Le théâtre Hébertot présente la transposition scénique de "La Conversation" de Jean d'Ormesson, ouvrage paru l'an passé. Cet échange imaginaire entre Bonaparte et son second consul, Cambacérès, se révèle brillant d'intelligence, plein d'esprit, et superbement porté par deux grands comédiens, soigneusement dirigés par Jean-Laurent Silvi. Pas vraiment adeptes ni connaisseurs de l'histoire napoléonienne, nous avons cependant beaucoup apprécié ce moment de théâtre tout à fait exquis.
C'est un Bonaparte premier consul de la république en passe de s'autoproclamer empereur que le célèbre académicien nous donne à voir et à entendre ici (la quasi totalité de ses propos sont authentiques). Le futur Napoléon 1er fait en effet part de son projet d'empire à un Cambacérès stupéfait mais admiratif, sous le charme, bluffé par l'ascension fulgurante de son interlocuteur, conquis par une audace, une détermination incroyables et un sens politique hors du commun, qui finira par approuver ce dessein, malgré sa folie, et lui confirmer sa fidélité.
La plume de l'auteur, qui mêle habilement l'historique au futile, est vive et maligne, à l'image de son héros. On semble d'ailleurs percevoir l'oeil pétillant de d'Ormesson dans celui de Bonaparte. D'autant qu'il est incarné par un Maxime d'Aboville dont la prestation nous a plus que convaincus.
Le jeune homme deux fois nommé aux Molières, à la diction acérée, d'une sublime précision, au débit parfois saisissant, impose malgré son jeune âge une autorité naturelle remarquable et laisse transparaître dans ses regards, ses mouvements et ses silences la matière grise toujours en effervescence du personnage. L'acteur maîtrise magnifiquement son instrument, atteignant l'apogée de son art au cours d'une réjouissante tirade (à l'intérêt historique certes secondaire) évoquant une abracadabrantesque dispute de femmes à propos d'un châle à laquelle il mit un terme, dont la narration s'emballe de manière vertigineuse et se conclut par une salve d'applaudissements.
Face à lui, tout en écoute et en complicité, Alain Pochet délivre un jeu d'une grande subtilité. La délicatesse et la finesse de son Cambacérès s'allient harmonieusement à l'entrain permanent de son partenaire.
Très beau duo.
Allez-y !
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Photo : Victor Tonelli / ArtcomArt