Non, je ne dirais pas du mal de BB Brunes. Je ne compte pas défoncer à coups de pelles et de pioches leur album Long Courrier. La vérité, c’est que je le trouve excellent, cet album. Loin, très loin du très juvénile Blonde comme Moi. Beaucoup travaillé, abouti, construit, très poppy. Ils ont délaissé leur rock bébé version sixties pour les synthés eighties et lorgnent désormais largement pour les sonorités de l’époque. C’est dans l’air du temps, la France en ces temps de récession musicale semble se tourner vers son passé. Les artistes invoquent les fantômes de la new-wave façon Daho, Indochine (époque Troisième Sexe), Jacno ou Taxi Girl. Comme si finalement, on avait enfin digéré notre héritage musical. Arrêtons les digressions, revenons à BB Brunes, ces fers de lance de l’horripilant mouvement des bébés rockeurs, ont finalement réussi à prouver qu’ils n’étaient pas qu’un simple groupe éphémère monté de toute pièce par la presse et les médias qu’on jetera sur le bord de la route du rock quelques mois plus tard. On a d’ailleurs tous rit au nez de Philippe Manœuvre d’avoir osé les mettre en Une de Rock and Folk.
Déjà avec Nico Teen Love ils se débarrassent du costume « je suis un rockeur, je fais comme Papa », de l’attitude faussement rebelle, carrément tête à claque et surtout ils se réinventent. Sur Nico Teen Love, le fantôme de Gainsbourg flotte sur cet album. Une influence qui existe depuis le début du groupe, puisque leur nom fait référence à Brigitte Bardot et la chanson « Initial BB ». Mais le véritable virage, il s’effectue avec Long Courrier. Un nouveau BB Brunes ? Assurément. Cet album-là, même s’il ne parait que trois ans après Nico Teen Love est une véritable rupture. Mieux, une renaissance. Des synthés ont fait leur apparition, ça sonne un peu plus électro, parfois ça lorgne sur du Phoenix en français. En écoutant le premier single, le très efficace « Coups et Blessures » il est presque impossible de se dire c’est signé BB Brunes. Le reste de l’album navigue également entre rock, pop et éléctro. Une nouveauté pour le groupe qui revendique un son beaucoup plus anglo-saxon (sans doute grâce à la production d’Alan O Connell), mais surtout un son beaucoup plus eighties.
Les Eighties ont la côte, et Etienne Daho n’a jamais autant été cité comme influence majeure. Yan Wagner, La Femme, Granville, Von Pariahs, Lescop se placent dans le sillage du père de la new-wave française. Le premier cité est même allé jusqu’à faire un duo avec lui, quant au dernier, il pourrait être son fils spirituel tellement la voix et la gestuelle sont similaires. BB Brunes a aussi voulu s’inspirer des années 80, et naturellement, on retrouve un peu d’Etienne Daho dans BB Brunes. Dans les sons électroniques mais aussi dans l’écriture. L’écriture d’Adrien Gallo, c’est d’ailleurs sans doute ce qu’il y a de plus plaisants dans cet album. Maladroite dans le premier album, elle est aujourd’hui plus fine et aiguisée, elle ose même les jeux de mots…à la Gainsbourg et à la Etienne Daho. Des sons plaisants, une très belle écriture et un album assez bien ficelé. « Stéréo » colle à l’oreille, « Rue de Buci » ou « Long Courrier » pourraient bien appartenir au répertoire de Benjamin Biolay, le langoureux « Police Deprime » semble sortir de la discographie de Taxi Girl. On voyage loin avec la « Grande Rio« , on pleure sur « Hémophile » et on craque également pour la voix de Felix qui pousse la chansonnette.
BB Brunes année 2012 n’a plus grand-chose à voir avec celui de 2007. Il se fait séduisant, il est mature. Il est adulte. Il est exquis. Pardonnons donc les erreurs de jeunesse de Blonde comme Moi, tournons la page, repartons de zéro et oublions les a priori. Ce serait idiot de passer à côté de ce Long Courrier.