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Certaines n'avaient jamais vu la mer – Julie Otsuka

Par Theoma

 

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« Sois humble. Polie. Montre-toi toujours prête à faire plaisir. Réponds par : "oui, monsieur" ou "non, monsieur" et vaque à ce qu'on te demande. Mieux encore, ne dis rien du tout. A présent tu appartiens à la catégorie des invisibles. »

 

Elles ont quitté le Japon pour une nouvelle vie. A San Francisco, des hommes attendent. Ceux qu'elles n'ont pas choisi.

 

Roman incontournable de cette rentrée littéraire, Certaines n'avaient jamais vu la mer est encensé tant par la critique que par les lecteurs. L'écriture est incarnée et subtile, la narration mélancolique et pudique.

 

Julie Otsuka décrit, avec modestie et élégance, la tragédie méconnue de ces japonaises déracinées. Le dénuement, la fragilité, la douleur, l'humiliation, la honte, l'exil, le racisme, l'auteur réussit à aborder de nombreux sujets, par petites touches, parfois douces, souvent âpres, toujours justes.

 

La lumière est faite sur un pan de l'Histoire ignoré ou oublié, comme tant d'autres, parce qu'il concerne des femmes. Pourtant, et croyez-moi, j'en suis profondément agacée, je vais y mettre un bémol.

 

Malgré toutes ces indéniables qualités, je suis restée passablement en-dehors. Si je comprends le choix de l'auteure de rendre hommage à toutes les femmes concernées et, donc, d'en faire un roman choral, j'ai souvent eu l'impression de lire une grande liste, une énumération sans fin du ressenti de chacune.

 

Même si je suis lasse de ces créations artistiques basées sur de faits réels (vive le pouvoir de l'imagination !) et même si ce roman ne me laissera pas une trace durable, j'ai été touchée par ces femmes et leurs histoires. Merci donc à Julie Otsuka de leur avoir donné la parole.

 

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Phébus, 144 pages, 2012, traduit de l'anglais par Carine Chichereau

 

Extrait

« Nous dépensions jusqu'à notre dernier penny pour les emmener chez le médecin quand ils avaient la fièvre, alors que nous soignions nous-mêmes nos filles à la maison. J'applique un cataplasme à la moutarde sur sa poitrine et j'adresse une prière au dieu du vent et des mauvais rhumes. Car nous savions que nos filles nous quitteraient à l'instant où elles se marieraient, alors que nos fils s'occuperaient de nous quand nous serions vieilles. »

 


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