Depuis une circulaire du 18 décembre 2009 publiée pour la première fois ici, le débat n'en finit pas de rebondir : une centrale solaire au sol porte-t-elle atteinte à la vocation agricole d'une zone classée agricole au PLU ?
La réponse est à élaborer au cas par cas et en fonction des circonstances propres à chaque espèce, comme la jurisprudence a déjà pu le préciser. De ce point de vue, le Juge semble se montrer plus pragmatique que l'Etat qui apparaît pour sa part, assez rigoureux.
Dans la présente affaire, une société avait demandé "le permis de construire une ferme photovoltaïque de 13 000 panneaux solaires et quatre cabanons dans la cadre d'une exploitation agricole de géraniums sur une parcelle d'une superficie de 5,5 hectares". Le permis avait été tacitement délivré puis retiré au motif principal d'une atteinte à la vocation de la zone, en raison, notamment, de la pose de panneaux solaires.
L'arrêt précise :
"Considérant, en second lieu, que la MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT fait valoir notamment que les travaux en cause impliquent l'abandon de la culture de la canne à sucre sur les parcelles concernées, et que la culture du géranium qu'il est prévu d'y mener n'occupera que la moitié de la parcelle ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'exploitation agricole à laquelle le projet entend se substituer connaît des problèmes de rentabilité ; que sur la superficie totale de la parcelle, qui est de 5 hectares, la moitié doit être affectée à la culture du géranium pour la production d'huiles essentielles ; que l'autre moitié, recouverte par les panneaux solaires, doit être affectée à l'entreposage du géranium à l'abri des intempéries, d'autant plus nécessaire compte tenu du temps requis pour la récolte, faiblement mécanisée, de cette plante ; que la production attendue est de 120 kilogrammes d'huiles essentielles par an ; que la conjonction de cette culture avec la production d'énergie renouvelable par l'entremise des panneaux solaires doit assurer la rentabilité de l'exploitation agricole ; que dans ces conditions, en accordant tacitement le permis de construire sollicité, le préfet de la Réunion n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard de l'exigence, prévue par le règlement d'urbanisme, que le projet n'altère pas la production agricole ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la ministre et comme le tribunal administratif l'a jugé, le permis tacite en cause n'était pas illégal à ce titre ; que dès lors, le préfet de la Réunion n'a pu légalement le retirer pour ce motif ;"
Il est trés intéressant qu'aux termes de cet arrêt et pour la Cour :
- les panneaux solaires peuvent concourir à l'activité agricole grâce ici à une fonction d'entreposage et de protection d'une plante
- cette installation solaire contribue à la rentabilité de l'exploitation agricole.
Cette deuxième observation est particulièrement intéressante. Il est heureux qu'un Juge souligne enfin que nombre d'agriculteurs ont investi dans le solaire, non pour porter atteinte à leur exploitation agricole mais bien au contraire pour la péréniser.
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Arnaud Gossement
Avocat associé
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