Rue St-Paul, Vieux Montréal. © MajorBlog 2012
En août de 2012, le Québec a connu sa première baisse de ventes de maisons en quinze mois.[i] C’était avant les élections du 4 septembre dernier, mais d’aucuns penseront peut-être qu’il s’agissait d’une anticipation sur les résultats. Il n’en est rien. Les analystes expliquent cette baisse par le resserrement hypothécaire mis en place par le gouvernement fédéral. De plus, deux marchés chauds au Canada, ceux de Toronto et de Vancouver, ont vu leur nombre de transactions chuter respectivement de 12,4% et de 30,7%, pour la même période d’août.
Dans une précédente chronique, nous tentions, en effet, de désamorcer certaines inquiétudes concernant un éventuel lien entre les résultats des élections du 4 septembre 2012, un nouveau gouvernement minoritaire péquiste et un impact sur le prix des maisons et le marché de l’immobilier. Ce lien n’existe pas en tant que tel. Les suppositions alarmistes ne tiennent pas compte de l’histoire québécoise qui a vu, depuis 1976, deux périodes de neuf ans de règne péquiste et deux règnes libéraux de neuf ans également dont le deuxième s’est achevé avec le départ du gouvernement Charest. Elles ne sont pas basées non plus sur les facteurs réels qui ont un impact sur l’accession à la propriété, l’augmentation du nombre de mises en chantier et la vente des maisons soient : de un, une situation économique forte et stable, des emplois stables et bien rémunérés et une demande plus forte d’accession à la propriété et, de deux, des taux d’intérêts hypothécaires plus bas. Et d’un facteur culturel, spécifique au Québec.
Le Québec : différent dans ses modes d’occupation des logements
En effet, le Québec demeure un cas un peu spécial comparativement au reste du Canada, en ce qui a trait au choix du mode d’occupation du logement. Propriétaire ou locataire? La croissance du taux de propriété des ménages suit celle du reste du Canada, mais en absolu le pourcentage de propriétaires est toujours beaucoup plus bas que celui du reste du Canada. Des facteurs culturels associés, bien sûr, aux autres facteurs, économiques, démographiques, sociaux viennent expliquer ce fait. Les québécois, par choix notamment, sont moins propriétaires que l’ensemble des canadiens.
Mode d’occupation des logements
Québec 1997 2002 2007
Propriétaires 56,4 56,8 58,7
Locataires 43,6 43,2 41,3
Ontario 1997 2002 2007
Propriétaires 66,0 66,6 69,2
Locataires 34,0 33,4 30,8
Canada 1997 2002 2007
Propriétaires 64,5 64,8 67,4
Locataires 35,5 35,2 32,6
Notons que les gouvernements au pouvoir étaient en 1997 et 2002, des gouvernements péquistes et en 2007, un gouvernement libéral.
L’accession à la propriété est historiquement plus basse au Québec que dans le reste du Canada mais comme partout ailleurs, elle est favorisée par la baisse des taux d’intérêt hypothécaires qui elle-même résulte de la baisse, pour les institutions prêteuses, du coût des fonds utilisés pour financer les prêts hypothécaires. Cette dernière s’explique par des facteurs conjoncturels canadiens ou mondiaux, comme les faiblesses économiques canadienne, américaine et mondiale, des marchés boursiers jugés trop risqués ou l’éclatement de la crise de la dette souveraine en Europe et également par de facteurs structurels, comme les politiques du gouvernement fédéral.
Il n’existe donc pas de lien de cause à effet direct entre le gouvernement au pouvoir au Québec et le marché de l’immobilier. Le gouvernement provincial peut instaurer, toutefois, de bonnes politiques qui engendreront de meilleures conditions. Sur ce dernier point, oui, le gouvernement provincial en place peut et doit agir. Nous ne voyons pas pourquoi il en serait autrement.
Cet article a été rédigé par Idriss Bouhmouch, directeur des opérations au Québec de Ratehub.ca, le site qui vous permet de comparer les taux hypothécaires.
[i] Chambre immobilière du Grand Montréal, communiqué de presse du 10 septembre 2012