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... Mais il était impossible d'y échapper.
Ce jeudi 11 octobre 2012, Nicolas Sarkozy faisait son grand retour sur la scène politique par le biais improbable d'une conférence de 50 minutes dans un hôtel 5 étoiles de Manhattan à New-York devant un cercle restreint de traders et grands patrons, le tout organisé par une banque d'investissement brésilienne, BTG Pactual.
La rencontre n'avait pas été promue par les collaborateurs de l'ancien monarque, mais tout le monde était bizarrement au courant du lieu, le Waldorf Astoria sur Park Avenue, de l'heure (12H15) et même de l'étage (le 18ème) où se déroulait la dite intervention et le nombre de convives - 420.
Non, je ne voulais pas parler de Sarkozy, mais toute la journée de ce jeudi, les trois chaînes d'information françaises s'étaient dévouées pour envoyer du personnel sur-place et couvrir l'évènement.
Jean-Jérôme Bertolus d'iTélé était là. Trop maquillé pour masquer la fatigue d'un aller-et-retour expresse. La liaison satellite était parfaite. Il était presque dans la salle, à croire ses confidences. Sarkozy a assuré à ses interlocuteurs que « la situation va encore très difficile pour au moins les deux ans qui viennent. »
Sans rire... Tout ça pour ça. Le Figaro y dédia deux journalistes, Charles Jaigu et Maurin Picard, pour un compte-rendu trop exhaustif. Une agence de presse s'amusa de son teint bronzé. « Il était assez détendu, bronzé, a parlé de la politique en Europe, de l'histoire en Europe » rapporta un banquier français. « Il a replacé la crise européenne dans un contexte historique que les financiers oublient parfois, et a aussi parlé des pays émergents». L'homme qui valait 500 milliards de dette était « très charismatique ».
On savait même où retrouver l'ancien monarque dans la soirée.Au concert de son fils Pierre, le fameux DJ Mosey, dans le très select Ajna Bar (ex-Buddha Bar) du Meatpacking District à Manhattan.
Je ne voulais pas parler de Sarkozy.
J'ai donc zappé sur la concurrente BFM, mais celle-là avait décidé de mobiliser son correspondant local, Jean-Bernard Cadier. C'était à peine moins ridicule. La campagne électorale américaine pouvait attendre. Après tout, le combat pour le poste suprême pour la présidence de la plus grande économie du monde n'était que peu de chose.
Aucun journaliste n'avait été admis dans la salle mais tous savaient ce qui s'y étaient dit.
Nous pouvions croire que ces journalistes, des apprentis éditocrates, concrétisaient un fantasme solitaire. Mais non, Nicolas Sarkozy était de la partie. Il est allé saluer les journalistes et photographes. La grande inconnue du jour était ... l'accent et l'anglais de l'ancien monarque. Il paraît qu'il n'était pas si mal mais que Sarkozy avait promis de revenir l'an prochain avec un anglais impeccable.
Trois ou quatre conférences sont prévues d'ici la fin de l'année, à quelque 50 ou 100.000 euros l'heure, la vie était belle.
Non, je ne voulais pas parler de Sarkozy.
La démarche était ridicule mais l'on pouvait espérer qu'il ne s'agissait que d'un remplissage habituel. Elles y consacrèrent même analyses et débats. Etait-ce si raisonnable, pour l'ancien monarque si souvent pris en flagrant délit de complaisance bling-bling de s'afficher dans un cadre aussi luxueux ?
Le matin même, Nathalie Schuck et Frédéric Gerschel du Parisien auprès de notre ancien monarque avaient repris du service pour quelques confidences. Nicolas Sarkozy traitait son successeur de tous les noms comme un vieux jaloux. Le narcissisme était visiblement toujours présent: « J'aimerais me construire une autre vie, mais peut-être que le devoir m'appellera. (...) La situation se dégrade très, très vite, constate-t-il, un peu étonné par la brutale dégringolade de Hollande dans les sondages. Il risque d’y avoir une crise violente et grave. Ça va déraper. »
Le soir, quelle ne fut pas notre surprise de constater que les JT des chaînes nationales s'agitaient aussi sur le sujet. Vers 20h10, France 2 nous livra un reportage nostalgique et touchant. On sentait que la présidence normale, c'était pas leur truc, trop glaçant et trop peu de rebondissements.
Non, je ne voulais pas parler de Sarkozy.
Mais il s'est aussi immiscé dans notre actualité parce que son ancien compère d'extrême droite Patrick Buisson fait l'objet d'une nouvelle plainte. L'association Anticor, deux jours avant, avait déposé une plainte contre X pour délit de favoritisme et détournement de fonds. Cette nouvelle plainte est, à en croire le Monde, « plus détaillée et plus complète que les précédentes». Un militant écologiste de Grenoble avait récupéré des centaines de documents élyséens, dont quelques éléments précieux: « des sondages sur la vie privée de l'ex-chef d'Etat, des enquêtes sur les candidats probables du Parti socialiste à la présidentielle de 2012, mais aussi des études sur l'affaire Bettencourt ou les vacances contestées de Michèle Alliot-Marie en Tunisie. »
A en croire Marianne, qui publiera lundi d'autres révélations sur la même affaire, l'ancien monarque était donc obnubilé par son image. Il avait ses écoutes, via la DCRI, mais aussi ses centaines de sondages aux objets improbables et narcissiques. Pire, l'hebdomadaire s'interroge sur un éventuel détournement de fonds: les comptes de campagne de l'ancien monarque pour 2012 ne comprennent aucune dépense de conseil en communication et très peu de sondages d'opinions. Comme il était curieux de constater qu'au moment le plus crucial d'un mandat - le combat pour la réélection - le candidat sortant était soudainement devenu avare en enquêtes d'opinion.
De là à penser que l'homme avait financé sur fonds élyséens - une pratique illégale - une belle fraction de ses dépenses de campagne, il n'y a qu'un pas que nous franchissons allègrement.
Non, je ne voulais pas parler de Sarkozy.