Dans les luttes entre les autorités chinoises et les manifestants tibétains l’inégalité des forces saute aux yeux ; non moindre est le déséquilibre des moyens pour diffuser des informations sur ce qui a réellement lieu au Tibet. Que peuvent quelques dissidents contre un puissant appareil d’Etat ? Comment ne pas céder au nombre ?
Le dalaï-lama appelle à la non violence. La Chine n’hésite pas à mobiliser police et armée. La justice sans la force est impuissante, la force sans la justice est tyrannique : ces mots de Pascal sont d’actualité. Pour fuir ces deux écueils, les uns cherchent à se justifier aux yeux de l’opinion internationale, et les autres à augmenter leurs forces.
On dira que nous prenons trop vite parti pour les uns contre les autres. Mais qu’est-ce qu’un régime qui réprime les manifestations pacifiques ? Qui interdit les voix discordantes de se faire entendre ? Il est impossible de faire confiance à des autorités qui entendent réduire au silence une minorité. Qui est sûr de son bon droit ne craint pas l’épreuve de la contestation.
On nous explique que si la Chine n’accorde pas l’indépendance au Tibet, c’est pour ne pas créer un précédent qui servirait d’exemple à d’autres régions et menacerait l’unité du pays. Raison d’Etat donc, mais qui conduit à nier la volonté d’une partie des citoyens, c’est-à-dire à rompre l’unité politique.
C’est en effet la volonté de chacun de former avec tous un corps politique qui constitue, selon Rousseau, ce pacte social par lequel un peuple est un peuple. La répression que subit le peuple tibétain pour ses protestations est donc le signe qu’il ne fait plus partie du peuple chinois, mais constitue réellement un Etat dans l’Etat.
Dans ces conditions la paix civile est impossible.