Des signes qui ne trompent pas : Jbali parle de sa relation à Rached Ghanouchi non pas en termes d’obédience qui va de soi, mais de rapports entre deux militants historiques d’un mouvement politique dont les divergences ne sont pas insurmontables.
Ali Laarayedh, se distingue par son silence, après avoir pris le risque, tout au long de ces derniers mois, de naviguer en eaux troubles et dans les limites de la marge d’autonomie, limitée par l’intervention, inavouée et de nature peu avouable de son Premier Ministre, affublé d’un Ministre conseiller de l’Intérieur, dont la connaissance des rouages de l’appareil sécuritaire et l’autorité effective, étaient, au départ, plus grande que celle dont pouvait disposer le ministre en titre. Prendre des risques, en situation trouble, c’est aussi accepter de se mouiller, pour se présenter comme étant solidaire des agissements de ses associés politiques, solidarité qui lui a coûté, une grande part de la crédibilité morale qui l’avait rendu, à un certain moment, l’homme le plus populaire parmi les membres du gouvernement.
Curieusement, ses ennemis se trouvent aussi bien parmi les « antinahdhas primaires » que parmi le clan des opportunistes ghanouchistes au sein de l’organisation de la Nahdha, parmi les ministres et les membres de la Constituante. On l’a vu à l’occasion des événements du 9 Avril, où l’on avait entendu les Dilou, Bhiri et bien d’autres vouloir faire de Ali Laarayedh un bouc émissaire. Cela continue de plus belle, à travers les déclarations visiblement malintentionnées, dans lesquelles Ghanouchi tente de couvrir sa responsabilité directe dans l’attaque préméditée de l’Ambassade américaine, par le « constat de négligences sécuritaires » jugées par lui coupables.
Mourou semble s’inscrire sur la liste des abonnés absents, même après avoir été affublé du titre de vice président de l’organisation islamiste dont il a été le premier président.Titre qui semble aussi « honorifique » que ne l’est celui accordé à Marzouki. En attendant d’y voir plus clair, il louvoie, non pas au sens maritime du terme, mais dans celui qui consiste à » faire des détours pour atteindre un objectif politique.
Ghanouchi et sa clique sont tout simplement aux abois, Ils sont ceux par qui tous les malheurs pourraient arriver. Ils paniquent et sont donc prêts à toutes les félonies. D’autant plus qu’ils devraient disposer des moyens de nuire à tous le monde et n’attendent donc, pour aggraver la crise, que la « réaction » à leur provocation systématique.
Il y a seulement quelques semaines, leur Chef avait défié le peuple tunisien, en disant qu’ils sont au pouvoir par la volonté du peuple et qu’ils ne le quitteront que si ce dernier exprime clairement son mécontentement. En d’autres termes, le seul moyen de vous débarrasser de nous c’est de manifester dans la rue, au risque de vous faire massacrer, ou bien de vous faire viole(nte)r par les milices comme le laissent entendre son larbin de Zitoun.
C’est ce qui explique la décision de mettre Nida Tounes dans l’impossibilité d’organiser son meeting qui était prévu pour le 13 Octobre, et ce, en affichant d’une manière ostentatoire la volonté du pouvoir de ne pas lui accorder un espace adéquat, parmi les espaces étatiques et à faire pression sur les privés pour qu’ils en fassent de même. C’est manifestement risqué pour l’ image de marque d’un pouvoir dont le détenteur effectif actuel n’a plus rien à perdre, quitte à faire gripper la machine dont le conducteur légal, Hamadi Jbali, ne semble pas en mesure d’honorer ses dires quant à son attitude contre l’exclusion.
En annulant la tenue de son meeting annoncé, Nida Tounes montre qu’il a tout à gagner à ne pas répondre à la provocation et à laisser la bête immonde gesticuler, en menaçant de prendre la Tunisie en otage. Cela pourrait se terminer, en course poursuite, comme dans un film américain où l’on raconte l’histoire d’un holdup qui finit mal pour ses auteurs.
Tout indique que la Tunisie vit, actuellement, la crise politique la plus grave de son histoire, depuis l’Indépendance. Cette évaluation voulue dramatisante, se réfère d’abord, au fait que l’enjeu de cette crise n’est autre que la capacité de notre classe politique, toutes tendances confondues, à s’élever au niveau des valeurs politiques nouvelles que représente, pour l’Humanité entière, l’avènement spécifique de la Révolution tunisienne. L’apport des différents peuples à l’évolution des civilisations humaines, n’est pas fonction de leurs puissances respectives ou de l’importance numériques des individus qui les composent.
Notre révolution, avant de s’inscrire, dans une quelconque finalité à caractère idéologique, ne doit en aucune manière se laisser entrainer dans une logique « révolutionnaire », telle que souhaitée par les « révolutionnaristes » de service, dont une frange s’est déjà discréditée en s’alliant aux islamistes et l’autre, essaie de se frayer une place, à vendre au plus offrant parmi les majoritaires relatifs possibles des prochaines élections.
C’est dans ce sens que la meilleure manière de protéger la Tunisie de ceux qui veulent la prendre en otage, en confisquant sa révolution authentique, c’est de ne pas répondre à la provocation et tout faire pour qu’ils succombent aux effets autodestructeurs de leurs actions propres. Comme tous les ignorants, orgueilleux et pleins de suffisance.
Habités comme ils sont par la déraison et la volonté morbide de domination.
Naceur Ben Cheikh