Les personnes prétendument "électrosensibles" ne sont pas plus capables que le reste de la population de savoir si elles sont exposées ou non aux ondes électromagnétiques.
Par Stéphane Montabert, depuis Renens, Suisse.
"La science cherche mais ne trouve pas", annonce pudiquement une dépêche de l'AFP au sujet d'un champ d'étude en plein essor, l'hypersensibilité aux ondes électromagnétiques.
L'hypersensibilité aux ondes touche certaines personnes - dites électrosensibles - lorsqu'elles sont soumises aux champs électromagnétiques dans lesquelles baigne notre environnement, développement du téléphone portable oblige. Leurs symptômes n'ont rien d'enviable : maux de tête, troubles de la concentration, vertiges ou acouphènes, pour n'en citer que quelques-uns.
Menée par l'ANSES française, l'Agence Nationale de Sécurité Sanitaire Alimentation Environnement Travail, la recherche avance bon train. D'ailleurs, l'ANSES ne manque pas de fonds publics, comme en témoigne un agenda bien chargé :
Neurologue de l'Inserm (Toulouse), Jean-Pierre Marc-Vergnes explore pour sa part l'hypothèse d'une relation entre le syndrome d'hypersensibilité aux ondes et un dysfonctionnement du système sensitif des malades. (...) Ses travaux, financés par l'Anses, débuteront en janvier.
Il faut continuer à faire des études pour notamment mieux caractériser les expositions et voir si certains paramètres, aujourd'hui non analysés, seraient en relation avec les symptômes dont se plaignent les électro-hypersensibles, explique [un autre chercheur].
L'Anses a fait de ce thème une priorité avec, en particulier, la mise en place en 2011 d'un Comité de dialogue Radiofréquence et santé réunissant associations de malades et opérateurs télécoms, explique le directeur de l'Agence, Marc Mortureux.
Problème : ces pistes de recherche sont basée sur... du vent. Plusieurs autres études ont montré que les prétendus électrosensibles ne sont pas plus capables que le reste de la population de savoir s'ils sont exposés ou non aux ondes.
En d'autres termes, les gens attribuant leurs maux de tête à des antennes-relais de téléphone portable sont incapables de savoir s'ils sont réellement soumis à des ondes, ou s'ils ont seulement l'impression de l'être. Ce qui n'a rien de surprenant puisqu'ils attribuent des maux de têtes aux antennes même quand elles ne sont pas branchées.
Ne confondons pas avec les ondes émises par un téléphone portable, qui bien que de très basse énergie, se retrouvent en partie dans le corps humain avec des effets infinitésimaux : des études du même acabit s'échinent à en démontrer les effets, sans succès jusqu'à présent, mais relèvent au moins d'une approche rationnelle de la science. Ici, nous parlons des antennes de téléphonie mobile situées à portée de vue de l'individu électrosensible moyen et gâchant sa vie - alors même qu'il est incapable de dire si l'antenne est en fonction.
Un internaute met les points sur les i :
Je travaille en sous-traitance pour SFR, je fais la maintenance des fameuses antennes relais décriées ces derniers temps (...) Plus l'on parle dans la presse de ces différentes affaires d'ondes nocives causant maux de tête et autres symptômes, plus je me fais interpeller par les riverains des antennes sur la plupart des sites ou je me déplace.
Le plus marrant, et qui confirme d'ailleurs cet effet nocebo, c'est que les gens se plaignent uniquement là où les antennes sont visibles. Dites-vous bien que si vous habitez en ville, il y a des relais tous les 200m à vol d'oiseau et donc, même si vous ne voyez pas les antennes, elles sont bel et bien présentes. Je veux bien croire que certaines personnes soient plus sensibles aux ondes que la moyenne. Mais quand je rencontre des personnes qui me parlent de maux divers et variés qu'ils ne ressentent que chez eux parce qu'il ont une antenne [en face], alors que quand ils sont au café du coin (dont celui-ci est aussi équipé d'une antenne non voyante), ils ne souffrent plus, je dis halte à la parano !!!
Le médecin directeur général adjoint de l'agence admet humblement "qu'on n'a pas mis en évidence les mécanismes physiologiques de ce syndrome". C'est le moins que l'on puisse dire, en effet. Cela n'empêche pas les médias de reprendre les recherches les plus fantaisistes sans le moindre recul et d'accuser les antennes de téléphonie mobile d'attirer le mauvais sort et de faire tourner le lait... Il faut bien vendre du papier, n'est-ce pas ! Et ce ne sont pas les pantalonnades récentes sur les OGM qui rehausseront la réputation de la presse francophone grand public sur les questions scientifiques.
Mais aucune excuse n'est trop bonne pour dépenser l'argent public, fusse-t-il dilapidé à chasser le Dahu. D'ailleurs, même si elle ne repose sur absolument rien de rationnel, la souffrance est bien réelle, comme l'explique un haut responsable de l'ANSES :
Nous ne sommes pas là pour nier ou non la réalité de ce syndrome. Il y a des gens en souffrance, avec des conséquences importantes sur leur vie sociale et professionnelle (...). Ce qui nous importe c'est que les recherches soient pertinentes et que les préoccupations des malades soient prises en compte dans les recherches, explique-t-il.
Bref, on va chercher, pour rien, juste pour faire plaisir. De toute façon, c'est le contribuable qui régale... Et le directeur de conclure, toute honte bue : " C'est d'autant plus important que beaucoup de charlatanisme se développe pour la prise en charge de ces patients."
Il fallait vraiment oser !
Alors, à ces pauvres gens pris bien malgré eux par leurs symptômes psychosomatiques dans le mouvement technophobe moderne et confortés dans leurs croyances par des fonctionnaires complices, il ne me reste plus qu'à conseiller de combattre le feu par le feu :
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