Les médias dominants produisent de nombreux articles relatifs au "choc de compétitivité" alors que Louis Gallois, le nouveau commissaire général à l'investissement chargé du Grand emprunt, n'a pas encore remis son rapport au Premier ministre.
Aux termes de publications produites par des associations philanthropiques, financées par de généreux mécènes complètement désintéressés, comme l'Institut de l'entreprise ou l'Institut Montaigne, il ressort que l'économie française, malade de rigidités et d'un coût du travail trop élevé, a besoin d'une sorte d'électrochoc à base de dérégulation du marché du travail, de réformes relatives aux retraites, à la protection sociale, à la fiscalité et à la dépense publique.
C'est dans ce contexte que les Ayrault du social-libéralisme ont convoqué les partenaires sociaux à une Conférence sociale sur «une meilleure sécurisation du travail» avec un double objectif : flexibiliser le travail (en le sécurisant dit-on dans les allées du pouvoir) et baisser le coût du travail (le modèle allemand !).
Tout ça, c'est du blabla.
Certes, il y a la concurrence internationale, le libre-échange et la mondialisation, mais même en période dite de crise, le pays n'a jamais autant créé de richesses alors que la précarité du travail est quasiment devenue la norme et les revenus des classes populaires et moyennes stagnent dans un contexte de chômage de masse.
Le choc de compétitivité est un élément de propagande pour légitimer un nouvel accroissement des inégalités sociales : la baisse du coût du travail permettra à l'oligarchie de s'enrichir davantage.
Rien de tel qu'un exemple réel.
Un tract des sections AXA du syndicat FO quant au Comité central d'entreprise AXA France du 11 septembre 2012 et des documents disponibles sur internet réduisent en miettes le choc de compétitivité que les dirigeants historiques et actuel d'AXA appliquent dans leur entreprise et qu'ils promeuvent par l'intermédiaire de leurs thinks tanks.
AXA a été fondée par un membre très influent du patronat français, Claude Bébéar qui préside l'Institut Montaigne, un think tank indépendant du bolchévisme.
Le groupe AXA est le leader mondial dans son domaine d'activités. Il y aurait long à raconter l'évolution de cette société qui s'est engouffrée dans le capitalisme financier, la spéculation et ses produits dérivées, mais là n'est pas l'objet du présent billet. AXA obtient par exemple 18,9 % de retour sur investissement pendant que la concurrence reste en moyenne scotchée à 13 %. AXA n'a aucun problème de compétitivité susceptible de la conduire jusqu'au dépôt de bilan...
AXA est actuellement dirigée par Henri de La Croix de Castries, comte de Castries. En dehors de ses heures de travail, cet homme de réseaux, proche des présidents Sarkozy et Hollande, préside le conseil de direction du groupe de Bilderberg, une sorte de club huppé très influent et très discret où l'oligarchie internationale refait le monde à la sauce néo-libérale : le pire c'est que cette internationale y arrive ! Quelques économistes de marché et politiciens, même de "gauche" (Valls) y sont conviés pour s'imprégner idéologiquement et réciter le bréviaire néo-libéral.
Le Sieur Henri coule également ses loisirs au sein du conseil d'orientation de l'Institut de l'entreprise, ce think tank, qui avec l'Institut Montaigne, réclame un choc de compétitivité...
Le rapport annuel 2010 indique que la rémunération variable de Monsieur Henri s'est élevée à 2.061.087 euros, sa rémunération fixe à 833.333 euros et ses jetons de présence au directoire du groupe AXA à 82.054 euros.
Au total, le PDG d'AXA a perçu 2.980.624 euros annuels, en dehors des actions qu'il a peut-être revendu et du revenu accessoire de ses rentes.
Et, ce n'est pas tout...
FO indique qu'il toucherait au titre de la retraite supplémentaire payée par l'entreprise, et au-delà des 120.000 euros du régime général, plus d'un million d'euros de "pension" ! Pour assurer la pérennité de cette humble pension de modeste retraité, AXA a provisionné quelques 27, 5 millions d'euros pour lui et son adjoint.
Et, ce n'est pas tout...
Le groupe AXA a versé la somme de 4.636.000 euros aux 10 plus gros salaires alors que les 34 000 autres salariés ont du se partager 7.452.406 euros !
Et, ce n'est pas tout...
Comme le mentionne toujours le tract syndical, AXA :
« a distribué en France, de façon complètement opaque, plus de deux millions d'options d'actions... à 1984 bénéficiaires mystérieux, principalement dans les cercles de direction.»
En l'espèce, ce PDG applique une répartition excessivement inégalitaire des richesses créées par les salariés d'AXA.
Monsieur le comte de Castries de Bilderber de l'Institut de l'entreprise est donc favorable à la baisse du coût du travail... pour les autres, les gueux !
En poste chez AXA depuis plus de 23 ans, il prône la flexibilité du marché du travail... mais pour les autres !
C'est ce qu'on appelle un cas concret très édifiant.
Aussi, toute conclusion visant à démontrer l'arnaque en cours du choc de compétitivité serait superflue. Pour la fine bouche, ajoutons seulement que le tract syndical dénonce un plan "social" qui ne porte pas son nom avec des délocalisations, des externalisations et la destruction des CDI...