Les Etats-Unis renoncent ŕ réduire leurs dépenses de Défense.
Les moyens budgétaires mis ŕ la disposition du Pentagone ne seront pas amputés de plusieurs centaines de milliards de dollars au cours des cinq ou dix prochaines années : contre toute attente, et de maničre soudaine, le Président/candidat Obama a décidé l’abandon de ce projet qui aurait dű devenir réalité dčs le 2 janvier.
Il s’agit d’une volte-face spectaculaire, d’un véritable coup de tonnerre, qui n’a pas encore été décodé tant il est soudain. Le chef de la Maison Blanche s’est empressé d’affirmer que les mesures d’économies qui étaient envisagées résultaient d’une initiative du Congrčs, et non pas de lui-męme. Ce qui n’explique pas pour autant ce retournement de situation que rien ne laissait prévoir. Aussi les commentaires vont-ils bon train, sans que des éléments de compréhension adéquats soient disponibles.
On hésite ŕ affirmer que cette marche arričre constitue une grande victoire pour le complexe militaro-industriel américain. C’est le cas, bien sűr, mais la réalité, de toute évidence, est beaucoup plus complexe. Et cela męme en tenant compte des efforts de persuasion, volontiers alarmistes, déployés par l’Aerospace Industries Association. Laquelle, plus que le risque de perte d’hégémonie militaire des Etats-Unis, agitait le chiffon rouge des suppressions massives d’emplois et de pertes de savoir-faire. Quoi qu’il en soit, Obama a été on ne peut plus clair : Ťit will not happenť. Quelques mots qui lui ont certainement permis de récupérer les faveurs d’un grand nombre d’électeurs, ŕ un moment oů il est loin d’ętre assuré d’ętre réélu.
Cela étant dit, nombre de commentateurs de tous bords vont beaucoup trop vite en besogne, y compris outre-Atlantique. Ils ne tiennent pas suffisamment compte des travaux discrets mais de grande ampleur menés pour maintenir le statut de super puissance des Etats-Unis. Ici et lŕ, on se gausse des problčmes insurmontables rencontrés par le F-35 Joint Strike Fighter, trčs en retard, beaucoup plus coűteux que prévu, mais on parle moins de grandes avancées technologiques en cours de développement. A commencer par les travaux considérables de la Darpa, Defense Advanced Research Projects Agency. Laquelle a été créée, on l’oublie trop souvent, ŕ la fin des années cinquante, peu aprčs le lancement du premier satellite soviétique Spoutnik, pour rétablir durablement la supériorité technologique américaine.
Peu connue, se livrant ŕ des travaux protégés par un solide Ťsecret Défenseť, la Darpa s’attache notamment ŕ parfaire ce qu’il est convenu d’appeler l’air dominance, un objectif sensiblement plus vaste que l’air superiority. Par bribes et morceaux, ŕ condition de procéder ŕ quelques recoupements et de faire bon usage de fuites certainement intentionnelles, on entrevoit, par exemple, l’étude en cours de concept d’appareils capables de voler ŕ Mach 5 (notre illustration). Ils annoncent sans plus attendre le successeur des F-22 et F-35 qui devrait entrer en service dans 30 ans environ.
Au męme moment, il est ŕ nouveau question du NGB, Next Generation Bomber, successeur des B-1, B-2 et B-52H, qu’on croyait tombé dans les oubliettes budgétaires du Pentagone. C’est un exemple parfait de Ťblack programť, ultra secret, auquel plusieurs milliards de dollars auraient déjŕ été attribués, des sommes soigneusement dissimulées de tous, élus inclus, mais bien réelles. L’administration Obama, pour autant qu’on puisse en juger, a soigneusement préservé ces travaux tout au long de la mandature qui se termine.
Reste ŕ percer un mystčre d’un tout autre genre : comment se fait-il que les Etats-Unis, comme le prouve notamment la Darpa, mčne brillamment la danse mais soit aussi incapables de gérer convenablement un programme comme celui du F-35 ? Les technologies de pointe se maîtrisent-elles plus facilement que le management industriel ? Une réponse crédible de Lockheed Martin tarde singuličrement ŕ venir. Washington n’a décidément pas fini de nous étonner.
Pierre Sparaco - AeroMorning