Encore à l’affiche avec son film Camille redouble, l’actrice et réalisatrice était interviewée par Mathilde Blottière pour Télérama. Elle y aborde la question de sa judéité…
Et vous, vous croyez en Dieu ?
Mon père est juif mais je n’ai reçu aucune éducation religieuse, je ne connais pas les traditions. Quand j’abordais le sujet, petite, mon père se taisait et ma mère me disait : « Pour les Juifs, tu n’es pas juive mais pour les antisémites, si. » Et pour les autres, et pour moi ? Mystère. Après tout, que je sois juive ou non ne regarde personne. Reste l’histoire de mon père, dont les parents et tous les proches, venus d’Ukraine pour échapper aux pogroms, sont morts dans les camps nazis. Il ne nous reste aucune trace, pas d’acte de décès, pas de tombe, pas de photo, pas d’objet, rien que des noms et mes fantômes. Cela m’a hantée et me hante encore.
Vous n’avez pourtant presque jamais abordé la judéité dans vos films. Pourquoi ?
J’ai comblé les vides comme je pouvais, avec les films de Lanzmann, les textes d’Appelfeld, Arendt, Paul Ceylan et le bottin de Serge Klarsfeld… Mais cela reste pour moi une question très intime. Et puis l’obsession des origines me fait flipper.
On devrait pouvoir être libre et joyeux de ne pas savoir se définir. Pourquoi est-on si souvent sommé de savoir dire qui on est ? Ça rassure ? Ça fige aussi. Ça enferme. On devrait pouvoir être multiple, bégayant, indéfini et infini…
Pas un jour ne se passe sans que je pense à l’histoire de mon père et de sa famille mais, à l’exception de Faut que ça danse !, c’est vrai, mes films n’en parlent pas. Spontanément, je vais vers des choses qui sont parfois dramatiques mais jamais tragiques.
Quant à mes personnages, ils cherchent souvent la vitesse et l’ivresse. L’ivresse des danses et des bagarres dans Petites ou La vie ne me fait pas peur, du vin, de l’amour et de l’adultère dans Les Sentiments, de la jeunesse dans Camille redouble.
Retrouvez l’interview intégrale ICI
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