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Pourquoi il n'y a pas de blogueurs de gouvernement

Publié le 15 octobre 2012 par Letombe
Pourquoi il n'y a pas de blogueurs de gouvernement


Faut-il que la question intéresse pour alimenter de multiples commentaires et même une réaction quasi-officielle d'Elie Arié, publiée sur Marianne2 mardi 9 octobre: comment faudrait-il commenter l'action gouvernementale ?
Elie Arié apporte une précision: le militantisme obscurcit l'analyse objective et donc crédible. Un argument qu'il appuie sur l'exemple de la reconversion - réussie ou ratée - des blogs d'opposition après la victoire de François Hollande en mai dernier.
La vie politique est encombrée de militance. Ce n'est ni sale, ni grave, ni dommage bien au contraire. Quelques news-magazines bien connus sont des outils de propagande libérale permanente, d'un militantisme honteux qui ne dit pas son nom. Pourquoi devrions-nous nous taire ? Il serait cependant erroné de penser que les blogs politiques antisarkozystes - y compris celui-ci - sont devenus des militants gouvernementaux. Il faut d'abord comprendre les raisons et les moteurs des blogs politiques.
Depuis la défaite de Nicolas Sarkozy, les blogs de l'ancienne opposition ont chacun choisi leur ligne ou ne l'ont pas trouvé. Certains sont restés dans l'opposition, à gauche comme à l'extrême droite. De Sarkozy à Hollande, la différence était trop tenue pour susciter un quelconque soutien ni pour retenir les critiques nombreuses qui inévitablement devaient s'exprimer. Sur nombre de sujets, il y avait du « j'vous l'avait bien dit », un argument tout à fait respectable pour qui souhaitait davantage la défaite de Sarkozy que la victoire de Hollande.
D'autres blogueurs politiques ont plus simplement abandonné, provisoirement ou pas. D'autres encore ont choisi de poursuivre une analyse personnelle de l'actualité. Passée la campagne, ils ont choisi d'apporter leur éclairage, en fonction de leurs attentes et de leurs convictions. Ils ne sont pas épargnés dans la critique ni dans les applaudissements quand ils l'estimaient nécessaire.
La plupart, sinon tous, ont affiché la couleur, c'est-à-dire le sens de leur engagement.
Pour juger d'un blog, il faut justement savoir juger son analyse politique à l'aune de son cahier des charges. Ainsi, le blog Sarkofrance a été créé pour apporter une analyse critique et antisarkozyste à l'action de l'ancien monarque. On pouvait regretter ou critiquer l'initiative. Mais l'objectif était clair et militant: argumenter contre Nicolas Sarkozy à travers la chronique quotidienne de son (in)action. Ce dernier avait la puissance d'un appareil d'Etat, qu'il confondait avec celui de son parti pour défendre sa cause. Le cahier des charges d'un blog antisarkozyste... était d'être antisarkozyste.
A l'inverse, ces Chroniques Politiques - qui ont remplacé le blog Sarkofrance au soir de la victoire législatives - ne sont pas celles d'un militant pro-gouvernemental. Une large majorité de billets publiés ont été favorables à l'action de François Hollande. Et pour trois raisons qui sont sans rapport avec une quelconque allégeance préachetée ou définitive à cette nouvelle administration. Trois raisons qui ont été explicitées au fil des mois écoulées depuis mai.
La première tient à l'atmosphère médiatico-politique: le Hollande-Bashing est venu rapidement, bien plus rapidement que l'antisarkozysme ne devint à la mode en son temps. malgré le Fouquet's et la yacht, la villa américaine et le reste, Sarkozy était encore portraituré comme un nouveau Kennedy en août 2007. Les temps ont bien changé. Il nous est apparu assez naturel d'exposer un autre point de vue, plus positif ou plus patient puisque le bruit médiatique devenait à nouveau monocolore.
La seconde motivation à publier davantage de billets positifs que négatifs tient à une analyse fondamentale: l'action politique ne résout rien en quelques mois. Nicolas Sarkozy a tenté de nous faire croire à la réforme permanente et tous azimuts. Dans les faits, il n'en fut rien. Le blog Sarkofrance a témoigné à de nombreuses reprises de l'immobilité agitée de l'ancien monarque. Maintenant qu'il est parti, pourquoi donc poursuivre l'agitation réactive qui était nécessaire sous l'ancienne omni-présidence ? Certes, l'action politique se nourrit de signaux forts ou faibles, et pas seulement d'actes ou de réformes. L'action silencieuse n'est jamais récompensée. Mais il est aussi du devoir de  quelques blogueurs de laisser ce temps au temps.
La troisième raison, qui découle de la précédente, est une hypothèse personnelle: François Hollande commence modeste et raisonnable, trop à droite diront certains, car il faut recouvrir des marges de manoeuvre inexistantes aujourd'hui. Mais il terminera plus radical, volontairement ou forcé. C'est la thèse, partagée par l'auteur de ses lignes, défendues par Emmanuel Todd. Pourquoi lui sauter à la gorge à ce moment prématuré ?
La présidence Hollande ne ressemblera pas aux précédentes. Si Nicolas Sarkozy a pu être comparé, très tôt et à juste titre, à Valéry Giscard d'Estaing (dérive monarchique, ouverture superficielle, réformes en surface, échec dans la crise), François Hollande ouvre une séquence dont nul ne connaît l'issue
Tout cela n'empêche nulle critique quand elle est nécessaire.
La gauche sait très bien se disputer sur l'essentiel, les idées et les valeurs.
Et c'est tant mieux.


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