Il n’y a dans cette phrase introductive aucune ironie : l’artiste allemand, patron-créateur de la maison de disques Kompakt (Gui Boratto ou The Field font partie de ses signatures), sur laquelle il sort aujourd’hui son second album studio, huit ans après le premier, Touch, mais toujours avec quelques mixes sortis entre temps. À noter que Immer, en 2002, restera le disque qui l’a consacré en tant que DJ, et qui dès lors lui aura apporter cette renommée que beaucoup lui envient.
Laissons le directeur et DJ de côté, et revenons-en au producteur, qui est donc assez discret, vous l’aurez compris. Discret, certes, mais pas dénué de talent pour s’auto-promouvoir : ainsi, Mantasy est sorti en plusieurs versions, CD, vinyle ou deluxe. Et c’est cette dernière qui étonne : en réalité, deux versions deluxe existent, chacune avec un foulard en soie (?) reprenant le visuel de la pochette, qui s’y prête étonnamment à merveille, chacune des deux versions incluant un foulard à l’illustration et à la taille différentes. L’une de ces deux versions est déjà « sold out » ! Alors, fan ou dandy, dépêchez-vous !
Mantasy propose autrement de la musique, heureusement diront les mélomanes. Dix titres, tous écoutables sur le site de Kompakt sur un splendide lecteur vinyle qui s‘ouvre dans une nouvelle fenêtre et qui en reproduit même les craquellements !
« Sully » ouvre l’album doucement, presque trop tant d’autres artistes auraient probablement placé ce titre en dernière position. Pourtant, ce choix me parait très justifié car il nous donne l’impression d’être dans une salle d’attente où tout est fait pour nous laisser languir avant le rendez-vous tant attendu… « Lamusetwa » n’est pas là pour nous remettre d’aplomb, il y a d’abord une fausse impression d’alanguissement, mais les beats arrivent très rapidement ; l’ambiance est comme frissonnante, idem : j’aurais vu ce titre plutôt en dernière partie d’album. Pourtant, Michael Mayer s’en moque, de nos idées préconçues.
« Wrong lap » avance enfin comme nous étions en droit de l’espérer. Même si, arrivés là, nous nous rendons bien compte que nous n’avons rien ni à espérer ni à demander : Mayer propose et impose en même temps, de la même façon qu’il sort des albums si et quand il le souhaite.
« Mantasy » focalise forcément notre attention tout particulièrement. En plus d’être le morceau éponyme, c’est d’emblée le titre qui montre les ambitions jusqu’ici à moitié caché de l’Allemand, qui est obligé de finir par sortir et montrer son vrai visage. Et l’on commence à se rendre compte que ses choix artistiques sont indiscutables. Le morceau tourne, comme les trois précédents, tout seul, sans besoin d’accompagnement avant ou après. Comme si ce second album était une véritable succession de morceaux chacun sortis d’un univers différent, sans pour autant jamais avoir de quoi penser à une compilation pour autant. Un album qui n’en cherche pas la définition.
Avec « Roses », on entend les premières voix… mais elles ne sont présentes qu’en surface. Après la flore, « Baumhaus » commence au contraire sur des chants d’oiseaux. Désormais je le sais, Michael Mayer est un grand créateur qui ne cherche pas à impressionner, juste à laisser des impressions, en laissant libre court à son imagination. Voilà pourquoi, même en dirigeant son propre label, ses disques sont difficiles à trouver si ce n’est en import.
Bref, je refais mon retard.
« Rudi was a punk » ne s’écarte pas de la lancée des morceaux précédents, et s’enfoncent encore plus dans le lit creuser par la rivière de Mayer : « Voigt kampff test » lui succède alors avec un brin d’intrigue, presque de façon alarmante. « Neue furche » ne nous approche pas de la fin du disque bien que ce soit le neuvième titre : au contraire, le rythme s’accélère véritablement, la frénésie n’étant pas loin du tout. Étonnant choix que celui de Mayer dans l’ordre des morceaux, un étonnement qui m’enchante tant les autres artistes ont tendance à suivre une certaine linéarité non réfléchie mais induite comme si un album de musique était le stricte équivalent d’une œuvre littéraire ou filmique avec un début, une fin, et des péripéties entre les deux. Ici, tout est pêle-mêle, comme dans une œuvre picturale où l’œil du spectateur ira toujours là où lui-même le décidera malgré les indications voulus par l’artiste.
Ainsi, nous n’oublions pas qu’un DJ, s’il crée des ambiances, a le choix de faire ce qu’il lui plaît, le but n’étant autre que de faire comprendre la moment passé face à l’œuvre global.
L’album de Michael Mayer n’est pas le fruit d’un DJ ou d’un producteur, mais des deux à la fois : d’où ce mélange album-compilation (ou mix) perceptible.
Mon seul bémol vient en toute fin d’album, avec « Good times », dont la seule erreur ou carrément faute de goût à mon avis est d’être accompagné de la voix de Jeppe Kjellberg, dont la partie vocale n’apporte non seulement rien mais enlève au final tous les moments passés avec Mantasy. Même le morceau lui-même aurait gagner à n’être qu’un instrumental.
Il ne s’agit que d’un sentiment personnel, un avis forgé sur quelques écoutes seulement du disque, dont je découvre par la même occasion l’artiste. Cependant, tout comme le commentaire d’un fan ayant écouté des dizaines ou centaines de fois une œuvre, mon oreille logiquement objective a le mérite de donner l’envie d’en prolonger l’écoute. Et, j’espère, que vous ayez vous l’envie d’aller y poser votre oreille également.
(in heepro.wordpress.com, le 22/10/2012)
Michael Mayer est tellement connu que je commence seulement à découvrir sa musique…
Il n’y a dans cette phrase introductive aucune ironie : l’artiste allemand, patron-créateur de la maison de disques Kompakt (Gui Boratto ou The Field font partie de ses signatures), sur laquelle il sort aujourd’hui son second album studio, huit ans après le premier, Touch, mais toujours avec quelques mixes sortis entre temps. À noter que Immer, en 2002, restera le disque qui l’a consacré en tant que DJ, et qui dès lors lui aura apporter cette renommée que beaucoup lui envient.
Laissons le directeur et DJ de côté, et revenons-en au producteur, qui est donc assez discret, vous l’aurez compris. Discret, certes, mais pas dénué de talent pour s’auto-promouvoir : ainsi, Mantasy est sorti en plusieurs versions, CD, vinyle ou deluxe. Et c’est cette dernière qui étonne : en réalité, deux versions deluxe existent, chacune avec un foulard en soie (?) reprenant le visuel de la pochette, qui s’y prête étonnamment à merveille, chacune des deux versions incluant un foulard à l’illustration et à la taille différentes. L’une de ces deux versions est déjà « sold out » ! Alors, fan ou dandy, dépêchez-vous !
Mantasy propose autrement de la musique, heureusement diront les mélomanes. Dix titres, tous écoutables sur le site de Kompakt sur un splendide lecteur vinyle qui s‘ouvre dans une nouvelle fenêtre et qui en reproduit même les craquellements !
« Sully » ouvre l’album doucement, presque trop tant d’autres artistes auraient probablement placé ce titre en dernière position. Pourtant, ce choix me parait très justifié car il nous donne l’impression d’être dans une salle d’attente où tout est fait pour nous laisser languir avant le rendez-vous tant attendu… « Lamusetwa » n’est pas là pour nous remettre d’aplomb, il y a d’abord une fausse impression d’alanguissement, mais les beats arrivent très rapidement ; l’ambiance est comme frissonnante, idem : j’aurais vu ce titre plutôt en dernière partie d’album. Pourtant, Michael Mayer s’en moque, de nos idées préconçues.
« Wrong lap » avance enfin comme nous étions en droit de l’espérer. Même si, arrivés là, nous nous rendons bien compte que nous n’avons rien ni à espérer ni à demander : Mayer propose et impose en même temps, de la même façon qu’il sort des albums si et quand il le souhaite.
« Mantasy » focalise forcément notre attention tout particulièrement. En plus d’être le morceau éponyme, c’est d’emblée le titre qui montre les ambitions jusqu’ici à moitié caché de l’Allemand, qui est obligé de finir par sortir et montrer son vrai visage. Et l’on commence à se rendre compte que ses choix artistiques sont indiscutables. Le morceau tourne, comme les trois précédents, tout seul, sans besoin d’accompagnement avant ou après. Comme si ce second album était une véritable succession de morceaux chacun sortis d’un univers différent, sans pour autant jamais avoir de quoi penser à une compilation pour autant. Un album qui n’en cherche pas la définition.
Avec « Roses », on entend les premières voix… mais elles ne sont présentes qu’en surface. Après la flore, « Baumhaus » commence au contraire sur des chants d’oiseaux. Désormais je le sais, Michael Mayer est un grand créateur qui ne cherche pas à impressionner, juste à laisser des impressions, en laissant libre court à son imagination. Voilà pourquoi, même en dirigeant son propre label, ses disques sont difficiles à trouver si ce n’est en import.
Bref, je refais mon retard.
« Rudi was a punk » ne s’écarte pas de la lancée des morceaux précédents, et s’enfoncent encore plus dans le lit creuser par la rivière de Mayer : « Voigt kampff test » lui succède alors avec un brin d’intrigue, presque de façon alarmante. « Neue furche » ne nous approche pas de la fin du disque bien que ce soit le neuvième titre : au contraire, le rythme s’accélère véritablement, la frénésie n’étant pas loin du tout. Étonnant choix que celui de Mayer dans l’ordre des morceaux, un étonnement qui m’enchante tant les autres artistes ont tendance à suivre une certaine linéarité non réfléchie mais induite comme si un album de musique était le stricte équivalent d’une œuvre littéraire ou filmique avec un début, une fin, et des péripéties entre les deux. Ici, tout est pêle-mêle, comme dans une œuvre picturale où l’œil du spectateur ira toujours là où lui-même le décidera malgré les indications voulus par l’artiste.
Ainsi, nous n’oublions pas qu’un DJ, s’il crée des ambiances, a le choix de faire ce qu’il lui plaît, le but n’étant autre que de faire comprendre la moment passé face à l’œuvre global.
L’album de Michael Mayer n’est pas le fruit d’un DJ ou d’un producteur, mais des deux à la fois : d’où ce mélange album-compilation (ou mix) perceptible.
Mon seul bémol vient en toute fin d’album, avec « Good times », dont la seule erreur ou carrément faute de goût à mon avis est d’être accompagné de la voix de Jeppe Kjellberg, dont la partie vocale n’apporte non seulement rien mais enlève au final tous les moments passés avec Mantasy. Même le morceau lui-même aurait gagner à n’être qu’un instrumental.
Il ne s’agit que d’un sentiment personnel, un avis forgé sur quelques écoutes seulement du disque, dont je découvre par la même occasion l’artiste. Cependant, tout comme le commentaire d’un fan ayant écouté des dizaines ou centaines de fois une œuvre, mon oreille logiquement objective a le mérite de donner l’envie d’en prolonger l’écoute. Et, j’espère, que vous ayez vous l’envie d’aller y poser votre oreille également.