C'est la question que murmure le Pot aux Roses d'Atlantico et à laquelle l'horticulteur Serge Federbusch a entrepris de répondre cette semaine.
Votre pot est rangé ICI.
1 - François Hollande a-t-il déjà démissionné ?
Victoire ! avait crié un peu tôt Moi-Président à l’occasion d’un sommet européen où l’Allemagne devait se ranger à ses vues sur la supervision bancaire en zone euro. Le Nouvel Obs mettait immédiatement ce succès en «une» accompagné d’une photographie de son idole tout sourire.
Hélas, la révélation progressive du contenu de l’accord laissa place à une triste réalité : l’Allemagne n’avait presque rien cédé mais obtenu tout ce qu’elle voulait. Le contrôle de ses banques régionales reste de facto dévolu à la Bundesbank et l’aide apportée aux établissement financiers en difficulté ne sera pas versée avant au plus tôt la fin 2013, le temps que les élections teutoniques soient passées. Les banques espagnoles devront attendre et avec elles leurs créanciers français. Quant au thème des Eurobonds, qui saisit notre chef suprême comme une maladie périodique, il est enterré aussi vite qu’il était réapparu.
Le rêve d’une Allemagne payant les dettes des clientèles électorales de la gauche française est de plus en plus évanescent. La réalité est prosaïque : d’ici aux élections allemandes, Merkel fera ce qu’elle jugera nécessaire à son succès et, après cela, c’est Hollande dont le mandat sera le plus avancé et la situation politique la plus fragile. Notre président normal se gargarisait d’une position de force liée au calendrier politique. Il capitule déjà sur tous les sujets.
En réalité, le «pouvoir» (il va bientôt falloir utiliser ce mot avec des guillemets) socialiste, une fois passée la mise un oeuvre de son projet cauteleux, en porte-à-faux avec l’ampleur de la crise et truffé de mauvaises idées, doit se contenter de croiser les doigts en espérant que la reprise s’amorce en Europe en 2013. Il s’abandonne aux événements, fait adopter une règle d’or en espérant ne pas avoir à l’appliquer, prie pour que les créanciers du Trésor public ne deviennent pas plus regardants. Jusqu’à aujourd’hui, loin d’être son ennemie, la finance a été sa seule amie, se contentant de faibles taux d’intérêt sur la dette française. Mais pour combien de temps encore ? Qu’il est dur d’être à ce point dépendant de son adversaire proclamé ...
Adepte de la méthode Coué, Hollande en a profité pour se rassurer en proclamant que «le pire de la crise européenne est passé». Hélas, il n’en est rien. L’une des principales difficultés auxquelles se heurte l’Euroland est que le taux de change de l’euro se cale sur les performances de l’économie la plus solide, celle de l’Allemagne. Pis encore, plus les marchés anticipent que la discipline germanique s’imposera aux autres pays, plus ils valorisent l’euro, rendant la reprise des économies du Sud quasiment impossible. L’édifice de l‘union monétaire est fondé sur cette dissymétrie et menace ruine.
C’est pourtant sur cette construction bancale qu’Hollande fait reposer son avenir et, malheureusement, le nôtre. Renonçant à toute action autonome faute de réformer vraiment la France, il a déjà démissionné de toute ambition.
2 - Chérie, j’ai rétréci le choc de compétitivité !
Autre illustration de ce renoncement, le fameux «choc de compétitivité», qui s’est d’abord transformé en simple «trajectoire de compétitivité » dans le vocabulaire d’Ayrault puis traduit par un enterrement de troisième classe pour le futur rapport Gallois qui «n’engage pas le président, ni le gouvernement». Il faut dire que Gallois est suspecté de vouloir réduire drastiquement les dépenses publiques, crime suprême en Socialie. Les rapports administratifs ensevelis, la République en est coutumière. Mais les enterrements avant publication, c’est une première. De tergiversations face aux choix difficiles en abdications devant les décisions courageuses, à quand une démission pour de vrai ?
3 - Accouchement douloureux pour présidence de proximité
S’emparant désormais, comme son prédécesseur, des faits divers qui émeuvent l’opinion, le président de proximité a demandé qu’une enquête soit faite sur l’accouchement sur l’A20 où une malheureuse mère n’est pas arrivée à temps pour mettre au monde son enfant à l’hôpital de Brive. François Hollande a évoqué cette affaire, samedi 20 octobre, alors qu’il s’exprimait devant le congrès de la mutualité française à Nice : « Le drame qui s’est produit hier où une femme a perdu l’enfant qu’elle portait nous appelle une nouvelle fois, encore, à ne rien accepter en matière de désert médical. »
4 - La Banque Publique de l’Inutile
La nomination d’un second couteau à la direction de la BPI laisse le champ libre à Jouyet, président et chef réel du nouvel établissement. La création du fameux bras armé de la ré-industrialisation à la sauce «hollandaise» se traduit donc par la simple absorption d’Oséo, d’Ubifrance et du Fonds stratégique d’investissement par la Caisse des Dépôts et Consignations. L’Inspection des finances y détiendra tous les postes-clés, preuve supplémentaire que le régime « hollandais » s’apparente à la restauration du pouvoir sans partage des grands corps de l’Etat. Tout ça pour ça ?
Comme il faut bien donner des compensations aux élus locaux, second pilier du nouveau régime, les Régions auront siège au conseil d’administration. Conscient du danger que sa méga-banque se transforme en hôpital régional de campagne pour entreprises malades de l’industrie française, Jouyet, nouveau tsar de toutes les réindustrialisations, a d’emblée écarté l’idée d’un renflouement de Gandrange, choisissant mal son exemple et contraignant son compère de 35 ans, Hollande, à le démentir à moitié. Son sentiment de culpabilité d’ancien ministre de Sarkozy, lui ferait-il inconsciemment torpiller son nouveau chef ?
Ennuis avec les Pigeons des Start-Up, problèmes avec les jeunes Moineaux des PME, difficultés avec les Canards boiteux : la réalité est durement volatile pour notre gouvernement.
5 - La presse « hollandaise » contre le reste du monde
Puisqu’il faut trouver de l’argent pour aider la presse française, exsangue pour cause de médiocrité éditoriale mais qui rend tant de services à la gauche, et que les caisses sont vides, pourquoi ne pas inventer un nouvel impôt sur chaque renvoi, par les moteurs de recherche, à des contenus disponibles sur Internet ? Cela revient à taxer celui qui aménage le chemin qui mène à votre domicile et doit bien se financer quelque part. La société d’autoroute va payer le péage en quelque sorte. Mais qu’importe, puisqu’il faut trouver des sous.
Google réagit-il en menaçant de déréférencer les sites français ? Après tout, ces journaux n’ont qu’à trouver leur propre algorithme et l’entretenir eux-mêmes, peut plaider l’Américain. Son monopole ne tient qu’à son excellence. C’est ce qu’on appelle un « marché contestable » en science économique. Aussitôt, c’est l’union sacrée des médias et des politiciens, le tollé des subventionnés.
Comme avec Arnault et les autres «riches» qui décident d’aller vers des cieux fiscaux moins sombres, comme pour le message de bienvenue de Cameron aux surtaxés qui s’exilent, comme face à un Mittal qui n’a cure des roulements de mécanique de Montebourg, le gouvernement se heurte à la dure loi de l’économie ouverte. Les petits arrangements deviennent difficiles, les faiseurs d’opinion salariés sont irritables et les oligarques nerveux.
6 - Le mousse du pédalo
Grâce à Mélenchon, nous savions qui pilote le pédalo «France». Grâce à une photographie en « une » du Parisien Magazine et un pull marinier, nous savons désormais que Montebourg est mousse sur cette embarcation.
7 - Todd en folie
Il serait malséant de passer brutalement d’un anti-sarkozysme névrotique à une critique cinglante de Hollande. Conscient que «le changement c’est consternant», Emmanuel Todd a trouvé la parade intellectuelle qui le rassure : «Moi-président» sera l’instrument plus ou moins volontaire de la rupture avec l’ordre mondialisateur honni. Echouant à le faire accepter aux Français, il en sera le fossoyeur, prédit Todd avec la clarté qu’il trouve dans sa boule de cristal. C’est la théorie du « hollandisme révolutionnaire ».
Ce raisonnement reviendrait, transposé dans l’Histoire, à prétendre que Louis XVI fut le plus grand des Sans-culottes. La politique fait perdre la tête.