Mais l'arrière-plan est peut être plus inquiétant encore. Ben, le dit autiste, est accroc aux jeux vidéos, à un jeu en réseau, pour être précis, dans lequel il se sublime, devient un autre lui-même, preux chevalier venant à la rescousse de damoiselles en détresses.
Difficile de ne pas se demander au bout d'un moment si cet "autisme"-là ne se combine pas avec la maladie originelle de Ben, d'autant qu'il est - lorsqu'il n'écume pas les planètes virtuelles - plongé dans le cocon de la musique de son lecteur mp3. Ben d'ailleurs échappe, ou tente d'échapper à la réalité, en mélangeant en permanence réalité et monde virtuel.
Or, le monde réel et le monde virtuel se rejoignent et se mélangent davantage encore quand le harcèlement dont Ben est victime prend un tour plus tragique qu'à l'ordinaire. MAis là aussi, c'est un mélange à double sens.
D'un côté, Ben va chercher à entrer en contact avec sa partenaire de jeu virtuel. De l'autre, les coups moraux et physiques dont il est victime prennent la forme de l'hyper-technologie : téléphones portables braqués comme autant de caméras sur lui, mails incessants, tandis que Ben cherche du secours au travers, lui aussi, de son téléphone portable.
Alors s'il peut sembler que c'est en réconciliant, à sa manière qu'on vous laisse découvrir, le réel et le virtuel, que Ben cherche une issue, ce film souligne en contrepoint la déshumanisation du monde par le truchement de la technologie. Où est, dans ces conditions, l'autisme? Celui qui frappe au hasard un jeune garçon ou celui, plus profond, dérangeant encore, qui s'empare de toute une jeunesse qui se déconnecte à force de rester "connectée"? Nic Balthazar, en se servant de l'un comme miroir (thème fort de ce film) de l'autre, face à des adultes totalement dépassés, pose une question particulièrement dérangeante qui donne à son film toute sa force.