Le Prix Nobel de la Paix pour l'UE : quelle blague !

Publié le 19 octobre 2012 par Copeau @Contrepoints

En attribuant le Prix Nobel de la Paix à l'UE au moment même où l’euro ravive les antagonismes nationaux, les membres du comité ont fait preuve d’un magnifique génie comique.
Par Daniel Hannan, depuis Oxford, Royaume Uni.

Comme pour la plupart des gens, ma réaction à la nouvelle du Prix Nobel de la Paix attribué à l’Union Européenne a été un éclat de rire satisfait. En choisissant ce moment - alors même que l’euro ravive les antagonismes nationaux à un niveau élevé - les membres du comité ont fait preuve d’un magnifique génie comique.

Il y a plus de 40 ans, lorsqu’il apprit que le prix était décerné à Henry Kissinger, Tom Lehrer déclara « la satire est vraiment passée de mode ». Même Lehrer dans ses rêves les plus fous n’avait imaginé le comité choisir un autre candidat qu’Irena Sendler, qui avait risqué plusieurs fois sa vie pour sauver des enfants du Ghetto de Warsaw, en faveur d’Al Gore. Il n'y a rien eu de plus étrange que lorsque Barack Obama a reçu ce prix avant même d’avoir entamé sa présidence (même si ce moment s’est avéré être bizarrement approprié : ses premiers jours d’hopey-changey furent son point fort). Mais ça ? Ça dépasse vraiment toute attente.

J’en ai déjà parlé longuement auparavant. En résumé, l’Union Européenne n’est pas la cause, mais le symptôme d’une paix européenne née de la défaite du fascisme, de la diffusion de la démocratie et de la sécurité grâce à l’alliance de l’OTAN. Son dogme dominant – l’idée que le nationalisme est la cause de la guerre – est faux. Les guerres les plus meurtrières dans l’histoire de l’Europe ont été causées en premier lieu par des différends religieux ainsi que par des différends idéologiques. À travers les années, l'État-Nation s’est révélé être le véritable instrument de la justice et de la démocratie. Une Europe des nations, à leur aise avec dans leurs frontières ethnographique, sera plus calme qu’un patchwork de frontières mal-alignées, de communautés irrédentistes et de minorités mécontentes. Coincer les personnes dans un État unique contre leur volonté est rarement favorable à la démocratie et à la bonne volonté. Cela n’a pas fonctionné pour les Habsbourg, les Ottomans et les Soviétiques. Ces politiques n’ont survécu que lorsqu’il s’agissait d’État policier. Dès l’instant où les peuples le constituant avaient la liberté de choisir, ils optaient pour l’indépendance.

GK Chesterton faisait remarquer que condamner le patriotisme comme source de conflits reviendrait à condamner l’amour comme source de meurtres. En réalité, le patriotisme est ce qui nous fait reconnaitre que nous avons des obligations envers les personnes qui nous entourent ; c’est ce qui nous fait agir avec désintéressement. Parce que nous partageons un sentiment communautaire avec certains de nos concitoyens, nous obéissons aux lois qui nous semblent insensées, nous acceptons les résultats d’élection lorsque nous avons voté pour le parti perdant, nous payons des impôts pour le bien-être d’étrangers. Une tel sentiment communautaire existe en Allemagne ou en Grèce. Mais au sein de l’UE ? Regardez ce que les Allemands disent des Grecs et vice versa. Regardez les troubles en Espagne. Rappelez-vous la façon dont Bruxelles a renversé des Premiers ministres élus en Italie et en Grèce.

Et enfin écoutez la façon dont les Eurocrates tournent le dos aux critiques – à propos du manque de démocratie, de l’inefficacité financière, de la corruption – en insistant complaisamment sur le fait que la paix en Europe justifie tout. Même si cette affirmation était vraie, cela serait de l’auto-satisfaction. Mais, cette année plus que toute autre, on peut voir que ce n’est pas le cas.

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Traduction : Hélène Picq pour Contrepoints.