Voilà.
Il n’y avait à mon sens pas de meilleur moyen pour vous plonger dans l’univers de Tame Impala, ce groupe australien qui m’a noyé dans un océan d’onirisme ces dernières semaines, que d’attaquer avec le sublime trailer de leur nouvel album: Lonerism
Aujourd’hui, j’ai la lourde tâche de critiquer cet album qui vient de sortir dans nos contrées, comme s’il avait pour objectif d’édulcorer un automne morbide. Soyons francs, je ne vais pas m’amuser à le lyncher tant il m’a transporté dans des horizons lointains et positifs. Lonerism fait partie de ces albums que j’ai écouté, ré-écouté et ré-ré-écouté, il a même été jusqu’à me faire décrocher d’une période beachfossilienne (et croyez-moi c’est un exploit). C’est donc après une trentaine d’écoutes en un mois (Oui oui…) que je viens à vous pour y poser un bilan des plus flatteurs.
Lonerism sort deux ans après InnerSpeaker, album qui avait déjà à l’époque retourné bien des esprits. Il est par exemple impossible d’oublier la voix de Kévin Parker, le chanteur de la formation, scandant avec 1000 effets sur sa voix le mythique « Why Won’t You Make Up Your Mind ? ». Lorsqu’un groupe attaque de front avec un tel premier album, c’est une réelle torture que d’attendre le deuxième. Entre peur de la déception et excitation infinie, j’ai passé mon été à écouter les premiers extraits de l’album en attendant la suite. Et à l’heure où les revendicateurs de « bon goût unique et indubitable » geignent en boucle face à un mouvement indie qui joue dans une logique d’intemporalité qui emmerde, permettez moi de tacler joyeusement ce beau monde à coups d’éloges envers nos rêveurs psychédéliques.
InnerSpeaker 2.0 ?
La première question qui vient directement à l’esprit, comme dans de nombreux cas de « Premier Album Qui Éclate Tout », c’est de savoir si le groupe a pris des risques artistiques ou non. Et c’est là tout une question de point de vue tant certains réacs détestent le changement tandis que d’autres ne supportent pas ces groupes qui stagnent comme la vieille eau dégueulasse du ruisseau du coin. Et pour le coup ce sont les deuxièmes qui ne vont pas être contents, tant Lonerism s’inscrit dans la continuité quasi parfaite d’InnerSpeaker. S’applique alors le dicton « On ne change pas une recette qui gagne » approprié pour le coup, mais il est vrai qu’en dehors d’Elephant qui était judicieusement sorti cet été et qui laissait présager un vent de changement pour la suite, on ne peut vraiment pas parler de dépaysement. Lonerism c’est InnerSpeaker en mieux, et c’est déjà pas mal. Pour le reste, l’album s’inscrit dans une logique de progression on ne peut plus propre, chaque morceau possède sa place et aucun n’est effacé par rapport aux autres, là où InnerSpeaker, aussi excellent soit-il, ne retenait l’attention que sur une minorité de tracks. Bien sûr, il faut avouer que l’album compte quelques perles exceptionnelles que nous évoquerons juste après, mais dans l’ensemble l’album s’écoute d’un bloc et on ne peine pas à reconnaître chacune des tracks au bout de 5 écoutes.
Des rêves d’Apocalypse
La force de Lonerism se trouve dans la méthode de composition des morceaux assez vintage, tendance accentué par cet esprit psychédélique défendu par le groupe. Mais là où des groupes modernes comme Animal Collective jouent dans un psychédélisme assez brute et déshumanisé, Tame Impala joue plus dans la pureté, il n’y a là rien d’agressif. Ainsi, de nombreux morceaux de l’albums n’ont pas un découpage couplet-refrain-couplet-refrain classique mais fonctionnent sur une logique Phase A – Phase B. Pour expliquer ce principe vieux comme le monde, la Phase A est jouée de façon standard, chaque instrument y joue avec la voix de Kévin qui accompagne le tout d’une bien belle manière, la Phase B quant à elle est beaucoup plus torturée, contient des solos, des sons parasites, le tout en conservant une grande propreté et rien de trop inaccessible, c’est juste jouissif. Les deux meilleurs exemples de l’album sont « Apocalypse Dreams » et « Keep On Lying« . A la première écoute de ces derniers, posé tranquillement sur son lit à scruter le plafond, on apprécie la voix berçante de Kévin sans pour autant être transcendé, on se dit « Ouais, c’est cool… » mais sans plus, et là le son s’envole littéralement dans un crescendo fluide au possible. La claque est prise, d’autant plus qu’on ne la voit pas venir. A l’inverse, les parfaits contre-exemples sont ceux de « Feels Like We Only Go Backwards » et de « Why Won’t They Talk To Me ? » qui offrent un rendu plus monochrome sans pour autant être ennuyeux. Enfin, j’apprécie la place qu’occupe chaque instrument dans la formation, aucun ne vole la vedette à l’autre et on prend plaisir à ré-écouter un morceau en se concentrant sur l’hypnotisante basse de Jay ou sur la bouillante guitare de Kévin.
Au final ?
Vous l’aurez sûrement compris (auquel cas c’est très grave), Lonerism est pour moi le meilleur album qu’il m’ait été donné d’entendre cette année, bien loin devant les albums de DIIV ou de Lotus Plaza qui m’avaient déjà transportés plus tôt dans l’année, j’attendrai l’album de Beach Fossils et quelques perles d’un genre différent pour me prononcer définitivement, mais quoiqu’il en soit, passer à côté de ce trésor est un blasphème pour tout amoureux de musique. C’est dit.
Si vous utilisez Spotify, c’est le moment d’écouter l’album. Enjoy !