En juillet dernier, ma soeur chérie Lili m’a offert un livre dont j’aimerais vous parler aujourd’hui. Il s’agit d’Allah n’est pas obligé (2000) de l’auteur ivoirien Ahmadou Kourouma. Ce livre, qui a gagné plusieurs prix de littérature, est plus qu’un simple roman. Il s’agit d’un «documentaire romancé» qui traite de problématiques telles que :
- Les conflits armés, les guerres tribales et les différences culturelles
- La situation des enfants soldats en Afrique noire
- L’importance de la sorcellerie (magie noire) dans la culture africaine
- La situation des femmes et des enfants
Ce livre raconte l’histoire de Birahima, un enfant ivoirien de 10 ans, et d’une partie de sa vie d’enfants soldats. Ce livre est le récit original d’un enfant de la rue, de sa lutte pour survivre malgré le chaos de la guerre civile au Libéria, en Guinée et en Sierra Léone.
Honnêtement, j’ai trouvé ce livre difficile à lire. Ce livre est dur, il rend compte de faits qui arrivent tous les jours mais j’ai trouvé ça vraiment difficile de me rendre compte à quel point il y a des gens qui n’ont vraiment pas de chance dans la vie. Le pire dans tout ça c’est que ces personnes font preuve de tellement de maturité en acceptant leur sort. Le titre de ce livre vient du fait que selon Birahima :
Allah n’est pas obligé d’être juste dans toutes ces choses ici-bas.
Ce livre m’a particulièrement marqué parce que c’est l’histoire d’un garçon qui est né d’un père inconnu et d’une mère handicapée «sa mère marchait sur ses fesses» qui devait vivre avec une jambe en décomposition. Pour vous donner une idée de son «milieu naturel»:
Il y avait dans la case toutes les puanteurs. Le pet, la merde, le pipi, l’infection de l’ulcère, l’âcre de la fumée. Et les odeurs du guérisseur Balla. Mais moi je ne les sentais pas, ça ne me faisait pas vomir. Toutes les odeurs de ma maman et de Balla avaient du bon pour moi. J’en avais l’habitude. C’est dans ces odeurs que j’ai mieux mangé, mieux dormi. C’est ce qu’on appelle le milieu naturel dans lequel chaque espèce vit ; la case de maman avec ses
odeurs a été mon milieu naturel.
Quand il parle de son père :
Grand-mère a dit que mon père est mort malgré tout le bien qu’il faisait sur la terre parce que personne ne connaîtra jamais les lois d’Allah et que le Tout-Puissant du ciel s’en fout, il fait ce qu’il veut, il n’est pas obligé de faire toujours juste tout ce qu’il décide de réaliser sur terre ici-bas. Ma maman est morte pour la raison que Allah l’a voulu. Le croyant musulman ne peut rien dire ou reprocher à Allah, a dit l’imam.
Ce livre m’a particulièrement marqué non pas parce qu’il dénonce la cruauté des enfants soldats, ni même les conditions dans lesquelles ils vivent. C’est le fait que malgré cela, j’ai eu l’impression que Birahima ne s’est jamais plaint de son enfance difficile, ni de ses conditions de vie difficile. Au contraire, il semble qu’il est hanté par une seule chose : le fait qu’il est persuadé qu’il est maudit parce qu’il a accusé sa mère d’être une sorcière. C’est un peu comme s’il acceptait son sort et pensais qu’il était le seul responsable. Les croyances ont décidément la peau très dure…
Compléments de lecture
Revue du livre Allah n’est pas obligé
Les conflits politiques, linguistiques et culturels dans Allah n’est pas obligé d’Ahmadou Kourouma
Les enfants et les femmes dans Allah n’est pas obligé d’Ahmadou Kourouma
La mémoire discursive dans Allah n’est pas obligé ou la poétique de l’explication du »blablabla » de Birahima