Le credo du grand Claudio Arrau était : « L’interprète doit donner son sang à l’œuvre qu’il interprète ». De fait, il y avait un aspect presque sacrificiel dans l’expression d’Arrau au piano. Une posture de concentration fiévreuse mais qui ne bridait jamais la virtuosité de son jeu.
Je me rappelle d’une fameuse interprétation des Variations Diabelli de Beethoven par le pianiste chilien. Le visage était concentré à l’extrême, en même temps déchiré et extatique, le corps ployé sur les mains, la sueur du front baignant les touches du piano. L’auditeur-spectateur assistait à un rituel sauvage dont il ressortait presque aussi épuisé que l’interprète, mais avec le sentiment profond d’avoir assisté à un événement rare.
On l’entend ici, lors du concert des 80 ans du Maestro enregistré à New York en 1983 dans des œuvres de Beethoven, Debussy, Liszt et Chopin qu’il abordait avec un égal bonheur.
Paul Kristof
ARRAU, Claudio. The 80th birthday recital (Euroarts, 2011)