L'ouvrage coécrit par James Turk et John Rubino est aussi juste en termes de culture financière que de conseils en gestion patrimoniale.
Par Charles Sannat.
« Quand on a commencé à l’écrire, le taux de change de l’or était de… 410$ l’once ! ». Cette seule phrase devrait réussir à convaincre ceux qui douteraient encore de la valeur que peut prendre l’or et de celle que peut perdre le dollar… Ce livre, L’effondrement du dollar et de l’euro et comment en profiter, est d’autant plus d’actualité que le Quantitative Easing (ou émission monétaire) prévue vient d’avoir lieu. C’est d’une part la raison pour laquelle nous avons choisi de publier une fiche lecture maintenant, et d’autre part pour nous laisser un peu le temps de le lire, entre autres lectures intéressantes !
Le sort des devises papier est de périr
À travers plusieurs exemples, de la Rome Antique, à la France de l’avant Révolution à l’Allemagne de l’entre-deux guerres jusqu’à l’Argentine en 2003, Turk et Rubino comparent ce qui est peut-être incomparables, mais à bien plus grande échelle, les États-Unis subissent les mêmes pressions que ces pays ont connues et reproduisent les mêmes erreurs du passé avec un déni d’échec flagrant.
La dette des États-Unis, colossale et exponentielle
Vous trouverez au cours de ce chapitre des chiffres très précis sur les niveaux de la dette américaine, avec des dépenses du gouvernement en hausse : en 1800, Washington dépensait 20$ par citoyen américain. En 2006, la somme était de 8500$. Actuellement, le gouvernement américain dépense en une seule année ce qui a été dépensé en un siècle (fin 18e et début 20e), même après ajustement de l’inflation.
Avec un gouvernement qui ne cesse de croître, des ménages qui vivent largement au-dessus de leurs moyens (à crédit), des produits dérivés financiers obscurs tels les subprimes (ultra risqués car comportant des titres basés sur l’endettement de ménages insolvables), la dette totale devient vertigineuse.
Jusque dans les années 70, les emprunts étaient censés produire une « augmentation proportionnelle en richesses ». Or depuis le choc pétrolier, force est de constater que l’écart entre emprunts et PIB s’est largement creusé. Aux États-Unis, il n’y a de croissance que dans les dépenses du gouvernement et la dette totale, les deux ingrédients d’une crise monétaire, pour la nommer.
L’or versus dollar : quelle meilleure monnaie ?
L’or remplit tous les critères d’une monnaie :
- étalon de valeur (mesure acceptée et utilisée pour exprimer le prix des produits et services),
- réserve de valeur qui conserve son pouvoir d’achat sur de longues périodes (on pouvait acheter un bœuf avec une once d’or dans l’Antiquité et maintenant, ou la même quantité de blé depuis le Moyen-Age),
- moyen d’échange.
L’or n’est pas une mesure élastique, un gramme d’or reste une unité de compte qui ne change pas, au même titre qu’un pouce ou un centimètre. Dans un schéma publié page 68, on voit bien la stabilité de l’or à travers le prix d’un baril de pétrole de 1945 à 2007. Lorsque celui-ci est libellé en grammes d’or, la courbe reste relativement horizontale avec quelques écarts, et lorsque le baril est libellé en dollars, la courbe est franchement ascendante.
Le dollar lui, n’est pas immuable car « il n’est pas défini de façon immuable ». Il n’est qu’une « écriture comptable, une reconnaissance de dette des banques qui sont autorisées par le gouvernement américain à créer des dollars ».
Le problème de l’or est que l’on peut difficilement tricher avec sa quantité, c’est sans doute pour cette raison qu’il a peu à peu été évincé du circuit monétaire. Les monnaies papier, elles, sont contrôlées par des gouvernements qui font ce qu’ils veulent et qui sont d’une particulière inaptitude à gérer les affaires monétaires, généralement tiraillés entre la colère des contribuables et ceux (de plus en plus nombreux) qui reçoivent l’aide de l’État. Le mal est apparu avec les monnaies papier, à la fin du 17e siècle. C’est en substance ce que raconte le Professeur Antal Fekete dans « Le retour au standard or ».
Or et essor
« Les fondamentaux de l’or sont positifs », s’intitule le chapitre 10, page 107. Il suffit de comparer la quantité d’or et le nombre de dollars nécessaires pour acheter les principales actions de l’indice Dow Jones pour se convaincre que l’or est vraiment très bon marché par rapport aux actions. Le ratio DJ/or poussé à son paroxysme indique bien que l’or va continuer de monter et les actions vont chuter. L’autre facteur d’essor de l’or est une demande monétaire sur le point d’exploser : le livre a été écrit en 2007 puis mis à jour en 2011 : ça y est, nous y sommes, le QE a eu lieu.
Sur le choix du refuge dans l’or, nous ne vous apprendrons rien et nous ne pouvons que corroborer le choix des auteurs ; enfin ce qu’ils nomment « pièces de collection » relèvent plus de l’investissement que de la numismatique. Le « Coq français » y est même cité ! Bien sûr, les auteurs recommandent-ils de passer de préférence hors du circuit bancaire, mais de là à le garder chez soi, on voit qu’ils ne connaissaient pas certaines solutions de garde externalisée au moment d’écrire leur livre ! Nous rappelons que garder de l’or chez soi, même avec un coffre blindé est très risqué.
Enfin sur les titres miniers et autres ETFs (contrats or) en matière de placement, nous restons plus circonspects, réservant ces options aux boursicoteurs avertis !
La fin du livre est réservée aux autres métaux précieux (argent, palladium…) et à d’autres valeurs (liquidités, obligations, immobiliers) et des stratégies agressives de placements qui peuvent intéresser les investisseurs, encore que, ne l’oublions pas, l’ouvrage est écrit par des auteurs américains.
----
Sur le web.