Ce n'est pas un secret que Fritz Kalkbrenner est un producteur de renom. Mais avec une voix comme la sienne, comment pourrait-on aussi passer à côté de ses talents de chanteur? La soul music est le fondement de ses activités musicales. Et comme un fil émotionnel et esthétique qu'il tisse à travers sa musique, la soul, cœur central de ses influences est enrichie d’autres styles comme le hip-hop, la techno et la house. Au début des années 1990, son frère aîné, Paul, et son meilleur ami Sascha Funke deviennent fous des beats techno, alors que Fritz se nourrit de la musique des artistes hip-hop comme Eric B. & Rakim, KRS One et le Wu-Tang Clan. Il a étudié leur travail, mémoriser des centaines de vocaux et à appris à raconter des histoires, une base fondamentale qui allait plus tard l’aider dans son travail musical. Cette interview fait suite notamment à celle d'autres célèbres producteurs allemands comme Marc Romboy, Extrawelt, M.A.N.D.Y., Thomas Schumacher, Butch ou encore Solee. Tout d'abord, je tenais à remercier Fritz qui a répondu à nos questions.
"Hello Fritz,
Honnêtement, c'est un réel plaisir et un honneur pour moi de t’interviewer car tu es l'un de mes producteurs et chanteurs allemands préférés.
Je voudrais tout d’abord remercier H.I.M. Media qui nous a donné la chance de t’interviewer notamment pour parler de la sortie de ton nouvel album "Sick travellin '", qui sortira mi-Octobre et qui a été enregistré au Suol-Studios à Berlin-Kreuzberg. Pourrais-tu nous donner plus d'informations à propos de ce deuxième opus qui se compte de 13 titres et qui fait suite à ton premier album "Here Today Gone Tomorrow", publié en 2010. Comment as-tu travaillé sur cet album et comment le projet est-il né?
> L'idée d'avoir un deuxième album a commencé très vite après le premier album "Here Today Tomorrow Gone". Environ 4 mois après sa sortie en Octobre 2010, j'ai commencé à produire les premières idées et croquis de ce nouvel album, vers Février 2011 donc. Pour le premier album vous avez toute une vie, mais pour le deuxième album vous avez à peu près un an ! Il faut donc se dépêcher. Mais je pense que si vous avez un fil directeur et une idée générale de la façon dont vous voulez faire l'album, c’est beaucoup plus facile. Je savais déjà par exemple que je voulais travailler avec un grand nombre de musiciens plus réels : des bassistes, des guitaristes, etc. C'est comme ça que l'idée de « Sick Travellin » est née.
Y a t-il une anecdote à nous raconter sur ce nouvel album, peut-être concernant une des pistes présente?
> Je pense que l'anecdote la plus caractéristique sur l'album est sans aucun doute celle à propos du titre de Gil Scott Heron “Willing”. J'ai eu l'idée de reprendre ce titre il y a très longtemps. L'original a été produit par Gil Scott Heron et Brian Jackson en 1980, et il était déjà très efficace sur les dancefloors... Laissez-moi dire "saveur" à l'époque. Quand Gil est décédé l'année dernière, je suis entré dans une phase d’hésitation sur produire ou non ce titre, notamment d'un point de vue éthique. J'étais sur le point de laisser tomber l'idée, en produisant le reste de l'album, je l’ai laissé de côté puis finalement j’ai changé d’avis et je l’ai finalement produit.
Quelles ont été tes influences musicales sur cet album?
> Les influences musicales de cet album sont fondamentalement les mêmes influences musicales que j’ai toujours eue. C'est-à-dire de la musique de club, mais aussi de la Soul et du Hip Hop. Peut-être le Hip Hop pour le côté technique et pour la production - par exemple Hi-Tek et J Dilla, j'apprécie la façon dont les "flips" de leurs samples sont travaillés, et j'adore l'aspect structurel de leurs pistes soul.
"Get A Life" la première sortie de l’album? Pourquoi ce titre? C’est celui que tu préfères?
> Oui, ça sera le premier single. Eh bien, au fond, je l'ai pris parce que c'est une chanson assez accrocheuse avec des paroles, jouable sur la radio et qui montre la variété de mes productions.
En ce qui concerne l'endroit où tu as enregistré l'album, Berlin, pourrais-tu nous dire ce que tu trouve de spécifique à cette ville? Tous les principaux artistes de la musique électronique, en particulier les producteurs de minimal et de techno sont à Berlin. Pourquoi? Tu as quelques idées à ce sujet?
> Personnellement, j'ai un point de vue légèrement différent sur Berlin car je suis né et j'ai grandi ici. Ce sera toujours ma ville natale. Mais je pense que les raisons pour lesquelles tout le monde souhaite venir ici sont tout simplement les opportunités offertes par la ville, comme des loyers bas, une scène musicale prospère. Et je suppose que c'est la raison pour laquelle tout le monde vient ici et veut essayer de faire de nouvelles choses.
Le premier semestre de 2012 est terminé. Si tu regardes en arrière, que peux-tu en dire? Quelle est ta vision de ces derniers mois? On peut imaginer que tu étais surtout focalisé sur ton album? Déjà des plans pour l’année prochaine ?
> Eh bien oui, ce fut divisé en 2. La moitié du temps j’ai travaillé sur l'album, le reste j'étais en tournée. A partir d’Octobre je vais faire un peu moins de dates pour plutôt promouvoir mon album et préparer ma tournée à partir de Janvier 2013.
Après nous avoir donné ces infos sur ton actualité musicale, nous aimerions en revenir à tes racines musicales. Pourrais-tu nous dire brièvement comment tu es devenu chanteur, puis producteur?
> Je pense que j'ai commencé à produire quand j'avais environ 17 ans. A l'époque Paul faisait déjà de la production à la maison. Ainsi, j'ai commencé à utiliser son sampler AKAI et un SB12, bossant sur des choses vraiment basiques. Tout ce qui concerne le chant a commencé plus tard, quand un très bon ami, DJ Zky, m'a demandé de faire la voix pour son titre "What I Can Say", qui est sorti en 2004 je crois. Il est venu me dire "Hey Fritz, voici la chance de me prouver que tu peux vraiment chanter!". Au début, ce fut assez gênant, la première fois dans un studio. J'ai par exemple dû demander aux gars s’ils pouvaient quitter la salle pour que j'enregistre. J'étais un peu timide au sujet de ma voix à l'époque. Mais cela a changé, heureusement. Maintenant, je peux enregistrer avec d'autres personnes dans le studio!
Au début, est-ce que ta famille a compris ce que tu voulais faire dans la vie? Et maintenant sont-ils fiers de ce que tu as accompli au fil des années?
> Mes parents étaient plutôt détendus à ce sujet, car ils avaient déjà l'expérience avec Paul, qui avait déjà eu des premiers succès à l’époque. Donc ce fut plus facile pour moi que pour Paul. Tout simplement parce qu'ils avaient déjà vécu cela avec lui et ils savaient donc que cela marcherait pour moi.
Concernant ta famille, tout le monde connaît ton frère Paul. Quelle est votre relation musicalement parlant? Quelle est son importance dans ta carrière? Ou inversement?
> Paul et moi avons toujours eu une relation très forte. Lorsque l'un de nous produit quelque chose, on va toujours vers l’autre pour obtenir des conseils, comme "Hey, qu'est-ce que tu penses de ce break ou de ce synthé?" Cette fois, nous avons décidé que nous ne nous partagerions que des travaux finis. C'était une sorte de "Hey man j'ai fait un album!" Et l'autre dirait alors «Ah ouais moi aussi!".
Si tu es d’accord, on peut dire que tu as atteint les sommets de la musique électronique avec ta voix posée sur le titre "Sky And Sand", un des grands classiques de l’année 2008, publié à l’occasion de la sortie du film "Berlin calling". Comment cette piste est-elle née et pourquoi Paul t’a demandé de bosser dessus? Était-ce la première fois que vous faisiez un duo avec ton frère?
> Ce fut la première et la dernière fois que nous avons travaillé sur une piste ensemble, à ce jour. J’avais enregistré quelques vocaux quand j'étais dans son studio, à la base, pour une autre piste. Deux jours plus tard, Paul m'a appelé et m'a dit qu'il avait retravaillé cette voix et que je devais venir écouter ce qu'il avait fait avec. Ce fut très rapide. A la fin, il nous a suffit de 2 jours pour terminer la composition.
Peut-on dire que ce morceau a été celui qui a lancé ta carrière?
> Il m’a donné un coup de pouce, évidemment. Mais je n'aime vraiment pas être associé uniquement à cette piste, car j’ai maintenant sorti deux albums et beaucoup d'EP. Ce n’est pas très gratifiant de parler uniquement de ce track alors qu’il y en a beaucoup d’autres.
De plus en plus de lecteurs nous posent des questions sur le matériel utilisé des DJs et producteurs que nous interviewons. Comment as-tu produit album? Avec quel logiciel ou instruments?
> La plupart de mes idées commencent avec Ableton Live 8, c'est là que je note les premières ébauches. L’étape suivante c’est la finalisation de la piste, qui se passe dans Logic, qui est aussi le dernier moment avant l’entrée en studio où nous utilisons l’ADD mix unit, qui est un énorme mélangeur. J'utilise aussi beaucoup de compresseurs comme Teletronix, Ampex ou Tube Tech, parce que j'aime vraiment ce matériel analogique et les sons distincts dont il dispose. Je préfère ce genre de matos plus que n'importe quel VST ou logiciel.
L'interview sera publiée sur un site web principalement lu par des Français. Que connais-tu de la scène électronique française? Y a t-il des artistes que tu connais personnellement ou dont tout simplement tu aimes la musique?
> Je dirais que la scène musicale électronique française est vitale. A chaque fois que je viens, je passe d’excellents moments. Paris, Marseille et Lyon sont quelques-uns de mes spots préférés. Pour ce qui est des noms, honnêtement, je ne peux que penser qu’aux grands noms qui sont populaires en dehors de la France car malheureusement je ne connais pas très bien votre scène underground.
Et à part la musique, quels sont tes hobbies?
> Je collectionne les montres mécaniques des années soixante et soixante-dix. Je sais que cela sonne comme un passe-temps bizarre, mais c'est vraiment ma passion et je suis à fond dans la mécanique et l'esthétique qu'elles ont.
Fritz, avant de conclure cette interview, nous avons encore quelques questions à te poser. Parfois, un mot suffit!
La piste que tu nous conseilles d’écouter dans ta discographie?
> Je choisirais probablement "Monte Rosa" qui se trouve sur le nouvel album. Oui, c'est celle là. Je vous conseille de l’écouter!
Un artiste avec lequel tu voudrais bosser un jour?
> Un grand rêve serait de travailler avec Al Green. Malheureusement, cela restera probablement un rêve ... Mais il ne faut jamais perdre espoir!
Ton souvenir le plus fou en live ou le meilleur?
> L'année dernière, j'ai joué pour la tournée de Paul, et tout d'un coup à Leipzig des chaussures à talon aiguilles ont volé la scène! J'ai failli être blessé et me faire assez mal. Il y avait trois paires sur la scène. J'ai d'abord pensé que c’était une attaque intentionnelle, mais après le spectacle, nous avons rencontré les femmes auxquelles appartenaient les chaussures et elles ont dit que c'était leur façon de montrer leur enthousiasme!
Un mot sur la France?
> Amour! Hey, je vous aime les gars et je suis impatient de revenir vous voir!
Tu chantes sous la douche?
> Oui, oui.
Fritz, merci beaucoup, beaucoup pour le temps que tu as consacré à Actualités Electroniques et en particulier pour cette interview complète et exclusive. Nous attendons avec impatience tes prochaines productions et ton nouvel album. A bientôt! "
Dj Aroy
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