Ce livre pourrait s’appeler « Un secret ». C’est l’histoire (Paris, années 2000) d’une mère qui, un peu par hasard, appelle sa fille « Salomé ». Un prénom qui lui semble confusément familier. C’est l’histoire d’une petite fille qui fait toutes les nuits des cauchemars.
C’est l’histoire d’une autre fillette (Lituanie, 1943) qui n’a pas survécu à la guerre. C’est l’histoire du ghetto de Kovno, des juifs d’Europe de l’Est, c’est l’histoire d’une famille, celle de Colombe Schneck, entre drames et reconstruction.
Mais que s’est-il vraiment passé dans le ghetto de Kovno en 1943? A-t-on le droit d’écrire sur la Shoah quand on aime l’amour et les sandales dorées ? Pourquoi toute cette culpabilité ?
Un jour, Colombe a décidé qu’il lui fallait savoir, qu’il lui fallait comprendre. Patiente mais résolue, elle a commencé son enquête. Elle a interrogé son oncle (l’écrivain Pierre Pachet), elle a fouillé les vieux cartons, elle a rencontré dans le monde entier ses cousins, en Israël, à New-York, en Lituanie. Elle a trouvé des photos, elle a entendu parler de l’ « aktion », et de l’ignoble « sélectionneur » du ghetto, celui qui mangeait son sandwich en envoyant les juifs à la mort. Et Salomé a eu sa « réparation », son tombeau de papier…
Tout au long de la lecture de ce roman, une petite voix tente vainement de crier au non sens en se demandant « mais où veut-elle en venir en nous racontant tout ça ? », car au final on est complètement happé par ce récit.
D’une simplicité et d’une authenticité à fleur de peau, Colombe Schneck livre simplement son parcours pour rendre justice aux « absents » de sa famille. Tout part de la demande de sa mère d’appeler sa fille Salomé en souvenir de sa cousine disparue durant la Seconde Guerre Mondiale. Cette cousine, Colombe ignorait son existence. Comme dans de nombreuses familles, et encore plus dans celles au passé aussi lourd, les secrets, les non-dits font partis du quotidien. Jusqu’au jour où quelqu’un veut en savoir plus et se décide à briser le silence.
La Réparation nous livre le périple et les réflexions de cette mère/fille/petite-fille/femme/écrivain concernant son arbre généalogique et l’impact que la Guerre a eu sur ce-dernier.
Cette réparation permet à la fois de donner un semblant de vie à ses disparues, mais aussi de rendre justice à ses grandes-tantes qui ont choisies la vie, tandis que le poids du secret à peser trop lourd sur les épaules de sa mère et de sa grand-mère.
A la fois grave et beau, ce roman biographique est émouvant sans pour autant tomber dans la sensiblerie excessive. On la suit dans sa quête, dans ses rencontres. On encaisse chaque révélation, on comprend ses doutes et son envie, parfois, de garder ce secret de famille secret. On avance pas à pas à ses côtés et si son histoire ne nous touche pas de manière visible, c’est en profondeur que le travail se fait. En refermant La Réparation, une envie de savoir d’où l’on vient, et ce que le passé de notre famille dissimule, s’insinue petit à petit en nous.
Ce livre entre dans le cadre des Challenges 1% Rentrée Littéraire 2012 de Hérisson et Mimipinson , La Plume au Féminin lancé par Opaline et Histoire lancé par Falaise Lynnaenne.