La principale difficulté de l’Homme est de faire la part des choses et de distinguer le fantasme de la réalité. Si la jeunesse a le grand avantage de l’insouciance, la maturité elle, a le souci du conformisme. Alors que certains entretiennent l’illusion, ils laissent au plus grand nombre le passage obligé de la remise en question.
Chacun sait qu’une personnalité ne s’impose pas dès la naissance. Elle se construit tout au long de la vie au gré des rencontres, des échanges et des nombreuses expériences auxquelles nous sommes toutes et tous confrontés. On ne se construit jamais seul mais toujours au contact des autres. Il appartient ensuite à la grande loterie de la vie de produire ses bons ou ses mauvais effets.
Sur ce sujet là, je dois bien avouer que j’ai été particulièrement verni. Cette perfide loterie qui gratifie quelques rares privilégiés d’un destin hors du commun en permettant tantôt d’entrer dans l’Histoire ou de se distinguer par une largesse concédée, celle gredine a choisi de m’attribuer celle du Muppet Show ! Je ne sais pas d’ailleurs si je dois la haïr ou l’en remercier…
Oui mes chers lecteurs, je connais tous les personnages ! Ils sont, à un moment ou un autre, venus croiser ou contrarier mon existence ! Kermit, Peggy, Fozzie ou Scooter, bons ou méchants, tristes ou déprimés, écoutants ou écoutés, je les ai tous croisés. Certains manquent encore à l’appel, mais il me reste encore du temps pour remplir le petit théâtre de ma vie.
Cette vie, cette expérience, c’est parfois amusant, parfois troublant, parfois gênant, mais c’est surtout étrangement épuisant. Même en pâle remake, vivre une vie Muppet Show, ce n’est pas toujours voir celle-ci avec des yeux d’enfants. La réalité vous impose de l’observer avec des yeux d’adulte. Et vous savez quoi ? Cette vie d’adulte je l’envie et je l’attends !
A mon âge désormais bien avancé… J’ai parfois du mal à situer ma place dans la jungle qui m’entoure. Par nature observateur, généreux et attentif, je cherche encore la liane qui me permettra de m’extraire des affres que certains m’imposent.
Sans doute trop poli, éduqué, torturé ou diplomate, je concède une faiblesse à faire comprendre la réalité de mes pensées. On ne cesse jamais de grandir et je compte bien perfectionner le bon déroulé de ma méthode. J’avoue hésiter encore entre désarroi et profonde lassitude même s’il ne faut jamais douter dans la capacité de l’Homme de progresser.
Cet espoir, ce secret espoir enfoui au plus profond de mon esprit, m’évitera sans doute d’accepter les gestes et postures condescendantes à mon égard. Cela me prouvera, je n’en doute pas, que je ne suis plus un enfant mais bel et bien un homme adulte qui en attends tout autant des agissements des marionnettes, bonnes ou mauvaises, qui viennent croiser le destin de celle que je suis moi-même.
A la manière de Félix Le Dantec : « L’homme est une marionnette consciente qui a l’illusion de la liberté ».