Mon suprême espoir s’accomplit :
Je meurs ! Silence, ô mes amis !
Apaisez vos cris de chagrin,
C’en est assez, cessez enfin !
Ne soyez pas jaloux de moi,
À qui le diadème échoit.
Dieu même à vos bras me retire,
Je préfère son réconfort,
Bien que vers vous mon cœur m’attire.
Vous m’aimez, mais Dieu plus encor !
Mon âme, suivant son vouloir,
Luit maintenant d’une autre gloire.
Le bien suprême des croyants,
Ce qui fait leur coûteux espoir,
Payé jadis d’un divin sang,
Je l’ai déjà. Siècle, bonsoir !
La grâce de tes ornements
Est pour moi morte maintenant,
Et tes richesses, tes plaisirs,
Tout ce que tu crois élevé,
Ne peuvent plus me ressaisir.
Le chœur des anges, la douce paix,
Les âmes qui m’ont précédé,
En leur pouvoir m’ont tout entier.
Ici je vois combien le temps
À surprendre l’âme s’entend,
Des joies, des voluptés l’emprise.
Je ris quand les hommes s’épuisent
En soucis qui troublent sans trêve
De leurs jours la fuite si brève.
Comme à l’aquilon un vaisseau
Échappe enfin avec bonheur
Et gagne un havre protecteur,
J’ai échappé à tous les maux
Du monde et ses flots déchaînés
Et goûte le calme à mon gré.
Seigneur, ta main sûre me tient !
Lors je suis sans insouciance
Des maux qui troublent les humains.
C’est par toi, c’est par ta puissance,
Que mon pied ne s’égara point
Sur le chemin de l’existence.
J’attends que se renoue enfin
Le durable et ferme lien
Qu’a tranché le Trépas cruel.
Pour pouvoir vraiment célébrer
La foi que tu m’as témoignée
Sur la terre comme au ciel.
Simon DACH (1605-1659), poète allemand.
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