Ils ont des dégaines de skateboarders avec leur jean baggy, leur look à la cool qui n'en est pas vraiment un. Restent le mystère des barbes et ce nom, Grandaddy, pas spécialement fun. La réponse est peut-être dans le nom de la ville dont ils sont originaires : Modesto. Jason Lytle, leur leader, est en tout cas de retour très prochainement avec un nouveau disque solo. Les plus chanceux ont pu revoir la formation jouer au dernier Rock en Seine. "The Sophtware Slump" est le meilleur disque d'un groupe alors en état de grâce. Normal donc qu'on le retrouve tout en haut de mon palmarès de l'année 2000. Pourtant, la concurrence était rude avec notamment le Radiohead de rigueur - décidément habitués chez moi aux places d'honneur, après 2001, 2003 et 2007 - et pas n'importe lequel, "Kid A", celui que d'aucuns considèrent comme le meilleur album de la dernière décennie. Pj Harvey, une autre squatteuse de l'excellence, signait son disque le plus immédiatement accrocheur, avec en guest star, un certain Thom Yorke. Un canadien fantasque, Hawskley Workman débarquait de nulle part, avec sa pop de cabaret, quelque part entre le meilleur Bowie et le meilleur...Queen. Il y eut aussi deux grands disques de musique "planante", l'un aux somptueux accents cinématographiques (Goldfrapp), l'autre aux parfums de grands espaces entremêlés de lentes montées de lave (Sigur Ros) - normal pour un groupe islandais -. Les anglais de Hefner ont sorti un album pop dans un esprit so british avec, au passage, une petite pique obligée à la "charmante" Miss Thatcher. Les petits jeunots de JJ72 surprenaient avec un rock héroïco-lyrique qui résiste étonnamment à l'usure du temps. Et puis, il y eut le rock plus sauvage mais loin d'être si bourrin qu'il en a l'air du groupe multi-culturel At The Drive-In. Enfin, les tout aussi surprenants Têtes Raides, qui signaient avec "Gratte Poil", un formidable condensé de chanson française "réaliste" dans tout ce qu'elle a de meilleur, à la fois grave, joyeux, ludique, politique, enfantin, casse-gueule à souhait. "Gratte Poil", quoi. De bug de l'an 2000, il n'y eut pas. A la place, un vaste champ des possibles. Passionnant.
10. JJ72 - JJ72
C'est bizarre comme un groupe que vous avez d'abord catalogué de commun parvient au fil du temps à gagner votre estime. La même année sortait le premier disque de Coldplay, groupe qui connaîtra la brillante carrière que l'on sait. Pourtant, JJ72 avait des arguments autrement moins lisses à proposer. Depuis, on est sans nouvelles. La vie est injuste.
9. At The Drive-In - Relationship Of Command
Mais que m'arrive-t-il donc pour écouter ce genre de musique aux abords pas particulièrement subtils ? Suis-je revenu subitement à mes jeunes années et les écoutes répétées de Rage Against The Machine et de leur célèbre précepte "F### You, I Won't Do What You Tell Me" ? Avec le recul, on constate que At The Drive-In réussit simplement l'exploit de réconcilier tous les fans de rock, du plus mélodique au plus brutal. Pas étonnant de retrouver l'ami Iggy Pop pour un morceau particulièrement ravageur.
8. Goldfrapp - Felt Mountain
Goldfrapp était, après ce premier disque, promis aux plus hautes marches, mais ce "Felt Mountain" n'a depuis pas connu de suites dignes de ce nom. Dommage, on les aurait bien vu en brillants successeurs de Portishead. Heureusement, il reste donc ce premier effort qui ne semble même pas en être un, tellement cette musique respire le naturel. De la pop version cinémascope portée par une chanteuse à la voix subjugante.
7. PJ Harvey - Stories From The City, Stories From The Sea
Et voilà la reine PJ qui démontre en un tour de main qu'elle est aussi capable d'être troublante de simplicité, alignant sur ce disque, du rock direct et efficace. On y entend aussi pour la première fois un peu de vraie douceur. On pensait regretter la PJ d'avant, plus revêche, mais que nenni, celle-ci possède un charme tout aussi enivrant.
6. Têtes Raides - Gratte Poil
Mais que m'arrive-t-il donc pour écouter ce genre de musique aux abords si sérieux et ennuyeux ? Que les détracteurs des Têtes Raides viennent seulement écouter ce "Gratte Poil" pour se faire une meilleure idée de la large palette d'émotions que peut procurer leur musique. On a rarement entendu en France, un groupe de rock au répertoire aussi ample. N'en déplaise aux fans de Noir Désir. Pas rancunier, à l'époque, Cantat venait même y pousser la chansonnette.
5. Hefner - We Love The City
Qu'on se le dise (ou pas), Hefner fut l'un de mes groupes fétiches. C'est bien simple, j'aimais tout chez eux, leur pop bancale mais incroyablement mélodique et entraînante, leur humour décalé et typiquement britannique et enfin leurs pochettes façon bande dessinée. Rien de calculer chez eux, juste une manière d'être. Rare.
4. Sigur Ros - Agaetis Byrjun
Plus encore que la voix aérienne et asexuée de leur chanteur, l'étonnante façon qu'ils avaient de jouer de la guitare avec un archet m'avait marqué. C'était en 2000, à Saint-Denis, pas loin du Stade de France, sous un chapiteau installé exprès pour l'occasion. Ils jouaient alors en première partie de Radiohead. Mais c'est surtout après de très nombreuses écoutes de leur album que j'ai définitivement craqué. "Agaetis Byrjun" est un disque ovni que seuls des gens aussi isolés que les Islandais semblent capables de faire.
3. Hawskley Workman - For Him and the Girls
Hawksley Workman est un artiste dont on sait à l'avance qu'il finira pas lasser. Parce que c'est son style qui veut ça, un poil outrancier. Parce qu'avec ce premier disque haut en couleurs, il avait déjà tout déballé, voulant d'entrée en mettre plein la vue. Avec "For Him and the Girls", Workman a donc déjà grillé l'essentiel de ses cartouches ("Bullets"?). Mais celles-ci étaient tellement incandescentes, qu'elles brillent encore aujourd'hui...
2. Radiohead - Kid A
Avec "OK Computer", Radiohead avait déjà surpris tout son monde, prenant une longueur d'avance sur la concurrence. Avec "Kid A", le groupe s'évade littéralement, partant sur des terrains jusqu'alors inconnus du commun des mortels. Depuis, plus de réelles avancées, juste d'autres chemins de traverse. Ce qui fait dire à certains que c'est leur dernier disque important.
1. Grandaddy - The Sophtware Slump
Avec la faute d'orthographe volontaire dans le titre de leur disque, les Grandaddy ont voulu faire un clin d'oeil évident au bug informatique tant redouté du passage à l'an 2000. Laissons tomber les ordinateurs et retournons à des rapports plus naturels et instinctifs semblent nous dire les Californiens. On croirait entendre nos grand pères. La voix de la sagesse ?