui, dans ma mémoire, y resteront marqués désormais.