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Les « cinq morts de la foi » par Chesterton

Publié le 17 octobre 2012 par Tchekfou @Vivien_hoch

Qu’entend Chesterton par « mort de la foi » ? Il voulait dire par là que chaque fois qu’on a cru imminente la fin de l’Église, elle a comme “ressuscité” là où on ne l’attendait pas : “La brusque et renversante réapparition du Christianisme fut presque aussi inattendue que la résurrection du Christ.” C’est le thème de la dernière partie de L’Homme éternel. Quelques passages significatifs :

 Mort et résurrection, par Vivien Hoch

“Il y eut une fois l’Arianisme et une autre fois les Albigeois, puis il y eut l’humanisme sceptique, et encore une fois après Voltaire et après Darwin, donc cinq fois au moins, où la Foi parut tout juste bonne pour les chiens. Cinq fois, ce fut le chien qui creva. Combien formidable le collapsus et combien extraordinaire le redressement, nous ne pouvons bien le voir que dans le cas le plus proche de nous.

Que n’a-t-on pas dit du mouvement d’Oxford et, en France, du renouveau catholique correspondant ? Mais on a rarement dit la chose la plus évidente : que c’était une surprise. C’était aussi énigmatique que surprenant ; car, pour la plupart des gens, cela se présentait comme si une rivière fuyait la mer et entreprenait de remonter jusqu’aux montagnes de sa source. À lire la littérature du dix-huitième et du dix-neuvième siècles, on voit que tout le monde, ou presque, considérait que la religion était comme un fleuve qui ne cesse de gagner en largeur tout au long de son cours, jusqu’à ce qu’il se dissolve dans la mer infinie. Certains pensaient que son cours serait interrompu en catastrophe par une cataracte ; d’autres, les plus nombreux, que l’estuaire de la tranquillité était proche, mais tous considéraient qu’un retour sur elle-même de la Foi aurait été un prodige digne de la sorcellerie.”

“Résumons-nous. Dans la mesure où les derniers siècles ont vu un affaiblissement de la doctrine chrétienne, ils n’ont fait que revoir ce que des siècles plus reculés avaient déjà vu. La dernière fois, cela s’est terminé comme cela s’était terminé au Moyen-Âge et aux premiers siècles. Il est maintenant clair, mais ne cesse de devenir plus clair encore, que l’évanouissement fatal ne suit jamais l’affaiblissement de la Foi ; ce qui suit, c’est la renaissance de ce que l’affaiblissement avait fait disparaître. Cela se termine toujours comme s’est terminé le compromis arien et les essais de compromis avec le nominalisme ou avec l’albigéisme. Mais ce qu’il faut bien voir dans notre cas, comme d’ailleurs dans toutes les répétitions antérieures, c’est qu’il n’y a pas renaissance d’une théologie simplifiée au sens que le monde entendrait ; ni d’une théologie purifiée ; mais, tout simplement, de la théologie. C’est l’enthousiasme pour les études théologiques qui marque constamment les moments de renouveau doctrinal.”

“Il y a des gens pour dire qu’ils souhaitent qu’il ne reste du Christianisme que l’esprit. Ils veulent dire, très exactement, qu’ils désirent qu’il n’en reste que le fantôme. Mais il n’est point question de fantôme. Après ce processus de mort apparente, il n’y a pas rémanence d’une ombre, il y a résurrection d’un corps. Ces gens, qui sont tout à fait prêts à pleurer pieusement, comme il convient, la mort du Fils de l’Homme, ne le sont pas du tout à Le voir se promener de nouveau parmi les collines du matin.

Ces gens, qui étaient alors légions, étaient tous parfaitement habitués à l’idée que le vieux cierge chrétien allait céder la place à la lumière du jour ; il leur semblait honnêtement que la flamme jaunie de cette chandelle ne cessait de pâlir dans le jour grandissant. Imprévisible et tout aussi indiscutable fut le flamboiement soudain du chandelier à sept branches, dressé comme un arbre, qui faisait pâlir le soleil. D’autres âges avaient vu déjà le jour faire pâlir le cierge, puis le cierge faire pâlir le jour. D’autres âges, avant le nôtre, avaient vu déjà les hommes mettre de l’eau dans le vin de la doctrine. D’autres âges déjà avaient vu ce vin coupé reprendre soudain la franche couleur de rubis et la force du vin originel.”

Chesterton voit dans ce flux et ce reflux l’illustration de la parole du Christ : “Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront pas.” Nous vivons en un temps d’apostasie, de lutte acharnée contre l’Église (communisme et franc-maçonnerie) et même à l’intérieur de l’Église (modernisme). Néanmoins, il y a cinq cent ans que saint Vincent Ferrier a jugé imminente la fin des temps, et le monde tourne toujours…


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