ignorance, tristesse, inconstance, cupidité, injustice,
luxure, envie, perfidie, colère, méchanceté.
Le philosophe et théologien italien Jean Pic de la Mirandole (1463-1494) offre, dans son Discours sur la dignité de l’homme (De dignitate hominis, 1504, publication posthume), une des premières expressions de la tradition humaniste. Dans cette reprise philosophique du récit biblique de la Création, Pic de la Mirandole veut montrer que ce qui fait la dignité de l’humain, c’est sa liberté, présentée ici comme la possibilité de se choisir. En anticipant sur la tradition existentialiste, Pic de la Mirandole porte à l’attention le fait que c’est par sa manière d’exister que l’humain détermine ce qu’il est. Et, somme toute, il y a beaucoup de vrai en cette idée. Car chaque jour, sans qu’on s’en rende compte, on se façonne soi-même par les décisions que l’on prend. Cela fait réfléchir.
« [L]e parfait ouvrier […] prit donc l’homme, cette œuvre indistinctement imagée, et l’ayant placé au milieu du monde, il lui adressa la parole en ces termes : “Si nous ne t’avons donné, Adam, ni une place déterminée, ni un aspect qui te soit propre, ni aucun don particulier, c’est afin que la place, l’aspect, les dons que toi-même aurais souhaités, tu les aies et les possèdes selon ton vœu, à ton idée. Pour les autres, leur nature définie est tenue en bride par des lois que nous avons prescrites : toi, aucune restriction ne te bride, c’est ton propre jugement, auquel je t’ai confié, qui te permettra de définir ta nature. […] Si nous ne t’avons fait ni céleste ni terrestre, ni mortel ni immortel, c’est afin que, doté pour ainsi dire du pouvoir arbitral et honorifique de te modeler et de te façonner toi-même, tu te donnes la forme qui aurait eu ta préférence. Tu pourras dégénérer en formes inférieures, qui sont bestiales ; tu pourras, par décision de ton esprit, te régénérer en formes supérieures, qui sont divines.”* »