La revue Alpes-loisirs n°77 de cet automne consacre un dossier au retour de la faune sauvage dans le vercors
L’exode rural montagnard se poursuit, et plus l’homme devient citadin, plus il rêve d’une nature sauvage, libre et vraie. Ce bouleversement majeur entre le rural et l’urbain pose la question du partage de l’espace.L’auteur du texte et des photos, Jean-François Noblet est conseiller technique Environnement du Conseil général de l’Isère depuis 1989. Il livre une réflexion sur la réintroduction de la faune sauvage, avec un exemple concert, celui de la réserve naturelle des Hauts-Plateaux du Vercors où cinq espèces ont été réintroduites avec succès depuis 1973.
La restauration d’un écosystème ne peut réussir sans la présence de prédateurs
Jean-François Noblet constate d’abord que “l’activité agricole abandonne prorgressivement les espaces difficiles à exploiter et la concentration urbaine se poursuit, laissant la place à une nature de moins en moins soumise à l’impact humain.” Mais l’espace sera t-il équitablement partagé ? L’auteur souhaite que “des écosystèmes totalement reconstitués puissent à nouveau s’épanouir.”. Pour lui, “c’est le signe d’une nouvelle conception de nos relations avec la nature sauvage, libre et vraie.”Avec l’exode rural et la déprise agricole, “chaque année, en Isère, un tiers des mille hectares perdus pour l’agriculure sont dorénavant occupés par des espaces boisés, ce qui représente une aubaine pour les espèces animales forestières” on constate une augmentation des populations d’ongulés (chevreuils, sangliers), qui profitent de la diminution du nombre de chasseurs. Les prédateurs ont suivi, protégés par la loi.
Il constate ensuite que “sociologiquement, les choses évoluent également. Les urbains qui s’implantent en milieu rural prennent le pouvoir dans les communes.”
Jean-François Noblet passe en revue ensuite le cas des espèces qu’évoque Robert Hainanrd dans “La réintroduction de l’ours et d’autres espèces sauvages au Vercors” : ours brun, lynx, chat sauvage, loutre, chamois, bouquetin, marmotte, castor, aigle royal, gypaète barbu, percnoptère d’égypte, grand-duc, grand tétras, bison, auroch, cheval sauvage et loup.
Après les réintroductions consensuelles de marmottes, de cerfs élaphe, de bouquetins, de vautours fauves et après l’échec de la malheureuse introduction de mouflons corses, après le retour naturel de la loutre et du castor, la seule exception au consensus reste le loup :
- “Les chasseurs voient dans l’arrivée des prédateurs des concurrents les privant de gibier et s’inquiètent de l’arrivée de touristes venant observer la faune qui dérangeraient les espèces chassables”.
- “Les éleveurs affirment, à juste titre, qu’ils ont déjà assez de difficultés pour survivre et exercer un métier difficile. Ils ont donc naturellement aucune envie qu'on ajoute des prédateurs dont il faudra se protéger pour limiter les dégâts sur le bétail. Ils craignent également une concurrence d’herbivores pour l’herbe et l’eau des hauts plateaux.”
La polémique de l’ours
Le Vercors a été le dernier refuge de l’ours brun dans les Alpes : la dernière observation authentifiée date de 1937, à Saint-Martin-en-Vercors. Jean-François Noblet nous rafraichit la mémoire sur le projet de réintroduction de l’ours avorté en 1991 mais nous rappelle que certains ne desespèrent pas : “Il faudra bien pourtant rediscuter, un jour, du retour de l’ours brun, rsque la cohabitation entre les loups et les bergers sera ql sée, grâce à la modification des techniques d’élevage et à une meilleure prise en compte de l’importance de la faune sauvage.”Il évoque alors le récent colloque de Lyon des 10 et 11 février 2012 : "Les réintroductions, un atout pour restaurer les écosystemes", organisé par le Cora faune sauvage où plus de quatre cents scientifiques amateurs et professionnels (la buvette y était), se sont penchés sur les réintroductions animales, sur la wilderness et le rewilding ("l'ensauvagement des territoires") en montrant un intérêt grandissant pour la restauration d'écosystèmes naturels, avec une une faune aussi complète que possible.
Voilà qui donne envie de se replonger dans "L'ours brun dans les Alpes françaises : faisabilité de sa réintroduction" de George Erome (ARTUS) et Jean-Louis Michelot (CORA).