Pour être impatients, inquiets ou les deux, ils le sont ces Français ! Ils ont raison, ils ont des motifs. La Grande crise nous étouffe. A écouter ou lire les commentaires médiatiques, la messe est pourtant presque dite depuis cet été. Le budget 2013 serait intenable, le cap économique serait flou.
Le Hollandisme gouvernemental débute pourtant à peine.
Une certaine presse peine à comprendre qu'elle se ridiculise. Le JDD fait semblant de rejouer l'élection présidentielle, dimanche dernier. L'Express multiplie les unes sur Hollande et les femmes; le Point croit savoir que préserver les riches et sabrer l'Etat-providence est une nécessité historique. Le Figaro ne s'est pas remis de sa conversion ultra-sarkozyste.
Mais qu'importe...
Mardi, le projet de loi de finances 2013 débute enfin son examen. Le gouvernement bataille un peu avec ses propres troupes. Il n'aime pas la taxation des oeuvres d'art au-delà de 50.000 euros de valeur via l'ISF ou l'écrêtement des taxes bénéficiant au CNC. Mais ce projet contient les premières mesures essentielles - ne boudons pas notre plaisir - d'un rééquilibrage de la fiscalité aux détriments des plus riches: durcissement du quotient familial (pour 2,5% des foyers), nouvelle tranche d'impôt sur le revenu (45%), taxation exceptionnelle des 1.500 foyers les plus aisés (210 millions d'euros), taxation des dividendes supérieurs à 1000 euros (2 milliards d'euros!).
A l'UMP, on voudrait faire croire que la récession, c'est la faute à Hollande... On se pince pour le croire. L'argument, peu développé, est que les hausses d'impôts ont provoqué un attentisme qui a gelé les investissements et les embauches depuis le 17 juin au soir : « Quand nous avons laissé le pouvoir aux socialistes la France était en croissance, certes faible, mais en croissance » a déclaré François Fillon en campagne interne dans le Haut-Rhin. Avec une hausse continue du chômage depuis l'automne 2010 et un choc fiscal de 40 milliards d'euros prévus dans le programme du candidat Sarkozy, certains ont décidément la mémoire courte...
La taxe Google, elle, fait l'unanimité, sauf chez le premier concerné. La pieuvre, installée en Irelande avec un joli système d'évasion fiscale en place, menace de boycotter la presse française. C'est une chance ! La ministre de l'économie numérique s'inquiète de la trop faible régulation des géants du Net en Europe. Elle promet une loi sur la protection de nos vies privées 2.0.
L'euro n'est évidemment pas sauvé. Avant son conseil européen des 18 et 19 octobre, François Hollande s'est voulu très relativement optimiste: « le pire est passé ». Jeudi, les chefs d'Etats et de gouvernements ont adopté un plan d'action, maigre compromis mais plan d'action tout de même pour créer une supervision bancaire plus unifiée au sein de la zone euro. Comme souvent, les discussions ont trop duré. Mais au 1er janvier prochain, dans quelques mois, chaque Etat membre devra disposer d'un cadre législatif adéquat pour la permettre un peu plus tard dans l'année.
Rien n'est encore gagné. La chancelière allemande a voulu créer son choc. Chercherait-elle un quelconque rejet germanophobe qu'elle ne s'y prendrait pas autrement. Mercredi, devant ses députés, elle a suggéré, plus clairement que jamais et juste avant un conseil européen, la mise sous tutelle des budgets nationaux... Mme Merkel aimerait que l'Union Européenne puisse rejeter le budget d'un pays membre. Rien que ça... Et pourquoi pas voter nos budgets au Bundestag directement ? Mme Merkel veut-elle l'effondrement final ? Le Comité européen des droits sociaux, un organe du Conseil de l'Europe, vient justement de juger illégales quelques mesures grecques « pour assouplir son marché du travail en réponse aux demandes de réformes formulées par l'Union européenne et le FMI » (dixit le Figaro).
« Nous pensons, et je le dis au nom de l'ensemble du gouvernement allemand, que nous pourrions faire un pas en avant en accordant à l'Europe un véritable droit d'ingérence sur les budgets nationaux » a-t-elle déclaré. Dans son esprit, le commissaire européen aux Affaires économiques pourrait se charger de cette censure supranationale. Même les plus fédéralistes devraient se révolter. Où est passé le Parlement ? D'ailleurs, côté français, la réponse n'a pas tardé: « Le sujet du conseil n'est pas l'union budgétaire, c'est l'union bancaire.» Et boum !
Mercredi, la star, c'est Manuel Valls. Le ministre de l'intérieur agace encore la gauche morale - comme certains la caricature. Ses déclarations sécuritaires jugées « Sarko-compatibles » sur l'ordre républicain. Pourtant, le même ministre assouplit les règles de naturalisation. Fini les QCM culturels que quelques millions de Français dit de souche auraient peine à remplir, ou l'exigence d'un CDI.Valls soutient aussi la création d'un congé parental pour les policiers gays et lesbiens, une belle avancée. Sa collègue des droits des femmes Najat Vallaud-Belkacem lance une programme de sensibilisation antisexiste dans les maternelles.
Le président Hollande officialise enfin une vérité historique et dramatique, le massacre du 17 octobre 1961. Depuis 20 ans déjà, des historiens ont travaillé les archives pour révéler les faits. Il manquait un président de la République pour couper court aux polémiques. Ce n'est pas de la repentance, c'est un constat. Il y eut quand même un Christian Jacob, président du groupe UMP à l'Assemblée pour fustiger la chose.
C'est une curieuse photo. Arnaud Montebourg en marinière française avec un appareil Moulinex français, fait la une du nouveau magazine du Parisien. Sur D8 le matin même, sa compagne devenue chroniqueuse de la chaîne, Audrey Pulvar, a le sourire un peu sincère, mais un peu coincé. Hollande est plus amusé: « je trouve très bien qu'Arnaud Montebourg paie de sa personne et même de ses vêtements ». Plus sérieusement, le ministre du redressement productif avait trois nouvelles propositions pour le Made in France. Deux sont de la cosmétique symbolique (favoriser la création de rayons dédiés au Made in France dans les magasins, promouvoir un label sur les emballages); le troisième est du protectionnisme qui ne dit pas son nom, l'établissement de quotas pour limiter l'importation en Europe de smartphones fabriqués en Chine... Même pour les iPhones ?
Vendredi, syndicats et patronat se sont mis d'accord sur les modalités du futur contrat de génération, l'une des promesses du candidat Hollande.
Malgré ses promesses et à cause d'un journaliste vendredi en marge du Conseil, Hollande ne put résister. Vendredi, la tentation est trop grand, et le voici qui s'exprime sur le non-évènement de la semaine, l'élection du candidat officiel Harlem Désir: « Vous vous souvenez de ce que j'ai dit : 'Moi président de la République, je ne vais pas me comporter en chef de parti... » Mais : « Harlem Désir est premier secrétaire du PS, un vrai premier secrétaire du PS. ».
Et Sarkozy ? Puisque quelques éditocrates intoxiqués le regrettent, il fallait penser à lui.
Peut-on penser que l'affaire Karachi progresse ? Sous Sarkozy, cette enquête a péniblement avancé. Un témoin, déjà connu dans le volet financier de l'instruction sur les motifs de l'attentat à Karachi en mai 2002, a enfin livré un nom majeur, Edouard Balladur. La défense de l'ancien premier ministre l'a immédiatement récusé. Il s'agit de l'ex-épouse de Thierry Gaubert, fidèle conseiller de Nicolas Sarkozy à la mairie de Neuilly puis au ministère de l'intérieur, proche de Jean-François Copé et de Brice Hortefeux.
On se souvient de nombreux articles et révélations par le site Mediapart ou les enquêteurs du Monde sur les curieuses propriétés exotiques dudit bonhomme. Cette fois-ci, Hélène de Yougoslavie, son ex-épouse, balance plus durement encore. Le couple est en plein divorce plutôt violent, ce qui devrait troubler l'enquête. La confession date de juillet mais ne fut révélé que jeudi: « Thierry [Gaubert] avait gardé de l'argent en Suisse sur ce compte et ce coffre pour Nicolas Bazire et aussi pour Edouard Balladur. C'est ce que Thierry m'avait dit à l'époque, qu'il allait chercher en Suisse de l'argent de Bazire et de Balladur ». Et d'ajouter: « Nicolas Bazire et Edouard Balladur ne voulaient pas savoir les modalités pratiques mais simplement récupérer l'argent". "Une partie de l'argent était prévue pour Edouard Balladur. C'est Bazire qui récupérait l'argent de Balladur et était chargé de le lui remettre ».
Vendredi, incroyable suspense. Brice Hortefeux se décide à soutenir Jean-François Copé pour la présidence de l'UMP, avec lequel il partait en vacances dans le yacht de Ziad Takkiedine.
Avec Thierry Gaubert.
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