On vous arrête tout de suite. Non, Raphael ce n’est pas que « Caravane », cet « incident industriel » qui s’est vendu à des millions d’exemplaires. Raphael a eu une vie avant cet album, avant ce single, avant le tapage médiatique et radiophonique dont il a finalement plus était victime qu’auteur. Deux albums, l’un rock, l’autre plus pop, mais avec une marque et une empreinte. Celle qui rappelle les vieux chanteurs français. Les Bashung, Gainsbourg et autres anciennes gloires. Hôtel de l’Univers et La Réalité ont été ignorés. Aussitôt sortis, on les avait déjà oubliés. Bien sûr, en 2003 il y a eu « Sur la Route » en duo avec Jean-Louis Aubert. Mais après ?
Raphael est tout sauf un artiste calibré pour les radios…enfin, ça c’était avant. Caravane est arrivé, et là, la donne a changé. Le titre passe en boucle, on le compare à Benabar, Delerm, Saez. Il est partout, sur toutes les radios, les lèvres, les salles de concerts affichent salle comble, il remplie des Zéniths… et Caravane l’album, devient l’un des plus gros succès de l’année 2007 : 1,8 millions d’album.
Dans l’esprit général, Raphael est né en 2007, et à chaque nouvel album, les fans attendent un nouveau « Ne partons pas fâchés » voire un autre « Dans 150 ans« . Première cassure avec Je sais que la Terre est Plate, empreinte de sonorités tziganes. 300 000 albums.
Pacific 231 marque un retour au source, au rock blues, son premier amour. On retrouve des sons très bashungiens, dans l’esprit de son premier album Hotel de l’Univers (deux chansons avaient d’ailleurs été écrites pour Alain Bashung, avant que le chanteur décède). L’étrange « Terminal 2B » (moitié chanté, moitié parlé) surprend. Un format quasi-impossible à passer en radio. On est loin, très loin de Caravane. Pour beaucoup, cet album est considéré comme son meilleur album. Le plus abouti, même s’il est né dans la douleur, selon les mots de Raphael. 100 000 d’albums vendus.
Entre Pacific 231 et Super Welter, beaucoup de changements ont eu lieu dans la vie du chanteur. Un train de vie assaini, un enfant qui grandi (il a quatre ans aujourd’hui), un passage au théâtre, la rencontre avec la boxe. La boxe, son nouvel amour qui a donné l’idée du titre de ce sixième album. Un album étrange à la première écoute. Déroutant tant il ne ressemble pas à la musique à laquelle le chanteur nous a habitué. Cassure à répétition, changement brusque dans les rythmes, timbre de voix changeant (parfois nasillard, parfois très grave et suave), surtout on note l’apparition de sonorité beaucoup éléctro. Avant de travailler sur cet album, Raphael a hésité sur l’orientation qu’il devait prendre « Quand j’ai commencé à écrire, je voulais faire un disque folk, comme un truc dans une cabane au fond des bois avec juste une guitare où on entendrait le chant des oiseaux et le sabot des chevaux ». Finalement, ce sera un album terriblement urbain, fruit du travail en collaboration avec Benjamin Lebeau (l’une des têtes pensantes de The Shoes).
C’est à la maison que les deux compère enregistrent. Dans un studio bricolé chez lui, la nuit avec une bouteille de champagne, ils s’amusent derrière tous les instruments : Benjamin joue avec ses synthés, Raphael avec son piano et sa guitare. Le résultat est étrange, mais finalement pas si déplaisant. Il faut plusieurs écoutes pour que l’oreille s’habitue au nouveau Raphael. Le choc de la première fois passée, on trouve un certain charme à ses chansons bizarres et déstabilisantes. On découvre des pépites comme « Mariachi Blues » (sur les anciennes gloires du rock’n'roll), « Asphalte » et « Collision » (sur la filature dans le métro), ou encore « Quand j’aimais vraiment » et ses airs beatlesiens… Raphael s’est fait plaisir avec cet album, il a fait ce qu’il voulait, sans subir la pression de qui que ce soit. C’est son album à lui. Son labo expérimental. Et parce qu’il l’aime ainsi, il a décidé de ne pas le défendre sur scène.