Premier apéro « Libre et diversité »

Publié le 15 octobre 2012 par Tetue @tetue

Vous connaissez l'armée des clones ? Le libre, c'est pareil, avec des barbus chevelus, clones de Richard Stallman. Ainsi démarre la soirée. Le monde du logiciel libre souffre en effet d'un manque de diversité et de mixité assez honteux, dont je n'ai pris conscience que très tardivement, à l'occasion des RMLL 2010 — cf. : Des geeks poilus aux RMLL 2010 —, qui abordaient ce problème pour la première fois : il n'y a que 6 % de femmes dans le logiciel libre alors qu'elles sont prés d'un tiers dans le logiciel propriétaire ! Telle serait la triste réalité d'une communauté qui aura toujours du mal à diffuser son message tant que ce déséquilibre perdurera lit-on sur le Framablog à ce sujet.

Cependant, il reste très difficile d'énoncer ce constat tant il est reçu comme une agression par les membres de la communauté. C'est pourquoi on parlera plutôt de « diversité », y diluant — encore une fois — la problématique sexiste pour se préoccuper des « minorités » de femmes, de seniors, de handicapés et d'étrangers, qui seront représentées au cours de la soirée par le port de déguisements symboliques.

La diversité n'est pas une contrainte, c'est une richesse !

Lancé par Armony Altinier, cet apéro, premier du genre, est l'occasion d'une prise de contact. Chaque association partenaire de l'événement se présente, chacune donnant sa définition de la diversité et la façon dont elle traite le sujet : Framasoft, Parinux, La Cantine, Ubuntu, Wikimédia, etc.

Ça trolle cependant dès la seconde prise de parole, au nom de l'April, principale association de promotion et la défense du logiciel libre dans l'espace francophone : Lionel Allorge évacue rapidement la problématique du manque de mixité sociale et notamment de femmes, bien qu'elles constituent par ailleurs plus de la moitié de la population, pour rappeler que les « barbus chevelus » ne sont pas si nombreux qu'on le croit et réussit à plaindre cette minorité… Comment dire ? La voie est peut-être libre, mais la route s'annonce encore longue !

À l'opposé, Mozilla se positionne très clairement : en n'accueillant pas les femmes, on se prive potentiellement de 50 % de contributions dit Pascal Chevrel. La fondation se distingue par son ouverture réelle : 20 % des employés sont des femmes, ce qui est sensiblement davantage que dans le libre et c'est même une femme, Mitchell Baker, qui en est assure la présidence. Mais qu'est-ce que j'attends pour rejoindre Mozilla !?

Mieux encore, l'ambition du projet WoMoz, groupe féminin représenté par Claire Corgnou, dépasse la diversité au sein de Mozilla pour s'élargir aux logiciels libres en général. Pour cela, il cherche à comprendre pourquoi le milieu n'est pas attrayant pour un public féminin. Avec un crédo implacable : un logiciel étant le reflet de ses créateurs, ignorer les femmes dans son équipe de développement, c'est se couper de la moitié de son public potentiel.

S'ensuivent les témoignages de Jean-Philippe Mengual, utilisateur GNU/Linux non-voyant, aujourd'hui libriste évangéliste et de Monique Brunel, qui raconte son parcours depuis la découverte du Web, des CSS, du libre, de Mozilla… sans oublier l'accessibilité. À propos, voici leurs blogs respectifs : accelibreinfo.eu et webatou.info.

Le libre répond d'abord aux besoins d'un codeur… et manque de logiciels qui répondent à de vrais besoins, ceux de vrais gens remarque quelqu'un dans la salle. Serait-ce une des causes de son manque de diversité, me demande-je alors ? Quelle reconnaissance peut-on imaginer pour les contributeurs, poursuit-il ? Il faut relire La Cathédrale et le Bazar, un essai qui relate le développement du système d'exploitation Linux et du logiciel Fetchmail, lui répond-t-on. Pfiou… Les gens de l'Art Libre ne prétendent pas avoir besoin de logiciels libres pour faire du libre précise Aurélien Roux, artiste musicien de Sebkha Shot, utilisateur du libre, qui reconnaît en passant quelques difficultés à se faire comprendre des développeurs, avant d'ajouter qu'avec le libre, il s'agit moins d'utiliser un logiciel répondant à un besoin que de considérer l'outil pour voir comment adapter son besoin au logiciel libre. Oups… Ceci dit, d'après les témoignages entendus ce soir, nous sommes tous venus au libre en tant qu'utilisateur… pour finir par développer, remarque une autre personne de la salle.

Toutes ces interventions étaient transcrites en direct sur Framapad, bénévolement, façon vélotypie à plusieurs mains, bravo ! Mais La Cantine est malheureusement un lieu trop bruyant pour une personne malentendante comme Sophie de vismaviedesourde.fr et nous allons donc dîner ailleurs, chez Aki, le roi de l'omelette japonaise, miam !

Bilan ? J'ai réalisé que je n'avais vraiment plus envie de perdre mon temps avec ces communautés de clones peu accueillants, qu'ils soient barbus chevelus ou pas, libristes ou pas, et préfère aller inventer le monde libre là où la mixité est déjà une réalité et non pas un combat de tous les jours. Cette soirée m'a aussi donné envie d'aller plus loin, de rencontrer les autres femmes du libre — Youhouh !? — et pourquoi pas de porter La Barbe. Merci Armony. Et vivement la suite !