[Critique Cinéma] Dans la maison

Par Gicquel

Un garçon de 16 ans s’immisce dans la maison d’un élève de sa classe, et en fait le récit dans ses rédactions à son professeur de français. Ce dernier, face à cet élève doué et différent, reprend goût à l’enseignement, mais cette intrusion va déclencher une série d’évènements incontrôlables.


"Dans la maison" de François Ozon

Avec : Fabrice Luchini, Ernst Umhauer, Kristin Scott Thomas

Sortie Cinéma le 10/10/2012

Distribué par Mars Distribution

Durée : 105 Minutes

Genre : Thriller

Film classé : -

Le film :

C’est un film qui commence par la fin. L’ultime plan, assez repris au cinéma, mais cette fois peut-être plus emprunté à  Rohmer (« Les nuits de la pleine lune » ?) est un condensé remarquable de ce que François Auzon n’a pas su voulu dire. D’une histoire extrêmement riche et complexe dans ses attendus, il n’en retient que des souvenirs, les bribes d’une mémoire d’un jeune lycéen emporté par les tourments de l’adolescence.

Après une première rédaction, très appréciée de son professeur, Claude poursuit son sujet. Il en est devenu le personnage principal projeté au sein de la famille de  son meilleur ami. Sous prétexte de lui venir en aide, il s’  introduit dans leur intimité qu’il va maintenant  raconter, page après page, sous l’œil émerveillé, mais critique de son professeur.

Comme la fiction rejoint la réalité des premiers écrits, le mélange des genres est aussi un argument fort du scénario.  Une projection des désirs, des fantasmes jamais assouvis. Bien que son personnage soit plus ambigu qu’il n’y parait, on devine avant tout chez Claude cette quête d’un vrai foyer, qu’il va  trouver bien évidemment chez son copain, mais aussi chez son professeur. Ce  père de substitution qui n’aura jamais d’enfant, est un écrivain raté.

On le découvre au fil d’un récit, où insidieusement, tout le monde se prend au jeu de l’adolescent et s’engouffre dans un maelström vertigineux, fait de  sentiments fous, de  passion secrète, et de déraison.  C’est l’histoire qui file, pas la caméra, beaucoup trop sage et lisse. Elle en devient mollassonne.  Et ne donne qu’un aperçu gentillet et succinct de cette explosion de vie retenue autour d’une foultitude de questions et de problèmes que pose le scénario.

Sur  la création artistique, le voyeurisme, l’enseignement à l’école, le rôle des professeurs, celui des familles. Le sujet de la paternité- pourtant au cœur du dilemme- n’est qu’effleuré ; l’art contemporain, une fois encore dans le cinéma français, en prend plein la gueule.

 Luchini  jubile alors devant  «  le blabla de la littérature artistique (…) de la merde  », configurant son personnage d’enseignant frustré dans les limites du raisonnable. S’il récite La Fontaine  et s’évanouit près d’un livre de Céline, il échappe malgré tout  à son image, emportant dans sa juste interprétation celle de son cadet Ernst Umhauer, l’espoir du cinéma hexagonal. Kristin Scott Thomas et Emmanuelle Seigner complètent  joliment  ce tableau de famille, auquel il ne manque plus qu’un cadre. Celui d’un cinéaste un peu plus aventureux.

En bref

Le film

Rohmer , peut-être ou Polanski plus sûrement, mais pas François Ozon pour cette histoire qui demandait une autre énergie que cette retranscription mollassonne d’une aventure pleine de vie, de poésie et de cruauté. Ozon est trop gentille, sa caméra est trop sage. Il fallait que ça explose.