Réforme de l’audiovisuel public: quels enjeux pour demain

Publié le 29 mars 2008 par Cédric Soares

La séance de travail de la Commission pour la Nouvelle Télévision Publique qui s’est tenue mardi 25 mars s’est conclue par l’annonce du montant de la compensation allouée à France Télévisions en prévision de la dégradation du marché publicitaire sur 2008 suite à l’annonce présidentielle du 8 janvier dernier.

Cette somme a été estimée à 150 millions d’euros à la fois sur les bases des recettes 2007 et sur l’hypothèse d’une régression de 20% en 2008.

Le Grand Forum Télérama sur le big bang de la télé qui s’est déroulé dans les locaux de Science Po jeudi 27 Mars, a permis de revenir sur cette estimation et de manière plus globale sur les enjeux de la réforme de l’audiovisuel public français.

Christine Albanelle, ministre de la culture et de la communication, a tout d’abord précisé que cette somme ne constituera pas un apport en capital mais une anticipation sur la redevance 2008. Concrètement, cela n’engendrera pas sur cet exercice un besoin de financement supplémentaire, contrairement aux prochains où la future réforme devrait durablement transformer le modèle économique. Pour rappel, l’estimation des capitaux nécessaires pour remplacer la publicité et financer les nouveaux programmes est de 1,2 milliards d’euros par an. France Télévision devrait rapidement bénéficier de cette avance.

Face à l’injection rapide de nouveaux moyens dans l’audiovisuel public, Nicolas de Tavernost président du directoire de M6, souhaiterait un allègement de l’imposition sur les revenus publicitaires des chaînes privées. En effet, la morosité du marché n’est pas seulement due à l’annonce présidentielle, mais aussi à des facteurs macroéconomiques tels que la crise du pouvoir d’achat, la dilution des audiences due à l’émergence du numérique ainsi qu’ à l’attente de l’application française de la révision de la directive européenne Télévision Sans Frontières. C’est donc bien l’ensemble de l’audiovisuel français qui est victime des aléas du marché et de la frilosité des annonceurs.

Au delà du financement, Patrice Duhamel directeur général de France Télévisions chargé des antennes et de la diversification des programme ainsi que Michel Boyon président du CSA se sont entendus sur le fait que la substitution des revenus publicitaires par le financement public ne serait pas mécaniquement un gage de qualité pour les programmes. C’est pourquoi l’annualisation des objectifs d’audience prônée par Jean-François Copé serait le tremplin pour “plus d’audace” dans la programmation. Les programmes culturels devraient trouver une place de choix en prime-time sans toutefois répliquer l’exemple Arte et ce dans le but de préserver le positionnement grand public des chaînes du groupe.

L’ambition de celui-ci est à la fois d’investir dans la programmation, en préservant ses grands rendez-vous tel que le sport, mais aussi dans le contenu et les technologies nécessaires à la diversification numérique.

Au delà de France Télévisions, c’est l’ensemble des médias français qui doit relever les défis que lui impose la mutation des consommations des supports. Pour la télévision il s’agit d’accompagner la délinéarisation qui passe par le développement de l’offre de VOD et de Catch-up TV (télévision de rattrapage type Arte +7 ou M6 Replay).

Dans ce cadre, la réaffectation des ressources de certains des groupes de télévisions privés ou des opérateurs internet et télécommunication, comme le préconisait le président de la république, serait un placébo qui pénaliserait la diversification de l’offre. Au delà du financement des structures de diffusion ce sont les programmes et les moyens techniques qui doivent bénéficier d’investissements nouveaux.

Alors que les redevances de nos voisins anglais et allemands s’élèvent respectivement à 195€ et 204€, la redevance française est quant à elle gelée à 116€ depuis 2002. D’après la cours de comptes l’inflation a érodé de 10 % la valeur de la redevance depuis six ans (source: Cours des Comptes via le Monde). Les recettes publicitaires des chaines hertziennes n’ont progressé en valeur que de 0,5% sur 2007 (vs +26% sur le câble et le satellite +119% sur a TNT) (source: TNS média intelligence).

Même si l’augmentation des revenus garantis par la redevance en regard au marché publicitaire incertain semble être une priorité, , une telle hausse devient difficilement défendable devant l’opinion publique alors que le pouvoir d’achat est au centre de la polémique.

En effet selon le sondage Ipsos 50% des français sont contre la suppression de la publicité de France Télévisions. Plus du tiers des personnes interrogées estiment que la mesure leur en coutera plus de 50€ par an, contre un quart qui pense que ce sera moins.

De l’avis général des intervenants du forum, l‘état doit s’engager dans une démarche pédagogique de grande ampleur vis à vis des français. De l’autre côté du spectre les futures réformes audiovisuelles devront intégrer les nouveaux entrants du numérique dans le modèle de financement des programmes.

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