Une place à prendre, roman de J. K. Rowling

Publié le 20 octobre 2012 par Mpbernet

Vous avez remarqué ?

Je n’étais pas bien présente sur la toile toute la journée d’hier. Car je l’avoue, j’étais plongée dans la lecture du premier roman « pour adultes » de la créatrice d’Harry Potter. Sans aucun a priori, sans en avoir lu aucune critique, ni de la part des journalistes littéraires – dont je sais à présent qu’ils ne lisent pas les livres qu’ils critiquent – ni de celle des lecteurs sur les sites littéraires.

Car la lecture de ce pavé de 680 pages, si elle a un peu de mal à démarrer à cause du foisonnement des personnages, devient urgente à partir de la moitié de l’ouvrage … Une urgence absolue de savoir comment vont s’entremêler, se télescoper, se détruire les habitants de Pagford, riante commune rattachée à la ville moyenne de Yarvil mais qui dispose d’une certaine autonomie à travers son Conseil paroissial, au sein duquel survient une vacance fortuite – « The Casual Vacancy », le titre original du livre – du fait du décès brutal d’un brave type au nom transparent : Barry Fairbrother.

Nous voici donc au cœur d’une querelle entre deux camps : ceux qui souhaitent que Pagford abandonne la tutelle administrative sur la cité HLM des Champs et qu’on ferme la clinique de désintoxication qui y fonctionne tant bien que mal, et ceux qui veulent aider à sauver les paumés, drogués et divers chômeurs qui y habitent.

Parmi les membres du conseil, il y a plusieurs familles : entre autres, le directeur-adjoint du collège, un employé de l’imprimerie locale, le chirurgien cardiaque Sikh et son épouse généraliste, le propriétaire d’une épicerie fine, par ailleurs Président du conseil paroissial et qui souhaite faire élire au poste vacant son fils avocat …. Cet épicier-là  est le salaud absolu : aspect répugnant, stratège malfaisant, tireur de ficelles qui vont lui revenir dans la figure … Et puis il y a l’assistante sociale fraichement débarquée de Londres avec sa fille, et surtout, la jeune fille paumée et agressive  : Krystal. Avec Krystal, sa mère junkie, son petit frère de 3 ans et demi Robbie et sa famille catastrophique, on entre dans le quart-monde, style Zola ou Dickens, ou plus récemment l’affreux roman d’Elizabeth George « Anatomie d’un crime » qui traitait aussi de l’enfance massacrée. Une description plus que réaliste de la grande pauvreté et de la déchéance des quartiers pauvres, à la manière des films de Ken Loach et pire encore.

Car les vrais héros de ce roman noir sont les adolescents, un domaine que J.K. Rowling connaît à la perfection. Tout parent d’enfant de seize ans devrait impérativement lire ce livre, crucifiant. Jamais je n’avais lu avec autant de cynisme, de cruauté et d’humour aussi, comment fonctionne l’esprit de jeunes – de la classe moyenne comme des classes populaires - en opposition frontale avec leurs parents qu’ils sont les premiers à juger puisqu’ils les voient vivre, s’étriper en famille, être injustes, violents, voleurs, irresponsables, minables.

J .K. Rowling a connu la pauvreté et la décrit avec une acuité confondante. Elle a le génie des descriptions d’ambiance qui font mouche. Pour ma part, j’imagine que certains de ses personnages ont une clé, en particulier le monstrueux Howard Mollisson, sa bru Samantha, ou la jeune sauvageonne Krystal. La fin est atroce, les larmes montent aux yeux … l’émotion l’emporte et de toutes façons, il ne pouvait pas y avoir d’autre issue que cette fin-là.

Une place à prendre, roman de J.K. Rowling, traduit de l’Anglais par Pierre Demarty, édité chez Grasset, 680 p. 24€.

P.S. : je trouve la couverture du bouquin affligeante ! Pas vous ?

Merci de nous donner votre avis sur ce livre dont on dit tout, et sûrement n'importe quoi. Notamment qu'il ne s'agit que d'une pure opération commerciale. J'imagine sans peine que l'auteur avait simplement envie de sortir de ce rôle un peu lourd d' "auteur d'Harry Potter", et de montrer au monde qu'elle avait aussi d'autres talents. Tout simplement.
La couverture, quant à elle, est très moche, c'est un fait. Mais c'est sans aucun doute volontaire: une façon d'entretenir le mystère sur le contenu du roman et d'attiser la curiosité...

Merci de ce billet sur "Une place à prendre", roman dont on parle beaucoup, et dont la lecture me tente (par curiosité je l'avoue). Je vais peut-être franchir le pas... Bonne journée à vous !